Je suis capable de tout (Frédéric Ciriez)

Sorti en 2016, « Je suis capable de tout » est le troisième roman de Frédéric Ciriez.

L'histoire se déroule en plein mois d'aout sur la Cote d'Azur, sur l'Ile naturiste du Levant...

Julie, une cadre sup' fraichement divorcée goute à des vacances annuelles bien méritées avec sa fille Neko dans la cité balnéaire d'Héliopolis.

Tandis que Neko est plongée dans la lecture d'un manga yaoi, une histoire d'amour perverse entre jeunes garçons sur fond de science fiction délirante, Julie lit « Mental coaching, ma méthode, mes succès » du coach mental Paul Béranger.

La première partie du livre lui est largement consacrée : le coach se répand abondement sur son parcours, son passé de champion et multi-recordman mondial de sprint, son amour pour son lévrier Serge catalyseur de sa vocation à courir puis sa brillante reconversion dans le monde du conseil avec des résultats surprenants.

Devenu un ponte du « coaching, » Béranger s'exprime comme un gourou avec force d'injonctions et expose complaisamment sa réussite notamment financière avec des clients VIP et un train de vie « bling-bling » à Los Angeles.

Julie boit ses paroles et tente de se relancer pour « refaire » sa vie, tandis que Neko pale et acnéique, s'enferme dans son monde virtuel dans lequel un jeune homme tente de reconquérir son amant perdu dans un monde ou un virus a transformé tous les garçons en « dominants sexuels » maléfiques.

La temps s'écoule donc lent et ramolli sous la chaleur estivale du Sud de la France...

Les délires de Béranger se terminent lorsqu'il raconte sa rencontre avec la Mort à Dubaï. Signe de sa folie mégalomanie, il affirme non seulement y avoir survécu mais avoir eu une relation sexuelle avec elle...

La méthode « MC » semble pourtant réussir à Julie qui rencontre Giacomo via un site spécialisé.

Giacomo est une sorte de fantasme féminin-bobo à l'état pur : ténébreux et sensuel comme un Italien, athlétique comme un Suédois, intelligent, drôle et surtout proche de la nature en sa qualité d'ingénieur des eaux et des forets.

Ingénieure elle-aussi dans l'éolien, Julie attache beaucoup d'importance à cette dernière composante et malgré la différence d'age entre eux, se laisse peu à peu séduire par cet homme d'apparence parfaite.

Giacomo l’emmène dans une escapade dans la nature : ils y découvrent la faune et la flore sauvage de l'ile et finissent par faire l'amour de manière passionnée.

Surpris par un garde vicieux, Giacomo prend le dessus physiquement et entraine Julie dans une cavale.

Après une course harassante, la visite surprise d'un site d'essais de l'Armée dans lequel Julie tire un missile sol-air, le couple débouche dans un cimetierre pour enfants bagnards puis Giacomo se volatilise, laissant Julie couverte de sang, sueur et sperme perdue et hagarde dans ce lieu de souffrance assailli par les fantômes implorants des disparus.

Le calvaire de Julie se termine lorsqu'un vieux gardien de phare la recueille et la ramène vers la plage.

Elle y trouve Neko en train d'embrasser trois garçons issus de « cités » de Marseille : Jesus, Wang et Lucien.

Le roman se termine donc dans une ambiance un peu folle : Julie revenue éprouvée de sa love-expérience, Neko en passe de perdre sa virginité avec trois garçons et... la fin d'un concours pathétique permettant d'élire la Miss de la station...

En conclusion, « Je suis capable de tout » est un roman drôle, incisif parfois déroutant collant à l’ère du temps.

Une adolescente mal dans sa peau, se réfugiant dans un monde irréel et malsain de manga romantico-gay japonais et sa mère, quadra écolo sup en mal de reconstruction égotique après un divorce douloureux...

Autour d'elles, le cadre de vacances naturistes dans le Sud...

Le style de Ciriez fait mouche, notamment dans les parties délirantes consacrée au coach mental usant d'injonctions sectaires et d’anecdotes ayant pour but de renforcer son aura de messie supra-humain ayant survécu avec la Mort qu'il a au passage séduite !

Dommage que la fin nous laisse un peu sur notre faim : relation sexuelle inaboutie pour Neko, disparition soudaine de Giacomo, incarnation d'un fantasme féminin...

Malgré ces petits défauts, « Je suis capable de tout » reste une parfaite lecture de vacances !

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