Moi, Viyan, combattante contre Daech (Pascale Bourgaux, Said Mahmoud)

 

En 2016 , la journaliste Pascale Bourgaux sort avec Saïd Mahmoud « Moi, Viyan, combattante contre Daech ».

Ce livre-témoignage constitué à partir d'interviews, raconte le parcours de Viyan une jeune femme kurde qui a 18 ans a décide de quitter son village de Kurdistan syrien pour rejoindre les YPG afin de lutter contre la percée de Daech dans la vallée de Rojava.

Dans son monde rural et pauvre, les femmes n'ont pas le droit d'aller à l'école et sont condamnées à avoir une vie de bête de somme une fois mariée, jeune et de force selon les anciennes traditions.

Mais Viyan est différente et dotée d'un fort caractère. Elle dissimule son projet à sa propre famille et prend le maquis dans la plus grande clandestinité.


Auprès de ses instructeurs, Viyan découvre les rigueurs de la vie de militaire, entre entrainement physique à l'aube, corvée, tours de garde la nuit dans le froid des montagnes protectrices.

Rapidement son habileté au tir est détectée et lui vaut un traitement de faveur. Logiquement Viyan devient « snipeuse » et fait des dégâts sur le front.

Elle décrit ses adversaires de Daech assez bien, plus nombreux et mieux équipés en armement que les Kurdes, mais étrangement moins courageux, fuyant lorsqu'ils tombent sur des femmes combattantes, seules capables de leur ôter l'aller simple vers leur paradis fantasmé et surtout des « étrangers » venus du monde entier, connaissant mal le terrain.

Les Kurdes eux luttent pour leur terre et s'ils ne craignent pas plus la mort que leurs ennemis, ils considèrent la vie comme précieuse et ne gaspillent pas leurs recrues dans de spectaculaires mais couteuses attaques suicides.

Malheureusement pour elle, une blessure par balle au bras va mettre fin à sa carrière de « snipeuse » .

Reconvertie dans la logistique, Viyan n'en continue pas moins de s'exposer pour alimenter ses frères et sœurs au front. Elle jouit également d'un prestige nouveau au sein de son village et de sa famille.


En conclusion, « Moi, Viyan, combattante contre Daech » est un livre fort et simple qui a pour principal mérite de mettre la lumière sur les Kurdes, qui dans la lutte contre l'Etat islamique en Syrie et en Irak ont fait le « sale boulot » des Occidentaux sans obtenir ce qu'ils souhaitaient : un état autonome reconnu internationalement.

Dans cette « sale guerre » qui se joue au sol, souvent pâté de maison par pâté de maison, le parcours de Viyan est singulier et demeure dans un pays archaïque ou la femme a un statut à peine meilleur que celui d'une bête de somme, une victoire absolue du féminisme.

Car en effet les femmes kurdes, musulmanes également se battent en première ligne contre l'ogre barbare et lui infligent de cruelles pertes en tirant profit de leur statut supposé inférieur.

La raison de l'engagement de Viyan est simple : l'amour pour son peuple, pour ses terres et une puissante révolte contre la montée de ce nouveau totalitarisme moderne.

Les Kurdes ne craignent pas non plus la mort mais ne la cherchent pas. Ils respectent et chérissent même la vie, contrairement à leurs adversaires conditionnés pour se sacrifier.

Leur détermination et leur connaissance du terrain ont pu avec l'aide de l'aviation occidentale faire la différence dans la bataille de Kobané, décisive en 2015 pour bloquer l'avancée de l'EI.

Encore aujourd'hui, alors que l'Occident détourne les yeux, indifférent, ils tiennent prisonniers les 12 000 dans des camps au bord de l'implosion...

Une bombe à retardement ?


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