Reign in blood (Slayer)

 



1986.

Après avoir déjà produit deux belles déflagrations dans le monde alors balbutiant du thrash metal américain, Slayer franchit un nouveau cap avec le producteur Rick Rubin et « Reign in blood », considéré par beaucoup comme leur meilleur album, un monument du thrash, à la fois révolutionnaire et culte.

La pochette telle un somptueux tableau macabre de Jerome Bosch, met tout de suite dans l’ambiance avec ce règne de Satan dans la violence et le sang depuis les profondeurs de sombres enfers sous terrains.

Nul trace d’espoir ou de salut à attendre ici donc.

« Angel of death » prend immédiatement à la gorge, guitares Hanneman-King  mitrailleuses de riffs tournoyant à des vitesses surhumaines, tempo frénétiques comme si le batteur Dave Lombardo était doté de centaines de paires de bras martelant sans cesse ses tambours de l’enfer, le tout surplombé par Tom Arraya, chanteur bassiste exalté dont la voix claque comme autant de coups de fouet sur le visage d’un auditeur abasourdi.

L’extrême violence contrôlée combinée à une précision millimétrique quasi parfaite donne un sentiment de puissance incroyable confinant même jusqu’à l’effroi.

Le thème (tant décrié) des camps de concentration et de Joseph Mengélé, médecin de la mort à Auschwitz, colle bien avec cette musique de l’urgence et de fin du monde.

Après ce premier titre paroxysmique, le groupe conserve son rythme infernal avec « Piece by piece » et « Necrophobic »  tous aussi violents mais plus brouillons et approximatifs.

Aucun temps mort, aucune pose, tout est enchaîné comme un sprint interrompu sous amphétamines, le résultat étant un ouragan de metal et de feu s’abattant sur l’auditeur choqué.

Légèrement plus lent (tout est relatif !) ,  « Altair of sacrifice » ne permet pas tout à fait de souffler tant les solos continuent de jaillir dans tous les sens et la batterie de bombarder intensivement.

Parvenant à mieux canaliser temporairement cette phénoménale puissance de feu, « Jesus Saves » produit l’effet d’une gifle d’une violence inouïe.

Tom Array renoue avec ses sombres fantasmes de tueur en série sur « Criminally insane » , typique du thrash des années 80 avec ses rythmes puissants et saccadés.

Engagé dans l'engrenage d'une guerre sans retour, Slayer ne souffle pas, Slayer ne met jamais un genou à terre, faisant feu jusqu’à l’épuisement de toutes ces munitions ou jusqu’à l’explosion de ses propres armes à feu.

Une certaine lassitude devant tant d’uniformité et de linéarité finit par s’installer.

« Reborn » est une boucherie sonore d’à peine plus de deux minutes, « Epidemic » et « Postmortem » passent à peine mieux.

Arrive ensuite fort à propos le deuxième morceau culte de ce disque, « Raining blood » .

Introduction inquiétante avec des bruits de pluie et d’orage à laquelle succède un riff de défi immédiatement suivi d’un intense martèlement de batterie, avant que ne s’installe une rythmique hypnotique réalisant la symbiose parfaite entre guitares et basse-batterie.

Sentiment de puissance irrésistible, de folie contagieuse,  d’énergie primitive quasi tribale prennent donc instinctivement le relais dans le psychisme déjà passablement éprouvé de l’auditeur.

Faisant office de digestif, « Agressive perfector » devient alors une plaisante mais bien anecdotique conclusion.

En conclusion, « Reign in blood » doit sont statut d’album culte à son extrême violence, a son imagerie dérangeante et à son absence totale de concessions.

A l’époque cette approche ultime constituait une première et ouvra toute une brèche pour tous les groupes adeptes d’une musique extrême, soit plus axée sur l’horreur pure (Death metal)  soit plus sur un satanisme confinant au fanatisme (Black metal).

D’une durée de 29 minutes environ, « Reign in blood » peut aussi être vu comme un défouloir paroxysmique quasi irrespirable ou ne transpire aucune pause ni aucune approche mélodique.

Pour ma part j’ai toujours du mal à encaisser ce disque trop linéaire à mon goût et préfère les œuvres qui bien que parfois violentes restent capables de plus de variété dans leurs ambiances.

Pourtant, « Angel of death » et « Raining blood » peuvent être de par leur qualité et leur intensité incroyables assurément considérés comme des monuments de la musique thrash et justifier à eux seul une écoute de ce disque extrême qui vous l’aurez compris ne sera pas retenu dans la liste des cadeaux offerts à votre futur belle mère.

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