Voix indiennes, voix américaines, les deux visions de la conquête du Nouveau Monde (Nelcya Delanoë, Joëlle Rostkowski)

 



Penchons nous à présent sur l’Histoire des Indiens d’Amérique du Nord avec « Voix indiennes, voix américaines, les deux visions de la conquête du Nouveau Monde » de Nelcya Delanoë et Joëlle Rostkowski.
Sorti en 2003, « Voix indiennes, voix américaines, les deux visions de la conquête du Nouveau Monde » se propose de retracer l’intégralité de l’histoire dramatique des Peaux-rouges.
Arrivés probablement d’Asie par vague d’immigrations successives entre -40000 et -23000 av JC, les Indiens vivent sur le continent américain jusqu’à ce que les expéditions européennes de la Renaissance viennent les sortir de leur isolement.
Les écrits de Marcos de Niza au Mexique, de Jacques Cartier et Samuel le Champlain au Quebec, relatent les premières rencontres avec ces populations estimées comme sauvages, naïves, généreuses et donc parfaitement évangélisables
Puis les vagues de colons anglais, allemands, hollandais et français s’établissent sur la cote Est et nouent d’abord des relations pacifiques avec les autochtones.
Mais inévitablement à mesure que la poussée coloniale empiète sur les territoires des Indiens pour chasser et pécher, les heurts se succèdent…et après le massacre de colons par les Pequots ou les Wampanoags, une politique de domination par la force se met en place avec quelques fois des alliances avec des tribus rivales.
Proclamée en 1776, l’indépendance des États-Unis accélère le peuplement du pays malgré une frontière établie avec les Indiens à l’Ouest des Appalaches.  
Dès lors, malgré les multiples traités visant à accorder une certaine autonomie aux Indiens sur leurs territoires, le gouvernement américain n’aura de cesse de rogner via un Bureau des Affaires Indiennes corrompu, sur leurs droits et leurs espaces, surtout lorsque des minerais précieux étaient découverts.
Divisés, affaiblis par les maladies venus d’Europe qui les déciment, les Indiens ne cessent de reculer sous la pression expansionniste des colons.
L’Indien devient donc caricaturé en brute stupide et cruelle, qui doit se soumettre et être déportés dans des réserves dans des conditions tragiques ou être éliminés.
Malgré la résistance juridique ou militaire héroïque de grand noms comme Tecumseh de la tribu des Shawnee, Sitting bull des Sioux, Crazy horse des Cheyennes, les Indiens sont soit tués soit soumis et cèdent leurs territoires les plus riches ou sacrés comme les Black hills.
Alors que les Indiens déclinent et se voient forcés d’abandonner leur culture (langues, rites spirituels, vêtements) pour s’ « américaniser », certains intellectuels comme le peintre George Catlin  prennent leur défense pour tenter d’éveiller les consciences, sans toutefois empêcher le mouvement d’ensemble, encore accéléré lorsque l’Etat décide de développer le chemin de fer en 1870.
Parqués sur des terres arides, infantilisés par des aides sociales leur permettant de subsister, les Indiens ne parviennent pas à s’adapter et sont frappés des fléaux du chômage, de la violence et de l’alcoolisme.
Finalement, la culture indienne va réussir à se maintenir par le biais d’écrivains américains d’origine indienne comme John Oskinson, John Joseph Matthews, Creek d’Arcy Mc Nickle, Luther Standing Bear, Charles Eastman, Black Elk et finalement connaitre un revival avec l’apparition des mouvements « new age » et écologistes.
A force de persévérance et d’actions coups de poings à fort retentissement médiatique, les Indiens saisissent l’occasion de défendre leurs droits et obtiennent une reconnaissance aux Nations-Unis ainsi qu’à l’OMS, ou l’OMPI.
Outre une certaine indépendance, plus prosaïquement, l’autorisation d’implanter des casinos sur les réserves indiennes va également laisser présager enfin des perspectives économiques.
En conclusion, malgré un aspect assez austère et l‘accumulation de textes souvent juridiques, « Voix indiennes, voix américaines, les deux visions de la conquête du Nouveau Monde » est un ouvrage très intéressant permettant d’éclairer la face sombre de la Conquête américaine et plus particulièrement celle de l’Ouest.
On ne peut que ressentir du dégout et de la gêne en voyant ce que les colons blancs ont fait aux autochtones, avec sous le couvert d’un respect apparent nimbé de légalité, une politique de domination ultra violente ne laissant aucune place à l’autre.
Aujourd’hui il paraitra pas exagéré de parler de crime génocidaire tant les colons ont pour imposer leur propre culture (christianisme, mercantilisme, urbanisation) tenté de détruire celle des peuples locaux.
Le désastre s’étale donc, page après page et ne rend que plus poignant les textes d’Indiens éduqués tentant de protester par les voies juridiques du « système » colonial ou ceux plus poétiques d’écrivains rendant hommage au style de vie libre et proche de la nature des Indiens.
Je ne peux donc que recommander à tous la lecture de ce livre essentiel, ne serait ce que pour apprendre à respecter ceux qui sont souvent réduits aux rôles de « méchants » dans les westerns.

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