L'art de la guerre (Machiavel)

 



Publié en 1521, « L’Art de la guerre » de Machiavel fait écho au traité du chinois Sun Tzu à prêt d’un millénaire d’intervalle.

Dans ce livre en sept tomes écrit sous forme de dialogue factices, le Florentin dénonce par la voix du capitaine Fabrizio Colonna, la faiblesse des armées italiennes de la Renaissance et se propose d’améliorer leur efficacité militaire en prenant exemple sur les Anciens.

Par Anciens, Machiavel fait référence aux Grecs mais surtout aux Romains dont le décorticage des stratégies militaires occupe pratiquement l’essentiel de l’ouvrage.

Fabrizio s’intéresse tout d’abord à la composition et au recrutement des troupes.

Il réfute l’idée selon laquelle une armée ne peut être constituée que par des professionnels qui présentent toujours le risque de devenir au bout d’un moment trop puissants à l’instar de la garde prétorienne romaine.

L’usage de mercenaires étrangers se vendant aux plus offrants est tout aussi prohibé.

Fabrizio prône la levée de soldats parmi les gens du peuple qui auront été préalablement éduqués et périodiquement entraînés pour être prêts le moment venu à servir sous les armes afin de protéger leur patrie.

Son idée dominante est de rétablir la puissance de l’infanterie, la cavalerie étant relégué à un rôle d’auxiliaire.

Pour cela les exemples sont la compacité de la phalange grecque mais bien plus encore les remarquables performances des légions romaines qui étaient quasi invincibles en leur temps.

Fabrizio s’appuie donc fortement sur l’organisation des légions, sur leurs fantassins légers (archers et fondeurs ) appelés vélites et sur la triple rangée de fantassins lourds (hastaires, princes et triaires)  composant leur cœur de la force de frappe des légions.

Les armées allemandes mais surtout suisses réputées alors comme les plus performantes de l’époque de Machiavel, ne résistent pas longtemps à la comparaison avec les légions romaines.

Puis Fabrizio décrit longuement les manœuvres nécessaires pour entraîner les troupes en insistant sur leur cohésion d’ensemble.

Poussé par ses interlocuteurs à s’exprimer sur l’artillerie, il minimise l’impact de l’artillerie lourde car très dépendante de la géographie qui peut altérer grandement sa précision, et mis en difficulté sur l’artillerie légère, n’a pas d’autre choix que de miser sur la rapidité de ses troupes pour arriver le plus vite possible au corps à corps.

Dans le livre quatrième, Fabrizio aborde l’aspect du choix du meilleur terrain pour engager l’affrontement et celui du commandement afin de motiver ou refroidir ses troupes selon l’appréciation du général.

Ensuite, Fabrizio poursuit sur l’art d’accoutumer les soldats à un régime alimentaire austère, au contrôle de leur solde, à l’interdiction du pillage individuel, à la punition sévère de désobéissance et à la récompense de la bravoure, ceci afin de leur inculquer une discipline de fer source de leur plus grande efficacité.

Le livre sixième est consacré à l’édification des camps en insistant plus sur le travail de soldat réquisitionnés comme manœuvres que sur le choix du terrain et à la manière de défendre ces camps de manière efficace.

Dans le dernier livre, Fabrizio traite de l’art de construire des fortifications capables de soutenir un siège.

Il est donc longuement question de remparts, de fossés, de tours, de postes avancés, de l’art de s’approvisionner, de contrer les espions ou d’attaquer l’ennemi sur un autre front pour l’obliger à quitter ses positions.

En conclusion, « L’art de la guerre » est une référence de son temps, un manuel technique qui traite de manière détaillée et méthodique de la vision de Machiavel pour redonner du prestige aux troupes de son pays.

Le quasi systématisme de l’adoption du modèle romain dans une époque ou l’artillerie avait révolutionné l’art de la guerre peut pour moi montrer un caractère trop étroit et rigide aux théories exposées.

En effet les progrès ultérieurs de la mécanique (précision et puissance des canons, cadence des mitrailleuses) rendront rapidement ses considérations de plus en plus difficiles à tenir.

Bien entendu l’aspect commandement présente toujours un intérêt mais j’ai trouvé que dans le même registre le livre de Sun Tzu, plus complet, plus souple et plus subtil dans son approche générale.

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