Le petit manuel de capoeira (Nestor Capoeira)

 



Culture brésilienne toujours avec « Le petit manuel de capoeira » de Nestor Capoeira.

Publié initialement en 1981, cet ouvrage de plus de 300 pages aujourd'hui a fait l'objet de plusieurs rééditions en 1998, 2002 et...2016.

L'auteur, un des pionniers de capoeira en Europe dans les années 70, commence par relater son parcours, parfait reflet de l'éclosion de la capoeira, depuis des débuts marqués par la prohibition et la violence jusqu'à l'accession à un statut de discipline sportive aux vertus éducatives.

On découvre les racines africaines de cette tradition transmise oralement entre les esclaves des grandes métropoles brésiliennes : Salvador de Bahia au début puis concurrencée par Rio de Janeiro, São Paulo et Recife ensuite.

L'origine de la capoeira reste donc assez mystérieuse, faute d'écrits, mais Capoeira bat en brèche le mythe de techniques de self-défense maquillées en danse, puisque dès sa diffusion au début du XIXieme siècle, les autorités en place l'ont rapidement interdite et violemment réprimée.

C'est donc entourée d'une aura de clandestinité que la capoeira a continué de se répandre, en touchant les couches les plus pauvres de la population noire.

A cette époque, les capoeiristes sont vus comme des voyous dangereux se déplaçant en bandes et les « jeux » dégénèrent souvent en affrontements parfois mortels à la lame de rasoir ou au couteau.

Ce passé sulfureux de violence de rue perdurera dans les chants qui rythment les entrainements.

Sous Getulio Vargas, président à poigne visant inculquer des bases « viriles » au peuple brésilien, la capoeira change de statut et devient plus respectable, mais malgré les efforts de structuration effectués par les premiers « mestres » (Bimba, Pastinha) du début du XXieme siècle, ce coté imprévisible, instinctif et créatif est jugé primordial pour Capoeira.

Au fil du temps, la capoeira intègre donc des éléments extérieurs hérités des arts martiaux asiatiques, comme l'adoption de règles, de développement d'entrainements plus systématiques, les grades et la relation maitre-élèves, dans ce qu'on appelle l'école « regional » par opposition au style « angola » réputée plus basée sur l'improvisation.

Elle séduit un nouveau public, de blancs des classes moyennes ou supérieures jusqu'aux intellectuels.

Mais faute de soutien des pouvoirs publics brésiliens, les professeurs sont contraints de partir en Europe pour vivre de leur sport, ce qui contribue à son expansion.

Après cette page historique nécessaire à comprendre le cheminement de la capoeira jusqu'à nos jours, on passe à la partie plus descriptive avec l'importance de la musique jouée au berimbau et des chants d'un chœur formant une ronde (roda) qui rythment chaque « jogo » afin d'entrer dans un état d'esprit propice.

La « ginga », mouvement de base ressemblant à une danse oscillatoire d'avant en arrière se pose donc sur un rythme musical et à partir de-là, les combattants peuvent développer leurs techniques.

Capoeira insiste sur les exercices d'échauffements assez particuliers, avec beaucoup de déplacements à quatre pattes en imitant les animaux, afin de comprendre l'art de se mouvoir propre à ce sport.

Les feintes, mouvements de roues, esquives regroupées dans l'art de la « malicia » sont une partie intégrante de cet apprentissage qui encourage à développer sa créativité personnelle.

Après les déplacements vient ensuite le temps des coups de bases, principalement des coups de pieds directs, de coté mais aussi retournés.

Une part importante est consacrée aux nombreux balayages et sauts acrobatiques, mais les pages suivantes viennent rappeler que la capoeira recèle aussi une partie plus brutale avec coups de poings, de coudes, de genoux et de tête.

Enfin, le manuel termine par la pratique des huit enchainements de maitre Pastinha.

En conclusion,  « Le petit manuel de capoeira » est un ouvrage de référence recelant une mine d'informations concernant l'histoire, l'esprit de cet art martial né dans la souffrance de l'esclavage, puis dans la violence des faubourgs des métropoles brésiliennes avant de se respectabiliser dans les clubs comme n'importe quel autre « sport ».

L'aspect pratique est donc abordé tardivement mais de manière pragmatique avec un ensemble de techniques de base : déplacements, esquives, coups du plus élémentaire aux enchainements les plus complexes.

Deux défauts sont néanmoins à signaler : les photos des années 70 et les illustrations au graphisme suranné, toutes en noir et blanc, traduisent l'age de la première édition et un français parfois approximatif de l'auteur, Brésilien de naissance.

« Le petit manuel de capoeira » mériterait donc un lifting complet afin de rendre son contenu très intéressant, plus attractif visuellement !

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