Je suis capable de tout (Frédéric Ciriez)
L'histoire se déroule en plein mois d'aout sur la
Cote d'Azur, sur l'Ile naturiste du Levant...
Julie, une cadre sup' fraichement
divorcée goute à des vacances annuelles bien méritées avec sa
fille Neko dans la cité balnéaire d'Héliopolis.
Tandis que Neko est plongée dans la
lecture d'un manga yaoi, une histoire d'amour perverse entre jeunes
garçons sur fond de science fiction délirante, Julie lit « Mental
coaching, ma méthode, mes succès » du coach mental Paul
Béranger.
La première partie du livre lui est
largement consacrée : le coach se répand abondement sur son parcours, son passé de champion et
multi-recordman mondial de sprint, son amour pour son lévrier Serge
catalyseur de sa vocation à courir puis sa brillante reconversion
dans le monde du conseil avec des résultats surprenants.
Devenu un ponte du « coaching, »
Béranger s'exprime comme un gourou avec force d'injonctions et
expose complaisamment sa réussite notamment financière avec des
clients VIP et un train de vie « bling-bling » à Los
Angeles.
Julie boit ses paroles et tente de se
relancer pour « refaire » sa vie, tandis que Neko pale et
acnéique, s'enferme dans son monde virtuel dans lequel un jeune
homme tente de reconquérir son amant perdu dans un monde ou un virus a transformé tous les garçons en « dominants sexuels » maléfiques.
La temps s'écoule donc lent et ramolli
sous la chaleur estivale du Sud de la France...
Les délires de Béranger se terminent
lorsqu'il raconte sa rencontre avec la Mort à Dubaï. Signe de sa
folie mégalomanie, il affirme non seulement y avoir survécu mais
avoir eu une relation sexuelle avec elle...
La méthode « MC » semble
pourtant réussir à Julie qui rencontre Giacomo via un site
spécialisé.
Giacomo est une sorte de fantasme
féminin-bobo à l'état pur : ténébreux et sensuel comme un
Italien, athlétique comme un Suédois, intelligent, drôle et surtout
proche de la nature en sa qualité d'ingénieur des eaux et des
forets.
Ingénieure elle-aussi dans l'éolien,
Julie attache beaucoup d'importance à cette dernière composante et
malgré la différence d'age entre eux, se laisse peu à peu séduire
par cet homme d'apparence parfaite.
Giacomo l’emmène dans une escapade
dans la nature : ils y découvrent la faune et la flore sauvage de
l'ile et finissent par faire l'amour de manière passionnée.
Surpris par un garde vicieux, Giacomo
prend le dessus physiquement et entraine Julie dans une cavale.
Après une course harassante, la visite
surprise d'un site d'essais de l'Armée dans lequel Julie tire un
missile sol-air, le couple débouche dans un cimetierre pour enfants
bagnards puis Giacomo se volatilise, laissant Julie couverte de sang,
sueur et sperme perdue et hagarde dans ce lieu de souffrance assailli
par les fantômes implorants des disparus.
Le calvaire de Julie se termine
lorsqu'un vieux gardien de phare la recueille et la ramène vers la
plage.
Elle y trouve Neko en train d'embrasser
trois garçons issus de « cités » de Marseille :
Jesus, Wang et Lucien.
Le roman se termine donc dans une
ambiance un peu folle : Julie revenue éprouvée de sa
love-expérience, Neko en passe de perdre sa virginité avec trois
garçons et... la fin d'un concours pathétique permettant d'élire
la Miss de la station...
En conclusion, « Je suis capable
de tout » est un roman drôle, incisif parfois déroutant collant à l’ère du temps.
Une adolescente mal dans sa peau, se
réfugiant dans un monde irréel et malsain de manga romantico-gay
japonais et sa mère, quadra écolo sup en mal de reconstruction
égotique après un divorce douloureux...
Autour d'elles, le cadre de vacances
naturistes dans le Sud...
Le style de Ciriez fait mouche,
notamment dans les parties délirantes consacrée au coach mental
usant d'injonctions sectaires et d’anecdotes ayant pour but de
renforcer son aura de messie supra-humain ayant survécu avec la
Mort qu'il a au passage séduite !
Dommage que la fin nous laisse un peu
sur notre faim : relation sexuelle inaboutie pour Neko,
disparition soudaine de Giacomo, incarnation d'un fantasme féminin...
Malgré ces petits défauts, « Je suis capable
de tout » reste une parfaite lecture de vacances !
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