Pat Cash, uncovered (Barry Flatsman)
Poursuite de l'exploration du tennis des années 80 avec « Pat Cash, uncovered » la biographie du champion de tennis australien.
Tout commence par le pic de la carrière de sportif et d'homme de Cash, sa victoire à Wimbledon en 1987 avec cet acte, insensé à l'époque de vouloir briser le strict protocole anglais et d'escalader la tribune pour donner une accolade à ses proches.
Cet accomplissement va changer la vie de Cash et lui permettre d'accéder à un tout autre niveau de célébrité.
Né à Melbourne, Cash est comme beaucoup de joueurs de tennis issu d'un milieu classe moyenne plutot favorisé avec un père avocat qui sera toujours à ses cotés pour protéger les intérêts de sa carrière face à la voracité des agents.
Comme beaucoup d’athlètes d'exception, Cash détecte très tôt des prédispositions évidentes pour le sport. Doté d'un physique râblé et dense, il excelle au sprint, au rugby à 7 et au cricket. Les sports d'endurance comme la cours de fond ou la natation, lui posent en revanche plus de difficultés.
Peu intéressé par l'école, Cash réussit très tôt dans le tennis en devenant rapidement invincible en Australie.
Les voyages lui permettent de se frotter à une opposition plus grande et à prendre conscience notamment de ses limites physiques face à des joueurs mieux préparés.
L'Australien à un jeu tourné vers l'attaque simple mais redoutablement efficace, qui lui permet de remporter Wimbledon et l'US Open en junior en 1982 puis de participer à la victoire de l'Australie en Coupe Davis à à peine 18 ans en remportant le simple décisif face à Joakim Nystrom.
Il devient alors le rival de Mats Wilander, son opposé en terme de jeu mais aussi d'Ivan Lendl, envers lequel Cash n'est pas tendre, l'accusant de racisme et d'intimidation, voir persécutions envers les autres joueurs.
Mais Cash est aussi une forte tete, capable de tenir la dragée haute à n'importe qui, Lendl compris mais également d'exploser de rage sur un court.
Cette caractéristique lui vaut de nombreuses critiques dans son propre pays, notamment de la part de John Newcombe, l'ex champion australien ayant toujours été particulièrement négatif sur lui et le rapproche de John Mc Enroe qui possède comme lui du sang bouillonnant d'Irlandais.
Malgré son admiration pour Mc Enroe qu'il qualifie de joueur de tennis le plus doué de l'Histoire, Cash confesse le caractère exécrable de l'Homme, son obsession maladive pour la victoire, y compris sur le tournoi des Séniors et son incapacité à gérer sa colère.
En 1984, Cash explose et atteint les demi-finales de Wimbledon et de l'US Open en obtenant même une balle de match contre Lendl.
Malheureusement l'année suivante,il est immédiatement touché par une vilaine blessure au dos qui anéantit ses débuts prometteurs. Il doit arrêter de jouer, subir une intervention chirurgicale délicate et entamer une pénible rééducation.
Alors qu'il s’apprête à revenir à Wimbledon 1986 , il doit subir une opération de l'appendicite et se rétablit in extremis pour atteindre les quarts de finale, battant Wilander sans préparation.
En fin d'année, Cash réédite son exploit de la Coupe Davis en réalisant un des plus fabuleux come-back de son histoire : mené 2 sets à 0 par un Mickael Pernfors en état de grâce, il refait son retard et arrache la victoire.
Cash comprend alors qu'il doit exploiter au maximum ses incroyables qualité techniques et physiques et commence à s'entourer d'une équipe de professionnels : il soigne sa diététique, s'entraine de manière spécifique en musculation et en course, mais surtout apprend à devenir plus robuste mentalement pour garder sa concentration dans les compétitions.
Cash joue relativement peu de tournoi comparés aux stakhanovistes comme Lendl mais engrange une précieuse confiance sur herbe, atteingant la finale de l'Open d'Australie perdue face à Edberg, puis perdant de justesse contre Connors au Queens.
La chance lui sourit à Wimbledon lorsque Becker chute lourdement et à la suprrise générale contre son ami Pete Doohan.
Privé de l'épouvantail allemand, Cash saisit sa chance, surclasse Wilander, Connors et son pire ennemi Lendl en finale en pratiquant un tennis d'attaque parfaitement abouti.
Il se marie avec le mannequin norvégien Ann Britt Kristiensen, se qualifie pour le Masters en participant au très controversé tournoi de Johanesbourg, qu'il remporte mené deux sets à 0 face à un autre joueur qu'il déteste, Brad Gilbert.
En début d'année 1988, il passe très près d'un autre exploit en battant Lendl à nouveau à l'Open d’Australie pourtant disputé sur une nouvelle surface « en dur » réputée moins favorable pour son jeu et perd de justesse une finale haletante face à Wilander.
Malgré la déception, Cash l'ignore mais les blessures vont marquer le déclin se sa carrière.
Après avoir plutot bien joué à Roland Garros sur une surface pourtant moins favorable à son jeu, été surclassé par Becker à Wimbledon, il se blesse encore, cette fois le tendon d'Achille se rompt en 1989.
Cash perd alors pieds et confiance en lui, divorce, commence à fréquenter les clubs de Londres ou il réside et touche grâce à sa nouvelle petite amie Emily Bendit à la cocaïne.
Fan de musique et guitariste amateur, Cash est ami de plusieurs stars du rock comme les Rolling stones ou Iron Maiden.
Les soirée en boite de nuit remplacent les séances d'entrainement et la dépression le ronge. Cash frôle le carton rouge à Miami ou il joue quelques jours après avoir consommé de la coke.
Les résultats ne suivent plus, le classement chute, les sponsors et « amis » le lâchent...
La dépression et même des envies de suicides commencent à le ronger avant d'entamer une thérapie salvatrice.
Jouer au tennis devient donc une souffrance, une humiliation donc pour l'ex champion de Wimbledon qui doit passer par les qualifications pour entrer dans certains tournois et pire qu'on doit pousser prématurément vers le sénior tour.
Il finit par se retirer définitivement en 1997 et commence une carrière de commentateur pour Wimbledon ainsi que coach.
Il travaille d'abord avec Mark Philippoussis, la pépite australienne au jeu de bombardier. Cash estime que « Flip » comme il l'appelle a le potentiel pour gagner un ou deux grands chelems mais le dilettantisme du joueur, ses multiples blessures et surtout l'entourage toxique représenté par son père Nick auront raison de ses ambitions.
Son expérience avec Greg Rusedski, le super serveur canadien naturalisé anglais tournera à l'un des expériences professionnelles et humaines les plus traumatisantes pour Cash.
Cash mobilisera pourtant ses meilleurs experts pour sauver la carrière de Rusedski, protégeant son dos et lui redonnant confiance en ses moyens mais rapidement un différent financier finira par les opposer.
Cash travaillera plus de six mois avec la star sans être payé et nourrira une rancune tenace envers cet homme qu'il qualifiera d'ingrat.
Lorsqu'il termine l'écriture de son livre en 2002, Cash partage son temps entre le sénior tour, son académie de tennis à Melbourne et ses quatre enfants qu'il a cherché à protéger des ravages du sport professionnel.
En conclusion, « Pat Cash, uncovered » est l'une si ce n'est la meilleure biographie de tennis qu'il m'ait été donné de lire.
La raison ? Contrairement à la plupart de ses collègues, le champion australien se livre réellement et ne complait pas dans un discours convenu dicté par des impératifs de communication.
On découvre donc les fêlures, les doutes derrière la carapace de champion, à commencer par le mort par suicide de son frère ainé.
Athlète précoce, surdoué du tennis, Cash fut champion junior et remporta la Coupe Davis à 18 ans à peine avant d'entrer dans le top 10 l'année suivante en raison de performances déjà exceptionnelles face aux meilleurs mondiaux.
Mais cette ascension trop rapide a rapidement présenté des désagréments avec des blessures graves précoces qui ont entravé sa réussite. L'analyse de Cash est juste : sans ses blessures il aurait probablement pu remporter 1 ou 2 tournois du Grand chelem et viser la première ou la seconde place mondiale.
L'aspect passionnant de cette biographie est de dépasser le cadre sportif : Cash se livrant sans filtre sur les joueurs qu'il n'aime pas au rang desquels Lendl et de manière générale les Autrichiens Horst Skoff et Thomas Muster, accusant même ce dernier ouvertement de dopage.
L'envers du décors d'un champion se constitue aussi de chemins de croix pour récupérer de blessures graves, de périodes de doutes, de dépressions et aussi d'abus conduisant à la prise de drogue.
Ce courage de parler de dépression, de drogue et d'envie de suicide lorsqu'on réalise qu'à moins de 30 ans on est un « has been », que vos meilleurs « amis » ne vous appellent plus et que les directeurs de tournois ne vous font plus de faveurs, constituent le matériau le plus riche de cette biographie cinq étoiles.
L’expérience de coach de Cash revêt aussi un parfum exceptionnel, avec la déception Philippoussis diamant brut au talent gâché par un environnement toxique et le désastre Rusedski, le super serveur canado-anglais se révélant ici un personnage à la limite de la malhonneté.
Après toutes ces épreuves de la vie, on ne peut que saluer le parcours de Cash, le « Mad Max » du tennis, cet athlète exceptionnel à la belle et grande gueule, ce rocker et fêtard qui aura finalement tombé courageusement le masque dans cette biographie exceptionnelle à recommander à tous les fans de sport !
Commentaires
Enregistrer un commentaire