Tchao pantin (Claude Berri)

 



J’ai vu pour la première fois « Tchao pantin » de Claude Berri en 1984 sur un ferry boat se dirigeant vers la Corse.

Même si alors enfant j’avais tout de même apprécié grandement le film je n’ai dés lors cessé de le revoir toujours avec grand plaisir en en goutant chaque fois les milles saveurs.

Tiré d’un roman d’Alain Page, « Tchao pantin » est un polar sombre quasi inclassable en raison des performances inégalées de ses acteurs, Coluche et Richard Anconina en tête.

L’histoire se déroule à Paris dans les années 80.

Une nuit, un jeune motard nommé Youssef Bensoussan (Anconina) se rend dans une station service alors qu’il est poursuivi par la police.

Le pompiste de service, un certain Lambert (Coluche), l’accueille bizarrement mais lui sauve néanmoins la mise.

Habitant à proximité, Bensoussan revient plusieurs nuits voir Lambert et un début d’amitié germe entre ces deux hommes pourtant en apparence si dissemblables.

Buvant excessivement, Lambert paraît seul, déprimé et fatigué de vivre.

Bensoussan est un jeune arabe qui n’a pas connu ses parents et paraît lui aussi perdu pour d’autres raisons.

Sans attache, le jeune homme vit dans un squat, vole des motos la nuit et deale pour le compte de son chef Rachid  (Mahmoud Zemmouri) qu’il présente à Lambert comme son oncle.

Lambert se doute des activités de son ami mais fait mine de croire aux mensonges qu’il lui déballe.

Au cours d’une virée en Harley-Davidson, Bensoussan attire l’attention de Lola (Agnés Soral) une jeune punk passionnée de moto.

Le jeune homme la drague et ils ont une furtive aventure d’un soir.

Mais les choses se gâtent pour Bensoussan qui se fait dérober la marchandise de Rachid.

Paniqué, il se tourne vers son seul ami Lambert et est bien obligé de lui dire la vérité.

Lambert avance une somme dérisoire à son ami pour le dépanner mais ceci demeure insuffisant pour Rachid qui envoie ses homme de main pour tuer Bensoussan.

Pourchassé en moto, le jeune dealer vient alors mourir dans la station service de Lambert qui tue un des deux motards en l’aspergeant d’essence.

Traumatisé par la mort de Youssef, Lambert se lance alors dans une quête obsessionnelle de la recherche de ses meurtriers.

Il se rapproche de Lola pour avoir l’adresse du tueur Mamoud et la jeune fille elle aussi à la dérive se met alors à le suivre après qu’il ait éliminé le tueur.

Suite à l’enquête sur la mort de Bensoussan, Lambert fait la connaissance de l'inspecteur de police Bauer (Philippe Léotard) qui se doute de ses agissements mais le couvre quand il apprend qu’il a été lui même un ancien inspecteur.

C’est alors qu’on découvre la vérité sur le passé de Lambert, un fils délaissé et drogué, mort d’une overdose, un divorce, puis la solitude, la dépression et l’alcool.

Le pompiste continue alors sa spirale de vengeance en tuant Rachid dans son bar et en cherchant le caïd d’un niveau supérieur un certain Sylvio (Albert Dray) logeant prêt des Champs-Élysées.

Mais Lambert renonce au dernier moment...

Le film s’achève de manière certes logique mais magistrale et inattendue par l’assassinant du justicier solitaire qui tombe dans les bras de la petite punk.

En conclusion, on peut considérer « Tchao pantin » comme l’une des plus belles perles noires du cinéma français.

Le film tourné à 95% la nuit baigne dans une atmosphère étrange, glauque et intime, que vient hanter la musique lancinante de la bande son composée et chantée par Charlélie Couture.

Claude Berri décrit le Paris nocturne des années 80, de la marginalité, des bas quartiers, des squats de Belleville, des dealers, des toxicomanes et des punks de République.

La relation d’affection entre ces trois paumés à la dérive (Lambert, Youssef et Lola) exclus de la société est particulièrement touchante.

Dans un univers dangereux, sale et oppressant, ce trio en quête d’amour trouve dans l’autre la petite lueur d’espoir pour ne pas totalement vaciller et sombrer corps et âme dans les pièges de la nuit et de la mort.

Le deuxième DVD en bonus montre le contexte politique et social du film, des interviews des acteurs principaux, Coluche assez peu disert et finalement plutôt intimidé lors de sa remise de prix aux Césars 1984, Anconina narrant sa relation d’amitié avec Coluche et les conditions de tournages difficiles du film dans les quartiers chauds de Paris, Soral parlant de son infiltration du milieu punk pour être crédible en zonarde paumée puis de sa difficulté à retrouver des rôles après un personnage aussi fort que celui de Lola.

On découvre aussi les difficultés personnelles de Coluche à l’époque, son divorce, la mort de son ami Patrick Dewaere par suicide, son addiction à la drogue qui ont certainement contribué à rendre le personnage de Lambert plus vrai que nature.

Sombre, magnifique, intime et touchant comme seules peuvent l’être les choses fragile, tel est ce magnifique film à l’humanité affleurante.

Sans nul doute, le plus grand film tourné par Coluche avec un personnage qui n'aura pas fini de hanter vos jours très sombres.

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