Micromégas, Zadig ou la destinée (Voltaire)
Voici un retour assez inattendu vers la philosophie avec un ouvrage regroupant deux contes philosophiques de Voltaire « Micromégas » puis « Zadig ou la destinée ».
« Micromégas » tout d’abord a été écrit en 1752 est un court récit d’à peine une vingtaine de page racontant les voyages de d’un extra terrestre aux dimensions planétaires, Micromégas habitant de Sirius condamné à l’errance après avoir offensé les autorités religieuses de son pays en publiant un traité scientifico-philosophique.
Micromégas rencontre tout d’abord un Saturnien, sorte de réplique de lui-même à dimensions, âge et intelligence moindre, mais néanmoins dépassant déjà fort l’entendement humain.
Malgré sa supériorité évidente, Micromégas se lie d’amitié avec le Saturnien et décide de parcourir l’espace avec lui.
Ensemble les deux extra terrestres avides de découverte arrivent sur la planète Terre, qu’il considère compte tenu de leur gigantisme tout d’abord comme inhabitée.
Mais en cherchant bien et avec l’aide d’une perle utilisée comme microscope, les deux philosophes de l’espace détectent un navire et finalement ses habitants composés de matelots et de savants revenus d’une expédition polaire.
Un dialogue s’instaure donc entre les hommes considérés comme des insectes et les voyageurs.
En comprenant que l’hommes capable de réflexion, les deux géants sont abasourdis mais découvrent également toute la bassesse de l’espèce humaine qui passe l’essentiel de son temps à se livrer de sanglantes batailles pour des motifs territoriaux futiles.
Les savants tentent d’expliquer leurs systèmes philosophiques mais les propos d’Aristote, Descartes, Malebranche et Leibniz sont tournés en ridicules à l’exception de ceux de Locke, le philosophe empiriste reconnaissant les limites de l’être humain face à l’immensité d’un dieu inconnu qui le dépasse de beaucoup.
Quand la conversation dévie sur la religion chrétienne comme source de savoir, les deux extra terrestres préfèrent devant tant d’absurdité quitter ce monde non sans laisser en présent un livre philosophique à leur usage, en réalité vide !
Avec « Zadig ou la destinée » publié en 1747, Voltaire écrit toujours un conte philosophique mais change de cadre en se plaçant sous l’angle d’un conte oriental fantaisiste inspiré des « Milles et une nuits ».
Jeune homme de bonne famille résidant à Babylone, Zadig est un homme bon, juste et habile raisonneur qui s’inspire de préceptes de Zoroastre.
Malheureusement pour lui, son entourage n’est pas habité d’aussi nobles sentiments.
Ainsi Zadig se voit lâchement abandonné par sa fiancée Sémire après qu’un rival jaloux eut tenté de l’éborgner.
Il n’a pas plus de succès avec Azora la jeune femme qu’il épouse par la suite et qui le trahit également facilement en voulant épouser bien vite son meilleur ami Cador une fois que Zadig eut fait courir le bruit de sa mort.
La vie se fait toujours plus cruelle pour lui, lorsqu’il est condamné de manière injuste et répétitive pour avoir montré son intelligence, sa raison et son sens de l’hospitalité, ce qui lui vaut les pires jalousies, calomnies et condamnations.
Pourtant Zadig parvient à se faire remarquer par le roi Moabdar qui le prend tout d’abord comme conseiller et le fait nommer premier ministre.
Malgré un sens aigu de la justice et de l’équité, Zadig est poursuivi par la malédiction lorsque Astarté l’épouse du roi tombe amoureuse de lui, ce qui équivaut lorsque le roi le découvre à une condamnation à mort.
Pour éviter de périr, Zadig aidé par Cador est obligé de fuir vers l’Egypte.
En chemin il est à nouveau puni de son courage qui l’a conduit à tuer l’agresseur d’une femme battue, et vendu comme esclave à un marchand appelé Sétoc, qui séduit par ses talents, finira par devenir son ami.
Zadig réalise alors des formidables actes, comme convaincre une belle veuve appelé Almona d’abandonner la coutume de se jeter au bucher pour suivre son marie, ou concilier tous les adeptes de toutes les religions sur l’existence d’un être supérieur.
Bien entendu le cycle infernal des malédiction ne tarde pas à s’abattre à nouveau sur lui et le contraint à fuir vers la Syrie ou il est capturé par le puissant brigand arabe Arbogad qui lui apprend la mort de Moabdar.
Le brigand le relâche finalement et Zadig tombe par hasard sur Astarté, qui après la mort de son mari a été vendue comme esclave à un seigneur appelé Ogul.
Zadig intervient habilement pour soigner Ogul qui souffre d’obésité en lui faisant faire de l’exercice et un régime, ce qui lui permet d’obtenir la libération d’Astarté.
Revenu dans une Babylone dévastée, il doit pour obtenir le titre de roi, montrer sa valeur en passant par une série de duels à cheval, à l’épée et répondre à une énigme philosophique.
Mais les manigances d’un rival particulièrement fourbe Itobad, le conduisent à être évincé du trône alors qu’il avait réussi toutes les épreuves.
Cette désillusion lui permet néanmoins de rencontre un ermite philosophe qui lui enseigne de manière empirique et choquante comment éduquer les hommes en corrigeant leurs défauts parfois de manière radicale en tuant par exemple un enfant destiné à devenir meurtrier.
L’ermite révèle finalement sa nature d’ange Jesrad à Zadig et lui confie la mission d’éveiller l’humanité.
Le moral revigoré, Zadig revient donc à Babylone et confond sans peine l’imposteur Itobad.
Devenu roi et époux de Astarté, Zadig nomme ses amis Sétoc, Cador et Almora à des postes privilégiés et accompli des derniers actes philosophiques à haut risque dans l’ile de Serendib ou il aide le roi Nabussan à combattre la corruption, à trouver une femme honnête et à mettre au pas les moines récalcitrants afin de repousser une invasion barbare.
En conclusion, il est difficile de ne pas gouter à des œuvres aussi plaisantes que « Micromégas » et « Zadig ou la destinée ».
La première d’entre elle construite sur une base plaisante de Science fiction est incroyablement audacieuse et juste, a pour but de rabattre l’orgueil sans limite de l’être humain et de le ramener à sa condition atomique au sein d’un univers immense dont les secrets le dépasse et le dépasseront toujours.
L’arrivée de géants célestes aux capacités physiques et intellectuelles infiniment supérieures produit la remise en question attendue des systèmes philosophiques et religieux les plus obscurs, absurdes ou prétentieux.
Mais « Zadig ou la destinée » est pour moi encore supérieur au pourtant excellent « Micromégas ».
L’histoire est certes un peu plus étirée et répétitive mais contient une profondeur supérieure avec la description d’un parcours semé d’embuches pour un homme habité d’un esprit éclairé par de justes principes philosophiques.
Malgré la dureté des coups du sort, la lâcheté, la bassesse, la cruauté ou la bêtise des humains, Zadig finit par rencontrer une poignée de gens de biens qui l’aident à triompher pour devenir le roi de Babylone et œuvrer pour le bien de la Cité.
Il reçoit en cela l’aide cruciale d’un ange qui lui montre le véritable sens de la vie et le conforte dans l’accomplissement de sa destinée.
Outre la fond particulièrement riche des contes, ces deux œuvres se caractérisent par un style brillant, mordant et parfois comique, qui fait passer le message philosophiques de manière encore plus plaisante.
Voltaire ou un génie insolent ?
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