Froid dans le dos (John Sandford)

Nous sommes toujours au début des années 90, 1992 pour être plus précis, et le prolifique John Sandford sort « Froid dans le dos » suite logique de « Froid aux yeux » sorti seulement une année auparavant.
Empruntant au même synchronisme, j’enchaine à la fin du dernier millénaire les deux romans et me plonge dans l’intrigue assez dense de « Froid dans le dos ».
Ici Lucas Davenport, l’ex policier de Minneapolis, licencié par son supérieur suite à la ténébreuse affaire Michael Bekker, s’est reconverti dans sa seconde passion de concepteur de jeux vidéos, ce qui lui assure une vie confortable.
Mais suite à l’évasion du célèbre chirurgien tueur lors de son procès à New-York, Davenport est contacté par son amie Lily Rothenburg, policière au sein de la capitale économique des Etats-Unis afin de lui apporter son aide pour coincer le danger public que représente Bekker dont les obsessions pour la mort n’ont pas été atténuées par son séjour en prison.
A New-York, Davenport découvre un autre environnement, plus tumultueux, urbain et agressif que celui de sa bonne « petite » ville de Minneapolis.
Il est briffé par les supérieurs de Lily, Kennett un vieux policier affaibli par une récente crise cardiaque et le ventripotent O’Dell l’un des plus hauts gradé du NYPD pour enquêter sur la mort de Walter Petty, un spécialiste de l’informatique assassiné parce qu’il enquêtait lui-même à l’intérieur de la police sur une série de meurtres de malfrats tués par une équipe en apparence parfaitement rodée à l’assassinat ciblé.
Davenport se retrouve avec deux affaires épineuses sur les bras, avec d’un coté son vieil ennemi lâché dans la nature pour une série de meurtres sauvages et de l’autre tout ce qui ressemble à une sordide affaire interne policière.
Son déplaisir s’accroit lorsqu’il apprend que Lily avec qui il a entretenu une brève liaison est avec Kennett le directeur de l‘enquête Bekker, même si au final les deux hommes finissent par mettre de coté leur jalousie pour observer un prudent respect.
Comme on pouvait s’y attendre, le redoutable Dr Bekker traumatisé par la sauvage agression que lui a infligé Davenport en raison des horribles cicatrices laissées sur son visage, reprend sa série de meurtres, en traquant des femmes ou des hommes de petit gabarit car plus faciles à transporter, pour les emmener dans une vieille cave du quartier de Soho réaménagée en salle d’horribles expérimentations sur la mort.
Toujours obsédé par les yeux, Bekker cherche malsainement à observer le moment du basculement vers l’au-delà cherchant à y déceler une part d’infini ou de grâce divine.
Il utilise pour cela la maison de Madame Lacey, vieille dame dépendante à la drogue (notamment marijuana) que Bekker lui fournit complaisamment pour atténuer ses souffrances en échange de l’usage d’une partie de sa maison.
Habile, le chirurgien tueur utilise la carte bancaire de la vieille dame pour effectuer des retraits et se pourvoir en matériel médical pour ses expériences mais également en quantités importantes de drogues, notamment le PCP, qu’il consomme toujours en fortes doses.
Au fur et à mesure des horribles meurtres de femmes prises au hasard dans les parkings, Bekker fait parler de lui dans les médias ce qui renforce la pression sur la police.
Le tueur qui demeure insaisissable, surprend néanmoins la police en lui adressant une lettre ou il se déclare témoin d’un meurtre, en réalité une nouvelle action des tueurs de la police, surnommé par Davenport et Lily, les Robins des bois.
Flanqué de sa partenaire Barbara Fell que O‘Dell soupçonne de faire partie des Robins des bois, Davenport utilise les bonnes vieilles méthodes du flic de terrain mêlant enquête de voisinage et menace de revendeurs comme Jackie Smith, pour tenter de débusquer Bekker.
Ce qui devait arriver arriva et l’athlétique quadragénaire noue une relation avec la séduisante Fell, tout en profitant d’une de ses absences pour fouiller son appartement.
Davenport n’a pourtant pas trop l’occasion de pousser plus loin ses investigations puisqu’il est sauvagement passé à tabac par deux Robins des bois.
Il réussit à casser le bras d’un deux et ne doit la vie sauve qu’à l’intervention de Lily qui pistolet à la main, les met en fuite.
L’agression de Lucas n’est malgré tout pas suffisante pour le faire renoncer à ses recherches ce qui lui permet d’approcher Whitechurch, un des dealers de Bekker, qui travaille dans un hôpital.
La mort de Whitechurch, tué parce qu’il avait reconnu l’identité de son principal client, met Davenport sur la piste encore chaude du médecin, qui a conservé l’horrible manie de découper les paupières de ses victimes.
Davenport a alors comme idée d’attirer Bekker en flattant son gout pour la reconnaissance scientifique en organisant une conférence sur les travaux du nazi Mengélé, coupable d’horribles expériences sur les prisonniers durant la Second guerre mondiale.
Incapable de résister à ses pulsions, Bekker se rend à la conférence, mais flaire le piège et s’en extrait avec un aplomb et une férocité incroyable après avoir tué avec un pupitre en métal un policier de faction.
Lucas a néanmoins le déclic capital lorsqu’il comprend la nouvelle technique de Bekker, se déguiser en femme, séduisante blonde, en ayant observé les techniques d’un codétenu travesti en prison.
En parallèle, Lucas qui ne fait confiance qu’à Lily (et encore !), se met à soupçonner O’Dell lui-même dans le meurtre de Petty, lorsqu’il apprend que l’ex toxicomane d’Atlanta, Cornell Reed, débusqué par Petty, a bénéficié de sa protection pour se taire en tant que témoin d’un des meurtres des Robins des bois juste avant l’assassinat de l’informaticien.
Le rythme s’accélère, les affaires se rejoignent lorsque Bekker est localisé dans sa maison de Soho après qu’on ait pu à partir des billets retrouvé sur le corps de Whitechurch, remonter jusqu’à la carte de crédit de et identifier sur les caméras de surveillance le chirurgien travesti.
Davenport contacte O’Dell qui envoie deux tueurs pour éliminer Bekker devenu à son tour un témoin gênant, mais les deux homme sont confondus sur place par le flic de Minneapolis qui reconnait ses deux agresseurs.
Fell et Davenport pénètre dans la maison obscure, traquant le tueur finalement retranché dans la cave après avoir tenté d’éliminer une Bridget Land amie devenue embarrassante de Madame Lacey elle-même assassinée pour l’avoir reconnu à la télévision.
Comme souvent, Bekker shooté à mort, perd les pédales, refuse de se rendre et se fait tuer par Fell.
La menace Bekker éliminée, vient l’heure de régler ses comptes avec la hiérarchie de la police.
Bien que O’Dell soit mouillé jusqu’au coup dans l’affaire des Robins des bois, il s’avère en réalité que c’était Kennett qui recrutait les tueurs parmi les policiers et organisait les raids punitifs dans le but pensait t il d’assainir New-York des délinquants échappant aux mailles de la justice.
Lily est choquée d’apprendre que son amant a demandé l’exécution de Petty, qui était fou amoureux d’elle et pour qui elle avait une tendresse quasi maternelle.
Elle provoque une violente dispute qui se solde par la mort du vieux flic cardiaque.
De son coté, Davenport comprend également dépité que Fell est elle-même un membre des Robins des bois auxquels appartient son père.
Pire, Fell semble avoir elle-même tué le pauvre Petty dont les talents d’informaticiens avaient mis toute l’organisation en péril.
Cette révélation est insupportable pour Davenport qui rompt sur le champs tout projet de vie commune avec la femme policière et rentre ébranlé mais heureux du devoir accompli dans sa chère ville de Minneapolis.
En conclusion, « Froid dans le dos » est encore une fois un excellent polar à l’intrigue un chouia trop complexe mais particulièrement agréable à suivre.Sandford change ici de braquet, transportant son personnage fétiche dans les inextricables méandres du New-York du début des années 90 à l’époque non encore pacifié par le maire Giuliani. Davenport retrouve encore son ennemi le redoutable Bekker, personnage diabolique réellement effrayant, qui a eu cette fois l’idée géniale de devenir une femme pour mieux tromper son monde et commettre des meurtres d’une violence terrorisante.
L’intrigue déjà passionnante autour de Bekker, véritable caméléon urbain accro à la drogue et la mort, s’étoffe également autour d’un histoire de réseau de flics exécuteurs qui insuffle un fort vent de paranoïa.
Seul contre tous, Davenport doit donc jouer des coudes pour s’extraire de cette jungle d’asphalte et mener à bien ses deux missions externes et internes, particulièrement délicates.
Avec « Froid dans le dos », Sandford réussit le tour de force de surpasser le déjà excellent « Froid aux yeux » et on ne peut que regretter la mort du criminel pour la suite des aventures de Davenport…
Étonnant donc vu les qualités d’écriture de Sandford, que ses romans n’aient pas bénéficié de plus d’exposition médiatique… car le tandem Davenport-Bekker recèle son lot de moments cultes à vous en faire perdre le sommeil !
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