Vol 4 (Black Sabbath)

 




Black Sabbath poursuit sa production  de disques à une cadence de stakhanoviste et sort en 1972 son quatrième album en trois ans : « Vol 4 ».

Si le titre et la pochette minimalistes laisseraient à penser que l’inspiration des quatre de Birmingham s’essouffle, la suite viendra rapidement défausser ce jugement hâtif.

« Wheels of confusion » entame calmement cette nouvelle danse macabre.

Ce titre fleuve s’étalant sur plus de huit minutes, alterne périodes de langueurs hypnotiques anesthésiantes et passages plus fiévreux.

Comme souvent, Black Sabbath excelle dans cet exercice ou de sublimes éclaircies apaisantes jaillissent au milieu de sombres et denses forets de riffs monolithiques.

Pantelant après cette impressionnante démonstration de maîtrise, l’auditeur enchaîne sur « Tomorrows dream », agréable bien que plus modeste malgré un son implacable et un Ozzy Osbourne à la voix toujours impeccable.

Interprétée au piano avec des violons en soutien, « Changes » est une ballade déchirante de beauté ou Ozzy pleure avec regret un amour perdu.

Je ne crois pas avoir entendu mieux dans ce registre dans ma vie.

Le bizarroïde, dérangeant et futuriste instrumental « FX », introduit « Supernaut » qui révèle au monde ébahi un groupe au fait de son art, avec un chanteur en état de grâce  en parfaite symbiose avec les riffs hors classe de la guitare de Maître Iommi.

On aimerait que « Supernaut » dure toute l’éternité tant ce titre regorge de fluidité, de classe et d’inspiration.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, « Snowblind » lui est pourtant supérieur.

Il faut dire que « Snowblind » est une pièce maîtresse du répertoire du groupe, le genre de morceau qui vous étourdit de plaisir, vous attire inexorablement et vous fait aimer un groupe comme on entre en religion.

Superbe power-ballade d’une grâce en apesanteur, d’une beauté et d’une tristesse à faire pleurer, « Snowblind » propose un voyage sensoriel enivrant qu’on ne souhaiterait jamais terminer.

On aura beau me répéter que la musique classique ou le jazz sont supérieurs au rock, jamais ces musiques ne m’ont autant bouleversées que « Snowblind ».

Après avoir contemplé de tels sommets, on est bien forcé de redescendre sur terre pour ne pas courir le risque de manquer d’air, et le très ésotérique « Cornucopia » remplit tant bien que mal cet office.

Instrumental angélique, « Laguna sunrise » lance la nerveuse « Saint Vitus Dance » .

Malgré la courte durée de cette danse, le tempo rapide, l’alternance dévastatrice de riffs pachydermiques et rock and roll produisent un mélange du meilleur effet.

Concluant l’album, « Under the sun » s’inscrit dans la lignée des titres longs, sombres et tortueux recelant leurs lots de trésors enfouis se dévoilant au fur et à mesure d’une écoute attentive.

En résumé, « Vol 4 » est un album de haute volée et d’une très grande richesse musicale.

Les six premiers titres sont pratiquement tous exceptionnels, la deuxième partie du disque étant d’un niveau moins haut bien que toujours de très bonne qualité.

« Vol 4 » est triste, sombre mais tellement beau, riche et inspiré qu’il transperce votre âme de part en part par ces quelques éclairs de génie.

Difficile donc de ne pas succomber à ce charme vénéneux, cette grâce hypnotique, ces longs anneaux de brume qui vous enveloppent tel un énorme serpent immortel sur de sa force divine.

« Vol 4 » ne sera sans doute pas l’album le plus plébiscité dans la carrière du Sab’’ mais j’assume les faiblesses coupables que j’ai à son égard.

Vous avez dit Sorcellerie ?

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