La chasse (William Friedkin)

 


Exploration à présent d’un film aussi fascinant que choquant, « La chasse » adaptation d’un roman de Gérald Walker par William Friedkin.

Sorti en 1980, « La chasse » narre l’enquête de Steve Burns (Al Pacino) policier de New-York, dans le milieu homosexuel pour découvrir un tueur séduisant ses victimes masculines dans les clubs sado-maso gays de Greenwich village avant de les assassiner au couteau.

Hétérosexuel, Burns n’informe pas sa petite amie Nancy (Karen Allen) de sa mission et s’installe en plein milieu du quartier gay dans l’appartement d’une des victimes, Lukas (Arnoldo Santana) un jeune acteur brun et athlétique, ligoté et cruellement poignardé.

Il adopte instantanément les codes en vigueur, vêtements masculins mais près du corps découvrant certaines parties comme les bras ou les épaules et fait la connaissance de Ted Bailey (Don Scardino) un des voisins de Lukas, qui lui fait des avances.

Vaguement artiste, le jeune homme se fait entretenir par son ami danseur et fournit des informations intéressante à Burns, quand à l’ambiance de peur dans la communauté avec la présence d’un tueur en série frappant en apparence au hasard de ses pulsions.

Burns se lance ensuite, fréquentant les clubs SM de nuit ou se retrouvent les homosexuels dans une ambiance de sexualité virile et poisseuse.

La musique jouée est du rock puissant et les hommes habillés de cuir cultivent une apparence de durs.

Burns observe les rituels et les actes sexuels réalisés à même la boite ou en plein air dans certains recoins peu éclairés de Central Park.

Le tueur frappe encore et augmente la pression médiatique sur le supérieur de Burns, le capitaine Edelson (Paul Sorvino) qui utilise un travesti comme indicateur.

Dans ce monde glauque peuplé d’animaux de nuit, chacun est suspect et Burns oriente ses soupçons sur Skip Lee (Jay Socovone), un jeune marginal de la nuit réputé pour sa violence lorsqu’on le contrarie et travaillant dans un restaurant ou l’on utilise le même type de couteau qui a servi à tuer Lukas.

Burns fait min de céder à ses avances et se retrouve ligoté nu sur un lit ce qui provoque une descente massive de police dans sa chambre pour le secourir.

Les deux hommes sont arrêtés, questionnés et durement tabassés au commissariat notamment par un immense policier noir quasiment nu dans une scène pour le moins déroutante, mais malheureusement Skip est déclaré innocent.

L’enquête bascule lorsque une relation est établie avec un autre jeune acteur, Stuart Richards (Richard Cox) vivant mal son homosexualité en raison du rejet de son père.

Burns piste Stuart, pénétrant par effraction chez lui et le provoque ouvertement.

Les pulsions sexuelles et meurtrières de Stuart sont les plus fortes et le jeune homme accepte la chasse, non sans une grand méfiance face à cette proie trop évidente.

De son coté, le psychisme de Burns se trouve très éprouvé par cette plongée dans le monde sous terrain de la ville, délaisse peu à peu sa petite amie, prend de la drogue, se soumet à quelques attouchements sur une piste de danse et pour finir se dispute violemment avec Gregory (James Remar) le petit ami de Ted très jaloux des incartades de son compagnon.

Il semble temps que l’enquête s’achève et Burns précipite le dénouement en rejoignant Stuart dans un Central Park désert en pleine nuit.

Après une scène d’une tension inouïe, Burns poignarde Stuart avant qu’il ne le fasse.

Promu inspecteur, il rejoint sa compagne qui découvre qu’il a adopté le curieux accoutrement du tueur.

En parallèle, Ted est sauvagement assassiné au couteau dans son appartement, dans ce que la police assimile à une querelle d’amoureux ayant mal tourné, mais ce qui laisse planer le doute sur le fait que Burns, a basculé de l’autre coté, celui du mal …

En conclusion, j’ai vu trois fois « La chasse » avec un mélange à chaque fois inégalé de fascination et de dégout.

Fidèle à sa réputation sulfureuse, Friedkin dérange et choque, montrant des scènes quasiment insupportables de violence ou de sexualité (une scène de fist fucking dans une boite !) ce qui pousse le film à flirter avec un classement X.

« La chasse » contient donc pour cela un puissant aspect répulsif envers les personnes les plus traditionnelles ou religieuses mais de manière plus surprenante envers une large part de la communauté homosexuelle, choquée qu’on ne montre à l’écran qu’une parcelle la constituant : celle des homo aux rites sado masochistes.

Si on dépasse ces barrières culturelles, « La chasse » est une plongée fascinante dans un monde marginal, étrange, codifié, à l’imagerie et à la sexualité violentes.

Plus que la poursuite en question d’un tueur en série, la lente dérive et perversion d’un policier hétérosexuel dont l’âme se corrompt peu à peu à ce dangereux contact est un phénomène troublant et fascinant à observer.

Dans ce rôle difficile mettant à mal son image de virilité, Al Pacino livre sans nulle doute une de ses meilleurs prestations, qui à mon sens aurait du être oscarisée.

Impressionnant, dérangeant et troublant, comme toutes les grandes œuvres, « La chasse » est de surcroit porté par une bande son d’enfer, délivrant un hard rock aussi musclé que déjanté.

Vous avez dit chef d’œuvre ?

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