Ces guerres qui nous attendent 2030-2060 (Red team)

 



Formée en 2018 à grand renfort de publicité au sein d'une cellule « innovation » du Ministère des Armées, la Red team est un collectif regroupant dix auteurs de Science fiction français.

Censée apporter de nouvelles idées « disruptives » avec son imagination foisonnante, la Red team finit par rassembler ces idées de scénario dans un livre paru à la fin de l'année 2021 « Ces guerres qui nous attendent 2030-2060 ».

4 scénarios majeurs sont donc présentés ici. Le premier d'entre eux montre l'émergence d'une « confédération » latino-américaine de pirates des mers, repoussés hors des structures étatiques traditionnelles par le dérèglement climatique.

Ces pirates, regroupés en « P-Nation » vivant sur des iles artificielles autonomes ne tardent pas à devenir une menace pour les états notamment la France qui tente de terminer la mise au point d'un programme spatial novateur, permettant d'effectuer des voyages sur Mars et Jupiter à l'aide d'un ascenseur spatial opéré depuis Kourou.

Après un attentat spectaculaire mettant un coup d’arrêt au programme, des négociations tendues s'engagent pour la reconnaissance du mouvement.

Ce premier scénario se conclue de curieuse manière par une (trop) longue description des rites d'initiation pour devenir un pirate dans ce qui ressemble plus à un bizutage « hard » pour bidasse qu'à un processus mystico-politique.

Le second scénario ressemble beaucoup au premier, avec cette fois une organisation « Barbaresque » de pirates méditerranéens expliquant par le biais de sa leader, Ala N'Saadi comment ils réalisent leurs actions de détournement des navires commerciaux pourtant de plus en plus protégés.

Le troisième qu'on pourrait considérer comme le plus élaboré, montre l'émergence de guerres d'influences numériques autour des REZ (réseaux de services), face à une Chine étendant son influence sur l'Europe grâce à une confédération d'états balkanique à sa botte.

L’État français a de plus en plus de mal à mener à bien une évacuation sanitaire en Islande face à des populations rebelles gavées de "fake news" sur les REZ communautaires.

Enfin le quatrième relate un nouvel affrontement entre deux blocs le premier méditerranéen occidental avec la France, l'Italie et même la Tunisie, le second oriental avec la Grèce, la Turquie et l'Iran.

Plus conventionnelle, cette guerre est surtout l'occasion de mettre en avant les équipements militaires du futurs : missile hyper véloces, hyper forteresses numériques, canons "railguns" et drones multi milieux.

En conclusion, ouvrage d'Anticipation financé par le Ministère des Armées et patronné par l'Université Paris Sciences et Lettres, « Ces guerres qui nous attendent 2030-2060 » produit un résultat quelque peu décevant.

Sa taille tout d'abord, limitée à une petite centaine de pages effectives surprend et semble en décalage avec son prix de vente élevé. Son contenu ensuite avec l’agrégation de quatre scénarios de niveaux variables.

Le premier d'entre eux ressemblant à un mauvais mélange de « Waterworld » (le film qui coula la carrière de Kevin Costner) et des relents d'angoisse du traçage par puces numériques le tout englobé de rituels de bizutage bas du front, ne convainc pas une seule seconde.

Le second, cousin méditerranéen du premier, propose une simple mise à jour technologique des actes de pirateries d'Afrique de l'Est sur « justification » d'anti-occidentalisme embarrassant.

Fait notable néanmoins, le détournement d'un navire par intoxication de son « pilote neuronal ».

Le troisième se voulant une projection critique des réseaux sociaux, nouveau champs de bataille numérique est le plus confus des trois.

Le dernier, peut-être le moins crédible de quatre compte-tenu du peu de poids à l'international des pays d'Europe méditerranéenne, est surtout le prétexte à décrire les armes du futur entre missiles hypervéloces, hyper forteresses défensives et drones à toutes les sauces.

Au final, une déception donc, qui esquive tout tentative d'explication des évolutions des structures mondiales dominantes actuelles ; les États-Unis, la Russie toujours aussi agressives géopolitiquement et l'Union européenne, empêtrée dans sa construction artificielle.

Les « pays du Sud » issues de l'Amérique latine ou de l'Afrique sont réduits à l'explosion de leur pauvreté les faisant se tourner vers des structures pirates.

Rien n'est dit également sur les pétromonarchies du Golfe, tiraillées pourtant entre poussées progressistes et dérives religieuses radicales.

Et à chaque fois, l'Etat français par l'intermédiaire de son armée se montre dépassé par les évènements et paralysé dans on obsession de donner une image « propre » vis-à-vis des opinions publiques, subit de cuisantes humiliations.

Une prophétie à bas cout qui n'apporte pas en réalité beaucoup des ruptures annoncées.

Dommage donc que Philip K Dick n'ait pas été français et membre de la Red team !

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