Born again (Black Sabbath)

 



En 1983, Black Sabbath se brouille de nouveau avec Ronnie James Dio et s’est donc un groupe passablement amputé qui se met en cherche d’un nouveau chanteur capable de sauver un navire prenant l’eau de toute part.

Le choix des vieilles gloires du heavy metal se porte sur un autre dinosaure du genre, le chanteur Ian Gillan, ex légende du micro ayant signé quelques uns des plus fameux disques des années 70 avec Deep Purple.

L’association des superstars donne naissance à un affreux bambin aux allures de Hellboy avant l’heure « Born again ».

Passé le choc initial de l’horreur de la pochette, l’accouchement débute avec « Trashed », titre très rapide, très rentre dedans ou la voix d’un Gillan hurlant dans les aigus étonne franchement.

Puis « Stonehenge » un court instrumental à l’ambiance mystique réussie, lance le très malsain « Disturbing the priest » ou les cris de sorcière de Gillan se superposent avec plus ou moins de bonheur à une structure musicale bien alambiquée.

Un nouvel instrumental assez quelconque, « The dark » introduit le long et sinueux « Zero the hero » véritable réussite avec ses riffs rouleaux compresseurs et son chant plus sobre.

On reste dans la vivacité avec le très nerveux et jouissif « Digital bitch » ou la synergie voix/vélocité semble ici parfaitement fonctionner pour envoyer une cinglante gifle venant rougir la face médusée d’un auditeur peut être un peu somnolent.

Mais Black Sabbath ne serait pas ce qu’il est sans ses longs morceaux sombres et complexes ou l’émotion vous étrangle en une étreinte fatale, ainsi « Born again » longue power ballade mélancolique de plus de six minutes séduit invariablement par ses qualités mélodiques et ses brusques poussées de lave en fusion sortant du gosier de l’ex Purple.

On se réveille gentiment avec l’anecdotique « Hot line » qui avec son mid tempo hard rock, ressemble plus à du Deep Purple qu’à du Sabbath avant de finir sur le chaleureux « Keep it warm » idéal pour réchauffer une foule en concert.

En conclusion, alors qu’on aurait pu craindre le pire compte de tenue de la différence de style entre Black Sabbath et Deep Purple, le recrutement de Ian Gillan donne naissance à un album certes par un instant bancal et décalé mais recelant tout de même quelques titres de heavy metal au punch redoutable.

Avec sa voix haut perchée (pas encore détruite par les abus en tout genre) et sa puissance phénoménale, Gillan bouscule en effet le Sab déclinant de Iommi et lui injecte une bonne dose d’énergie revitalisante.

Malgré un son rêche et peu travaillé qui lui donne un coté un peu daté, « Born again » peut être considéré comme une curiosité exotique, un album quasi expérimental avec comme postulat de départ la greffe de la tête de Deep Purple sur le corps à demi mort de Black Sabbath.

Le résultat hybride ne convaincra personne sur la durée tant le coté plus sombre, lourd et introspectif du Sabbath Noir se mariera fort mal avec un chanteur aussi solaire et explosif que Gillan.

Ainsi pour les albums suivants, la valse des chanteurs se poursuivra, avec pour effet d’enfoncer le groupe dans une période toujours plus instable ou sa créativité se dissoudra lentement.

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