Ivan Lendl, the man who made Murray (Mark Hodgkinson)

 



Difficile de trouver des biographies sur les joueurs de tennis des années 80, tant les stars de l'époque semblent contrairement à celles plus contemporaines, peut enclines à s'épancher sur leur passé pourtant glorieux.

Aussi le travail du journaliste Mark Hodgkinson en 2014 intitulé « Ivan Lendl, the man who made Murray » fait-il figure de pépite tant Lendl et ses huit titres du grand chelems paraît aujourd'hui quelque peu oublié face aux vingt et quelques titres des Nadal/Djokovic/Federrer.

Le début de cette biographie nous plonge dans une ambiance Guerre froide, alors que Lendl, né à Ostrava dans la Tchécoslovaquie des années 60 sous le joug soviétique a été soumis à une surveillance particulièrement serrée des services d'espionnage.

Fils de joueur de tennis de bon niveau international, Lendl voit son caractère fortement influencé par celui de sa mère, Olga, obsédée par la discipline et l'autorité.

Fils unique, Lendl voit placé en lui tous les espoirs de sa mère, comme a pu le faire Jody la mère d'Andy Murray.

Ses bons résultats sportifs et son obstination à l'entrainement lui permettent bientôt de voyager mais tout en restant sous surveillance en raison de ses nombreux contacts vis-à-vis de l'Ouest.

L'exemple de Martina Navratilova, elle-aussi tchèque de naissance, ayant demandé refuge aux États-Unis pour devenir ensuite numéro un mondiale, a il est échaudé les esprits du bloc soviétique.

Pourtant Lendl est lui-aussi attiré par les États-Unis dont il ne tarde pas à adopter les valeurs : individualisme, liberté et goût pour la réussite, notamment financière, à l’antipode des valeurs promus par le communisme.

S'établissant aux Etats-Unis, Lendl a d'abord comme entraineur et mentor le Polonais Wojteck Fibak ex-numéro 10 mondial, qui l'aide à développer son jeu, notamment à acquérir un revers lifté décent à la place d'un « chip » inoffensif.

Mais malgré des résultats impressionnants dans la saison régulière, Lendl acquiert la réputation d'un « faible » flanchant dans les grands moments comme le confirment ses lourdes défaites face à Mc Enore, Connors ou Wilander.

En 1984 pourtant son destin s'inverse avec sa victoire lors de la fameuse finale de Roland-Garros remporté face à Mc Enroe qui avait pourtant mené deux sets à zéro.

Lendl change pourtant radicalement de mode de vie après avoir constaté qu'il stagnait en 1985, devenant le premier tennisman à faire attention à la diététique et à l'entrainement physique hors du court.

Il délaisse Fibak pour l'Australien Tony Roche, qu'il respecte davantage en raison de son aura de champion du grand chelem et devient un forcené du vélo, de l'aérobic, de la musculation, des régimes.

Affiné et affuté, Lendl joue de sa nouvel aura d'homme invincible, changeant également son attitude mentale en projetant une image d'arrogance et de force.

Les résultats suivent, d'autres joueurs plus doués, étant à présent surclassé par le tennis puissant et ultra physique du Tchèque.

Seule ombre au tableau, Wimbledon qu'il ne remportera jamais malgré son acharnement, allant même jusqu'à modifier son jeu en jouant contre-nature « service-volée ».

Mal aimé, détesté par le public en raison de sa froideur et de son tennis « robotique », Lendl se montre parfois humain lorsqu'il flanche face à Chang lors du fameux huitième de finale perdu à Roland-Garros en 1989 après que l'Américain l'ait déstabilisé psychologiquement.

Ensuite l'usure et des douleurs persistantes aux dos aboutiront à un déclin inéluctable dans les années 90. Handicapé par ses problèmes physiques, Lendl tentera une reconversion, sans grand succès dans le golf, afin de continuer à pratiquer un sport de compétition puis se retirera de la vie publique.

En 2012 pourtant Lendl revient sur le devant de la scène, pour devenir le coach de Murray, l'Anglais vivant une situation similaire à la sienne avec l'incapacité de remporter un tournoi du Grand chelem.

L'association va se montrer profitable, Lendl donnant le supplément d'expérience et d'assurance à Murray pour franchir ce gap et remporter les jeux olympiques, Wimbledon puis l'US Open.

Puis Lendl l'homme d'affaires, rejouant dans les tournois « séniors » se détachera du métier de coach, trop prenant en terme de voyages.

En conclusion, « Ivan Lendl, the man who made Murray » est un livre particulièrement intéressant permettant de mettre en avant la vie particulièrement passionnante d'un champion qu'on qualifiait de froid et inexpressif.

Guerre froide, affrontements Est/Ouest dignes de « Rocky IV » puis « American dream » avec une vie de succès sportifs et financiers aux USA, cette biographie révèle aussi la naissance du tennis moderne se concentrant sur une obsession quasi scientifique de la performance.

Moqué à ses débuts pour son acharnement à tout contrôler, Lendl est le symbole de la persévérance avec au final un palmarès supérieur à celui de joueurs plus talentueux.

Le parallèle avec Murray est intéressant, l'Anglais trouvant en l'ex « looser » devenu numéro 1, une source d'inspiration pour franchir le dernier pallier faisant de lui un détenteur de titres majeurs.

Bravo donc à Hodgkinson qui aura su presque « humaniser » la machine à gagner venue de l'Est.

A lire absolument (en anglais!) pour tous les fans de sport de haut niveau !

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