Far beyond driven (Pantera)

 



Après deux albums ayant eu un grand retentissement dans le (petit) monde du métal, Pantera se voit estampillé au début des années 90 leader de la musique violente et sans concession appelée power metal, version plus moderne et musclée du thrash des années 80,

A l’époque, Pantera et les Brésiliens de Sepultura rivalisent de puissance dans la catégorie gros durs, tandis qu’un tout jeune groupe alors en devenir suit leur traces, Machine Head.

Sorti en 1994, « Far beyond driven » assoit alors la supériorité des Texans.

On notera la pochette bien morbide, évoquant pour moi le film « Driller killer » d’Abel Ferrara, ou un tueur en série assassines ses victimes en forant leurs têtes à coups de perceuse.

Après quatre ans passés, on est ici bien loin de l’ambiance potache et bon enfant des « Cowboys from hell » des origines.

« Far beyond driven » débute par « Strenght beyond strength », véritable tornade de haine et de d'energie qui dévaste tout sur son passage.

Riffs décapiteurs d’arbres, frappes colossales et vocaux de titan font de ce titre une gifle monstrueuse qui terrasse net l’auditeur.

On est toujours dans le pugnace avec « Becoming » et « 5 minutes alone » , mais cette fois avec deux redoutables mid tempo ultra balancés qui tels des gorilles en colère défrichent méthodiquement toute la végétation aux alentours pour marquer leurs territoire et impressionner d’éventuels rivaux.

Vinnie Paul insuffle un surprenant groove à cette musique si lourde, tandis que les solo de Darrell, surprennent par leur inventivité.

Pantera poursuit son effort avec « I’m broken » qu’on peut considérer comme le meileur titre de l’album.

Le groupe dresse un infranchissable mur sonore et avance ses rythmiques de rouleau compresseur sur lesquelles se greffe la voix brûlante d’un Anselmo mettant toutes ses tripes  et son ame comme si sa vie en dépendait.

L’ensemble est monstrueux d’intensité comme peut l’attester la vidéo de l’époque, véritable leçon de metal toute en énergie, en dénuement et en sueur.

Après avoir mis une raclée à tout le monde, Pantera fait tout dérailler avec le très déjanté et malsain « Good friends and a bottle of pills » suintant le mal être et les états d’âme d’un chanteur en pleine dépression.

L’introspection se poursuit avec l’interminable « Hard lines, sunken cheeks » aux refrains tournants curieusement au ralenti.

Très primaire et pénible est « Slaughtered », avec les grognements de cochons d’Anselmo sur les refrains.

On se demande alors ou est passé la furia et maestria du début de l’album en écoutant, la torture saccadée, violente et répétitive de « 25 years »,  étalée sur plus de six minutes.

Alors qu’on y croyait plus, le groupe se ressaisit avec « Shedding skin » , ténébreuse et crépusculaire power ballade avec un chant sur le fil du rasoir et des refrains enivrants.

Comme ressuscité, Pantera retrouve alors tout sa puissance de feu et bastonne alors à tout va sur l’infernal « Use my third arm » sans doute l’un des morceaux les plus violents jamais écrits par le groupe.

Malgré sa frappe de mammouth,  « Throes of rejection » se montre surtout comme un gros délire sombre, pénible et étouffant comme une nuit d’insomnie.

Après avoir copieusement secoué voir écœuré l’auditeur, les Texans gardent leur meilleure surprise pour la fin avec le reprise de la ballade« Planet Caravan » de Black Sabbath, réussissant le tour de force de surpasser l’original par une pureté sans faille d’interprétation.

On pourra alors juger sur pièces des merveilles que peut produire la rencontre de deux légendes du metal comme Pantera et le Sabb’’.

En conclusion, « Far beyond driven » est un album surprenant, déroutant et difficile d’accès mais pourtant fort intéressant.

Après un « Cowboy from hell » sympathique mais encore trop proche de ses racines et un « Vulgar display of power » certes hyper rugueux mais mono dimensionnel, le troisième disque des Texans après avoir aligné quatre titres colossaux dignes des plus grands disques de metal, sort complètement des sentiers battus pour explorer des terrains plus glauques et torturés.

A de rares exceptions prêts ces incartades trop emplies de spleen lancinant et de rage destructrice, laissent à vrai dire la plupart du temps sur sa faim mais on saluera  néanmoins la prise de risque de cette entreprise absolument anti commerciale signe que le groupe s’est toujours moqué des modes, proposant contre vents et marées la musique qu’il affectionne, à savoir ce métal viril et violent sans compromission aucune.

Et puis rien que pour la mystique envoûtante de « Planet caravan », magnifique ballade capable de séduire un public non adepte de musique bruyante, l’écoute de ce disque se justifie à elle seule.

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