1983 (Yannick Noah, Antoine Benneteau)

 



En 2023 pour fêter les 40 ans de la victoire de Yannick Noah à Roland Garros sort « 1983 ».

Derrière ce titre laconique, Antoine Benneteau essaie de retracer cet événement exceptionnel du sport français, resté à ce jour inégalé dans le domaine du tennis.

C'est donc une plongée dans les années 80 que nous propose le journaliste, les années « glam » pour décrire comment le gamin franco-camerounais de Yaoundé a réussi à se mettre dans les conditions optimales pour réussir son rêve.

D'abord il y a cette rage, cette volonté de réussir qui habite le jeune Noah depuis son arrivée en France.

Métis esseulé à Nice, il se distingue déjà selon son coach et homme de confiance Patrice Hagelhauer par une technique en place mais surtout par son désir « d'en faire plus », quitte à rallonger les séances d'entrainement et à s'infliger des footings supplémentaires par rapport à ses camarades.

Donc contrairement aux idées reçues, Noah était surtout un bosseur, qui a mis a profit avec Hagelhauer ses qualités pour les faire triompher face à ses rivaux.

Pourtant en parallèle, le personnage cultive les excès avec un sens prononcé de la fête et des soirées alcoolisées jusqu'à l'aube en boite de nuit.

Entouré de ses « potes » du monde de la nuit, Noah aime flamber, rouler en Ferrari ou en Mercedes blanche, claquer de l'argent et draguer dans les lieux parisiens à la mode de l'époque comme le Bus Palladium.

Ceci lui coute cher à Monte-Carlo en phase de préparation avec une défaite humiliante face au futur retraité espagnol Orantes.

Rappelé durement à l'ordre par Hagelhauer, Noah s'isole dans sa maison de Nain-les-roches dans l'Essonne et peaufine sa préparation tennistique et physique jusqu'à pousser ses limites à leur maximum compte tenu de l'époque.

Après les entrainements : footings, musculation, étirements...

Noah arrive comme une « bête » à Roland et « mange » tous ses adversaires, même Lendl seul à lui prendre une manche le payant durement d'un 6-0 au quatrième set.

En demi finale, Christophe Roger-Vasselin tombeur du redoutable Connors dont le jeu convenait moins à Noah, est dévoré tout cru pour ensuite faire face à Mats Wilander, le jeune prodige du tennis suédois et tenant du titre.

Le livre donne une large part au point de vue de Wilander, sa perception de la finale qu'il a vécu comme « spectateur » tétanisé par l'ambiance, le stade qui « poussait » à l'unisson et incapable de trouver le semblant d'un plan pour contrer son adversaire.

Encore plus étonnant, Mats s'avoue heureux d'avoir été là, avoir été comme beaucoup séduit par l'homme si charismatique au point de le regarder fêter sa victoire la nuit dans Paris.

Devenus amis, les deux hommes entretiendront une relation indélébile cimentée par leur passion commune de la musique.

Noah vainqueur, il change alors de catégorie et devient une curiosité médiatique.

Après la fête avec ses amis du groupe Téléphone, Noah connait un passage à vide : suspendu 2 mois pour avoir « déserté » une compétition sans enjeu à Düsseldorf il part sur un voilier avec ses copains faire un tour de Méditerranée.

Noah explique ensuite de manière très lucide être arrivé au bout de son rêve et que tout le reste ensuite lui est paru anecdotique, presque superflu, comme si la victoire à RG en 1983 se suffisait à elle-même...

En conclusion, « 1983 » est sans doute le meilleur livre que j'ai pu trouver actuellement au sujet de Yannick Noah.

Exclusivement centré sur cette fameuse quinzaine mythique, le livre aborde pourtant des thèmes plus large comme l'absence de reconnaissance de la société pour les sportifs français, la solitude des champions en compétition et la pression médiatique insupportable au point de choisir l'exil à New-York dans le cas de Noah.

On y découvre un champion atypique, bi national et bi culturel, à la fois profondément camerounais et français, ayant travaillé comme peu d'athlètes français pour atteindre ses objectifs mais également un homme fragile, prompts aux excès et au « blues » une fois son Everest atteint.

Outre les témoignages de proches de Yannick (coach, musicien), celui de Wilander son adversaire malheureux de l'époque se montre particulièrement intéressant dans le sens ou il explique avoir beaucoup appris de sa défaite et avoir été également terrassé émotionnellement par l'évènement.

L'amitié née de cet match est également le plus symbole des qualités humaines de ces deux champions.

« 1983 » a donc pour principale qualité de rendre hommage à une des plus belles épopée du sport français et de rappeler tout ce que la société française doit à Yannick Noah !

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