Plates coutures (Matmatah)

 



Groupe phare du début de la fin des années 90, Matmatah avait déçu ses fans en annonçant la fin de sa carrière en 2007 et en enchainant avec une tournée d'adieux forcément triste.

Après un long break dans lequel Tristan Nihouarn s'est essayé à d'autres projets, telle une carrière solo ponctuée de deux albums assez confidentiels et la composition de musiques de documentaires, le leader incontesté de Matmatah reforme en 2016 « son » groupe qui après une année de travail sort « Plates coutures » un cinquième album assez inespéré.

Avec le bassiste Eric Digaire, seul rescapé aux cotés de la formation originelle, Stan embauche le guitariste Emmanuel Baroux référence de la scène pop-rock française et complète la formation avec le batteur Benoit Fournier, pilier du groupe depuis 2002.

Habillé de sa superbe pochette évoquant le courant surréaliste en version artwork numérique, « Plates coutures » débute par « Nous y sommes » qui rappelle avec bonheur la « patte » musicale si talentueuse de Matmatah : texte puissant, travaillé à la froide lucidité écologique, mélodie fluide et refrains plus appuyés.

Du punch, les Bretons en ont encore à revendre malgré le poids des ans, comme le prouve « Lésine pas » chanson d'amour à l'optimisme hautement cadencé mais n'oublient pas de frapper juste sur « Petite frappe » donc les mélodies soignées ne font pas oublier la virulence de la charge contre les voyous de l'Etat islamique.

On continue dans la même veine avec « Marée haute » brillante analyse de la corruption de nos élites politiques et de leur propension à se sentir au dessus des lois, puis on se laisse envelopper par la douce mélancolie et le charme hypnotique de « Toboggan ».

Mais Matmatah c'est aussi une certaine gouaille comme le rappelle « Retour à la normale » empli d'humour.

Superbement éthéré, « O ma beauté » critique l'égocentrisme de l'ère moderne propagé par les réseaux sociaux et si la ballade « Entre les lignes » chantée par Eric recèle moins d'impact, la vibe puissante de « Overcom » rappelle la face plus dure du groupe.

Pour finir, « Margipop » porte haut les couleurs d'un rock flamboyant avant que l'acoustique « Peshmerga » n'envoie un message gavé d'optimisme en faveur des femmes kurdes contre l'obscurantisme des radicaux islamiques.

En conclusion, n'étant à la base ni fan de chanson ni de rock français, j'aurais du être profondément rebuté par l'album du come-back d'un groupe breton oublié de la fin des années 90, mais le principe de réalité et la haute qualité de « A plate coutures » ont fort heureusement déjoué ces pronostics.

On comprend donc le soin qu'a pris Matmatah pour composer ce cinquième album  formant un ensemble rock homogène extrêmement plaisant dont les textes intelligents, subtils ainsi que les mélodies élégantes composent les ingrédients de base.

Riche, varié, agréable, « A plates coutures » s'écoute en boucle et constitue le haut du panier d'un genre aujourd'hui quasi éteint depuis Noir désir : le rock français.

Un grand bravo à ses musiciens talentueux à qui on souhaite encore une longue et belle carrière !

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