Bonjour paresse (Corinne Maier)


Avec son titre détournant astucieusement Françoise Sagan, « Bonjour paresse » est un court essai de Corinne Maier qui eut un succès inattendu à sa sortie en 2004.

L’auteur, alors employée à mi temps chez EDF, y prend pour cible le fonctionnement des grandes entreprise françaises afin de promouvoir une forme de résistance passive chez le cadre moyen à qui ce livre est destiné.

Usant d’un ton insolent, parfois humoristique et largement cynique, Maier dénonce la vacuité des grandes entreprises modernes ou règne la pensée unique uniformisant les employés par l'application de méthodes de management inefficaces s’appuyant sur un langage barbare issu de l’anglais et de l’informatique qu’elle assimile à la novlangue du roman 1984 de George Orwell.

Dans ces gigantesques structures à l’organisation incompréhensible, le salarié devenu un pion interchangeable effectuant une tache sans ame, perd le sens de ce qu’il fait et fonctionne comme un robot.

Maier s’inspire légèrement de la psychanalyse (Lacan) , de l’histoire contemporaine (Marx, Mao, De Gaulle) mais aussi de certains de ses prédécesseurs (Beigbeder et surtout Houellebecq) pour dénoncer l’absurdité de s’investir dans une entreprise qui ne contribuera de toute façon jamais à son bien être personnel.

Afin de ne pas devenir fou, Maier préconise au cadre moyen qui n’a pu se placer dans une administration de ne rien faire sans que cela se voit en occupant des postes transverses loin du théâtre de opérations tout en recherchant ses semblables.

C’est la pour moi que réside la principale faiblesse de cet essai.

Autant la description de l’évolution du monde professionnel ne manque pas de saveur, autant le constat qui en ressort s’avère particulièrement faible : la fermer, se cacher, ne rien faire et attendre que ça passe en espérant que le système s’effondre de lui même.

En conclusion, « Bonjour paresse » fera passer un moment sympathique à l’employé de bureau lambda, assez mal dans sa peau dans un monde professionnel aux codes ridicules mais apportera pour moi en terme de soulagement l’équivalent de pansements sur une jambe de bois.

Par son cynisme, son coté déprimant et sociologique, « Bonjour paresse » s’inscrit dans la même filière que les romans de Houellebecq dont l’auteur se réclame fréquemment.

Il manque bien entendu le style froid et précis comme une lame, le coté sulfureux et sexuel morbide du Maître.

Pour ma part ayant travaillé dans le monde privé et dans le monde public, je me suis toujours attaché à ne pas perdre le sens de ce que je faisais et n’ai donc jamais vraiment ressenti les sentiment évoqués par Maier.

Il me semble toutefois important d’avoir plusieurs centres d’intérêts extra professionnels dans l’existence comme autant de points d’ancrage pour conserver l’équilibre psychique nécessaire à la vie de tout être humain.

PS : En novlangue moderne, je traduirai le terme "benchmarking" par étude de marché ...

 

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