Apocalypse, Hitler (Pascale Clarke, Danielle Costelle)

 


Dans la lignée des brillants travaux de pédagogie historique, « Apocalypse, Hitler » série en deux parties, voit le jour en 2011.

On retrouve Pascale Clarke et Danielle Costelle à l’origine de cet impressionnant travail de recherche, restauration et de coloration des archives.

L’enfant terrible du cinéma français, Mathieu Kassovitz prête ici sa voix pour une narration sobre.

Dans la première d’entre elles, appelée « La menace », on s’intéresse au passé d’Adolf Hitler, né en 1889 dans un petit village autrichien prêt de la frontière allemande de la région de Bohême.

L’aspect familial est important pour étudier la psychologie du futur dictateur et on notera que son père Alois, était un douanier extrêmement autoritaire et brutal, alors que sa mère Klara, était un objet de vénération qui mourut prématurément à 47 ans d’un cancer.

Hitler conservera une relation intime extrêmement forte avec sa mère et conservera un portrait d’elle jusque dans ses derniers jours dans son bunker de Berlin.

Remonter plus loin dans les origines de la famille se heurte rapidement au problème de l’origine paternelle d’Alois, enfant adopté par un meunier, ce qui laisse planer un doute sur quelques ascendances juives non assumées.

N’écoutant pas les volontés de son père qui le voit fonctionnaire, Hitler se rend après la mort de ses parents à Vienne pour étudier les beaux-arts.

Dans la prospère capitale autrichienne, il découvre avec horreur le cosmopolitisme et mène une vie de dilettante, échouant au concours et connaissant des moment de grande pauvreté après dilapidé tout l’argent de son héritage.

L’arrivée de la Première guerre mondiale va changer la destinée de ce peintre raté qui survit plutôt qu’il ne vit à Vienne.

Hitler s’engage et devient estafette dans la tranchées, accomplissant la tache périlleuse d’acheminer les messages sur le front.

Le choc de la Première guerre mondiale l’atteint de plein fouet et après avoir été retiré du front suite à une perte momentanée de la vision, Hitler vit comme un drame personnelle la défaite allemande et surtout les conditions humiliantes imposées par le traité de Versailles.

A Munich sous la République de Weimar, ses talents innés d’orateur et la détermination de son engagement nationaliste, le fond devenir agitateur politique ou espion infiltré contre les organisations communistes alors dominantes.

La vie quotidienne est alors atrocement difficile en Allemagne, les Français et Belges n’hésitant pas à envoyer des troupes se servir directement en charbon dans la région e la Ruhr alors que celle-ci rechignait à s’acquitter de ses dettes.

Le chômage explose et la pauvreté gagne la population allemande.

En se calquant sur son modèle de l’époque Benito Mussolini, Hitler fonde son parti fasciste le NSDAP (ou Nazi), devient un leader politique de premier plan en utilisant habilement la frustration des populations pauvres et humiliées.

La mort prématurée du président Ebert va constituer une opportunité intéressante pour la droite allemande représentée par les anciens généraux de 1914-1918, qui ont conservé malgré la défaite une prestige important au sein de la population.

De plus en plus populaire dans les milieux d’extrême droite, Hitler se rapproche du général Ludendorff et fomente en 1923 un coup d’état qui échoue assez piteusement.

Condamné à cinq ans de prison, il bénéficie d’une certaine clémence et en profite pour écrire son « Mein Kampf » ouvrage délirant exprimant sa haine des Juifs, de ses ennemis communistes, français et la volonté d’élévation du peuple allemand, amené à régner sur le monde en vertus de la supériorité de sa race réputée pure, descendante des Ayriens.

Ouvrage imprégné de mysticisme, « Mein Kampf » servira avant et après son ascension de base idéologique fumeuse à l’application d’une politique guerrière et intolérante.

Libéré en 1924, Hitler peut alors reprendre ses activités avec encore plus de force en bénéficiant d’un contexte économique favorable à l’expression d’une mentalité extrémiste.

La seconde partie intitulée « Le Führer » narre l’irrésistible ascension d’Adolf Hitler jusqu’aux plus hautes instances politiques d’Allemagne.

A sa sortie de prison, Hitler retrouve ses plus proches collaborateurs : son bras droit Rudolf Hess, fervent idéologue antisémite, Hermann Goering, ex héros de l’aviation devenu obèse et cocaïnomane après une blessure, le chétif Joseph Goebbels génie de la propagande et surtout Röhm chef de la milice des SA ou chemises brunes, qui sèment la terreur auprès des populations juives et des factions adverses communistes.

Cette remarquable organisation et le soutien d’industriels de premier plan comme Thyssen ou l’américain antisémite Henry Ford, ne suffisent pas à lui faire emporter les élections et le vieux maréchal Hindenburg, représentant d’une droite conservatrice est logiquement élu en 1925 en profitant néanmoins de la popularité d’Hitler.

Mais Hindenburg qui pense pouvoir contrôler l’ambition de cet encombrant allié le laisse progressivement prendre de plus en plus d’influence.

En 1933, les nazis parviennent à paralyser le jeu démocratique en Allemagne et contraignent Hindenburg à nommer Hitler premier chancelier.

Arrivé au pouvoir légalement, Hitler commandite l’incendie du Reichstag, le parlement allemand pour justifier des mesures très dures visant à détruire toute forme d’opposition.

Les communistes, pacifiques sont déportés dans les premiers camps de concentration créer par Heinrich Himmler et les Juifs victimes de persécutions, contraint à l’exil, notamment en France ou aux États-Unis.

Seules les plus pauvres d’entre eux environ 250 000 restent en Allemagne et subissent des persécutions dans l’indifférence générale des élites allemandes plus promptes en cet été 1933 à profiter pour encore un temps de leurs privilèges.

En 1934, Hitler élimine l’encombrant Röhm qu’il considérait comme un rival potentiel et dissout les SA, au profit de l’armée régulière de la Wehrmacht et de SS, garde rapprochée et personnelle d'Hitler.

A la tête de l’armée, soutenu par les industriels, Hitler est alors le maitre de son pays et peut ainsi commencer à reconstruire les industries lourdes de la défense allemandes notamment l’aviation et la marine, qui lui font pour l’instant encore défaut pour donner corps à ses rêves de grandeur.

En conclusion, « Apocalypse, Hitler » est un documentaire passionnant, montrant l’ascension d’un dictateur hors normes, rendu fascinant par un invincible désir de revanche sociale et surtout une force de persuasion surnaturelle.

Observer un discours d’Hitler reste en effet une expérience fascinante : la gestuelle excessive empruntée aux acteurs d’opéra wagnériens, la puissance des incantations, la mise en scène du génial Goebbels qui mit en place avec l’aide du couturier Hugo Boss et de la réalisatrice Riefenstahl, une véritable esthétique nazi avec les uniformes, les emblèmes, les bannières et les torches.

Ce mécanisme montre finalement que le contenu stupide et délirant compte peu, seule au final prenant le dessus la puissance symbolique et le pourvoir hypnotique d’un guide quasi spirituel subjugueur de foules.

En faisant le parallèle avec le monde moderne, j’ai également trouvé certains points communs avec les organisations terroristes islamiques : besoin de références religieuses visant à prôner une légitimité d’ordre supérieure, gout pour les mises en scène théâtrales, puissants mécanismes d’embrigadement de populations soumises à un sentiment d’injustice, recours à la force et à la terreur pour donner corps à une inextinguible volonté de domination et d’expansion territoriale.

Le fascisme quelle que soit sa forme, reste le fascisme, c’est pourquoi l’étude du phénomène Hitler reste d’utilité publique.

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