Le sel de tous les oublis (Yasmina Khadra)

 

Sorti en 2020, « Le sel de tous les oublis » continue l'impressionnante production littéraire de Yasmina Khadra.

Dans ce court roman, le personnage principal Adem Nait-Gacem, un instituteur algérien de la région pied après que sa femme Dalal, l'ait quitté pour aller vivre avec son amant.

Nous sommes en 1963, dans une Algérie meurtrie par la guerre coloniale, qui tente de se construire un avenir dans la douleur.

Adem quitte son emploi sans préavis et va errer sur les routes autour de Blida, lieu habitué des souvenirs de sa rencontre avec Dal.

De tripot en tripot, il boit beaucoup, fait de mauvaises rencontres et finit par se faire sévèrement tabasser par des adolescents.

Il se réveille dans un hôpital psychiatrique et y reste plusieurs semaines le temps de persuader le directeur de sa santé mentale.

Au détour d'un chemin aride, Adem rencontre Mika, un nain vivant en marginal dans les bois. Avide de compagnie, le nain l'adopte lui prodiguant nourriture et soutien.

Mais Adem continue de repousser toute tentative de liaison même amicale et finit par quitter son bienfaiteur après qu'il ait agressé un garde-forestier ayant finalement avoué le massacre de religieuses l'ayant élevé.

Après avoir été cantonnier pour gagner un peu d'argent puis percuté la voiture de Ramdane Bara, un commissaire politique, Adem est recueilli dans une ferme dont le propriétaire, Mekki vit sous la menace d'une expropriation.

Handicapé après avoir sauté sur une mine, Mekki a besoin de l’assistance de se femme la belle Hadda et de son cousin Issa.

Adem accepte d'écrire une lettre pour le président de la République afin de dénoncer les agissements brutaux et illégaux de Bara, un homme arriviste sans morale.

Il reste à la ferme et se voit même proposé un poste d’instituteur pour éduquer les enfants d'une austère tribu avoisinante.

Peu à peu, Adem tombe amoureux d'Hadda mais celle-ci en bonne paysanne reste fidèle à son mari handicapé. Lorsqu’il est jeté en prison pour avoir écrit la lettre, Adem subit la torture et les privations mais est libéré par la sécurité militaire après que Ramdane se soit attaqué à plus fort que lui.

Revenu à la ferme, il tente une nouvelle fois de persuader Hadda puis devant un nouveau refus décide d'en finir avec Mekki.

Il reçoit un coups de fusils et après une douloureuse convalescence qui le laisse amnésique, repart finalement sur les chemins avec Mika pour épouser une vie d'errance et de liberté.

En conclusion, avec « Le sel de tous les oublis » Yasmina Khadra nous enchante encore en nous emmenant dans un véritable conte initiatique dans lequel un homme brisé rencontre sur son chemin de douleurs milles aventures et personnages pittoresques, pour la plupart des marginaux attachants comme Mika le nain, Laid le malade amnésique ou un duo de cousins cantonniers digne de Laurel et Hardy.

Avec en toile de fond un pays instable et fragile, meurtri par la guerre d'Indépendance, Adem qui contient quelques similitudes avec l'écrivain (origine modeste, ascension sociale, intellectuel) accomplit son douloureux chemin d'expiation et finit par trouver la paix.

Une œuvre superbe illuminée par le style coloré, puissant, poétique et parfois humoristique d'un des plus grands écrivains de langue française !