Les noces barbares (Yanne Queffélec)
Le livre le plus célèbre de Yann Queffélec, « Les noces barbares » pour qui il obtint le prix Goncourt en 1985, trainait dans la bibliothèque de mes grand-parents bretons sans que je n'ose jamais l'ouvrir.
Aussi aura-t-il fallu que j'attende 2021 pour découvrir cette histoire qui vous prend aux tripes dès les premières pages, en commençant par le viol de Nicole Blanchard par un Will, un soldat américain sur le départ après que sa base de la cote bretonne soit démantelée à la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
Un soir de beuverie, Will qui se faisait pour un « bon parti » de Chicago prêt à épouser la jeune fille de quinze ans, révèle sa vraie nature de criminel sexuel, sadique et offre la malheureuse à deux de ses amis soldats qui la violent également.
De ce traumatisme naitra malheureusement un enfant non désiré, Ludovic qui sera immédiatement haï par toute la famille Blanchard, boulangers du village de Peilhac.
Dédaigné et maltraité sans qu'il sache pourquoi, Ludo connait une adolescence solitaire et un terrible manque d'amour.
Son entrée à l'école n'arrange rien, il est catalogué comme cancre et se fait régulièrement insulter et battre par les autres élèves.
Lorsque Nicole trouve un mari plus âgé, Michel Bossard dit « Micho », Ludo part vivre avec sa mère chez ce mécanicien bricoleur de génie.
Son fils Tatav, le maltraite également mais contribue à son éducation, par notamment une exploration sans fin de la cote bretonne.
Au sein du couple Bossard, Micho fait ce que dit Nicole et elle finit par obtenir le placement de Ludo dans un centre de psychiatrie léger en le faisant passer pour malade mental.
Dans ce centre tenu par Mademoiselle Rakoff la cousine de Micho, Ludo s'intègre à la vie en communauté mais attend toujours fébrilement que sa mère vienne le chercher.
Cette période est vécue dans la douleur car les seules (et rares) visites de Micho lui font comprendre qu'il est clairement délaissé.
Une nuit de désespoir à Noël, Ludo qui vit sous le menace d’être placé dans un véritable hôpital psychiatrique, met le feu au centre et s'enfuit.
Il mène ensuite une vue d'errance, toujours dans la peur d’être repris par la police.
Enfin, Ludo trouve refuge dans un cargo échoué sur une plage et y établi demeure sous la protection de Couélan un marginal qui se dit propriétaire de l'épave.
Après avoir repoussé des voyous à motos, lié amitié avec une petite fille et un couple d'aubergiste qui le prennent au début pour un saisonnier, Ludo est finalement repéré par la police suite à une dénonciation de sa mère à qui il a écrit après avoir une nouvelle fois vainement tenté de la revoir.
Ayant refait sa vie avec un homme plus jeune, Nicole tente une nouvelle fois de le duper en servant d’appât dans le cargo qui va bientôt être désossé mais Ludo ne supporte les nouveaux mensonges et rebuffade de sa mère et finit par la tuer avant de porter son corps au loin dans les flots.
En conclusion, « Les noces barbares » mérite amplement sa réputation et est un authentique chef-d’œuvre de la littérature française. Le destin de ce garçon martyr ne peut qu'émouvoir au plus haut point et il souffle sur le roman de Queffélec l'esprit des plus grands auteurs comme Zola.
Porté par un style extraordinaire, passant tour à tour du parlé des « petites gens » des villages bretons des années 50-60 à un langage plus soutenu et poétique, « Les noces barbares » contient des moments de pure grâce, notamment lorsque Ludo trouve refuge dans une épave auprès d'un vieux marginal rejeté, comme lui, par la société.
Impossible donc de résister à ce drame déchirant et impossible de ne pas être subjugué par le talent pur de Queffélec ! Bravo Maitre !
Commentaires
Enregistrer un commentaire