Innovation and Entrepreneurship : practices and principles (Peter Ferdinand Drucker)

 



En 1985, Peter F Drucker continue son impressionnante série de publications avec « Innovation and Entrepreneurship : practices and principles ».

Dans ce ouvrage vieux de près de 40 ans aujourd'hui le spécialiste du management d'entreprises s'attache à décrire les mécanismes générateurs d'innovations et surtout ceux de leur transformation en réussite économique.

Puisant dans sa grande expérience de consultant au sein de grands groupes privés ou publics, Drucker développe l'axe central de son discours en expliquant que l'innovation sans culture de l’entreprenariat dans un pays est vouée à l'échec.

L'Histoire fourmille ainsi de personnalités créatives auteurs d' « idées géniales » ayant abouti à de retentissants échecs faute de culture adéquate dans le pays les hébergeant.

Battant en brèche, les idées reçues, Drucker explique que les plus grandes réussites ont souvent été des innovation « low tech » ou « medium tech » sans rupture technologique majeure mais en optimisant des processus sur un marché rencontrant les besoins du marché.

Cette notion de valeur client est ici centrale et l'attention portée aux changements de dynamiques sociétales (plus de femmes au travail après-guerre, moins de naissance dans les années 70, développement du secteur public) et politiques (annonces gouvernementales pour favoriser tel ou tel secteur) devient donc un critère essentiel.

Mais souvent toutes les informations sont déjà disponibles au sein des entreprises comme une succès inattendu, une incongruité du marché ou un besoin métier non satisfait.

Seulement la plupart des dirigeants, plutot conservateurs, négligent ses signaux et ne se concentrent que sur les problèmes à résoudre en laissant passer les opportunités.

Centrés sur un seul produit ou technologie « phare », ils demeurent incapable d'aller de réactivité et sont souvent responsable de perte de leadership, d'autres sociétés plus jeunes ou habiles s'engouffrant à leur place dans les brèches.

Si Drucker tourne souvent autour des mêmes exemples : Siemens en Allemagne, General Electric, Bell, IBM, Mc Donald aux États-Unis, il décrit aussi les grandes ruptures technologiques de l'Histoire de l'industrie : développement du téléphone, de l'automobile, du train, de l'aéronautique et bien sur de la micro-informatique.

Il en ressort qu'entre le développement d'une idée brillante et sa réalisation à l'échelle industrielle s'écoule de nombreuses années et qu'après une période d'explosion ou tout le monde tente de faire sa place sur le marché, le nombre de concurrent se réduit ensuit drastiquement jusqu'à laisser la place à une poignée d'entre eux, ceux ayant réussi à définir le meilleur stratégie.

Drucker estime donc que l'innovation doit bénéficier d'un budget à part dans les grandes entreprises en étant détaché des directeurs des opérations, bien trop absorbés par leur quotidien. La mise en concurrence interne peut s'avérer également bénéfique pour stimuler les équipe et même si une certaines liberté doit être laissée pour explorer diverses pistes, les projets doivent être pilotés avec rigueur dans une logique de production de résultats et de maitrise des budgets.

Et si les « créatifs » ne disposent pas des qualités requises sur ces aspects, ils doivent s'entourer de spécialistes.

Contre toute attente, Drucker estime l'innovation non seulement possible mais nécessaire dans le secteur public, même si plus difficile car ces structures étant davantage orientées vers un « service au plus grand nombre » que sur la rentabilité.

Les exemples cités dans le domaine de la gestion des collectivités, de la santé et même du monde associatif viennent renforcer ce point de vue.

En conclusion, bien qu'aujourd'hui daté, « Innovation and Entrepreneurship : practices and principles » est un ouvrage édifiant nourri de la grande expérience de Drucker dans les hautes sphères de la gestion de structures privées et publiques.

Ici pas de place pour le mythe et le fantasme, Drucker adopte des principes de réalité/rationalité pour expliquer les conditions propices au développement d'innovations.

Bien sur la gouvernance des états jouent un rôle essentiel dans le développement de l'innovation mais sans culture de l'entreprenariat avec tout ce que cela comporte de prises de risques, cette démarche est vouée à l'échec ce qui explique que les grands groupes privés ou publics, par essence plutot conservateurs ne sont pas généralement pourvoyeurs d'innovations.

Le manque de lucidité, la peur et l'arrogance de certains dirigeants face aux grandes évolutions sociétales et économiques mettant souvent les entreprises en situation d'échec.

Autre message important, les innovations les plus réussies ne sont généralement pas « high tech » mais exploite un besoin client non assouvi, une étape non optimisée d'un processus ou simplement un usage inattendu d'un produit.

Les innovations « high tech » sont en revanche les plus risquées pour plusieurs raisons : le délai entre la naissance d'une « idée brillante » et la maturité du marché pour l’industrialiser, mais également la méconnaissance des « créatifs » des autres facteurs de réussite (administratifs, financier, humains)...

Il ne manque donc qu'une actualisation sur le monde des GAFAM pour rendre plus moderne et attractif cet ouvrage majeur l'innovation !

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