Dehumanizer (Black Sabbath)

 



Après le Black Sabbath de la fin des années 70, celui presque aussi méconnu des années 90.

Durant les années 80, la valse ininterrompue de chanteurs au sein du groupe aboutit au recrutement de Tony Martin, qui malgré de louables efforts n’arriva jamais à la hauteur d’un Dio, d’un Hughes ou d’un Gillan.

Avec cet honnête tâcheron de Martin, la musique de Black Sabbath se délite, le groupe se décompose, le batteur  Bill Ward et le bassiste Geezer Butler quittent le navire et il ne reste bientôt plus que Tony Iommi pour continuer une route bien chaotique.

C’est donc dans ce contexte très difficile que le talentueux guitariste accepte de mettre son énorme ego de coté pour refaire appel à Ronnie James Dio au chant.

Butler revient également, Vinnie Appice est embauché comme batteur et c’est avec bien meilleure allure que Black Sabbath sort « Dehumanizer » en 1992.

Malgré sa pochette d’une laideur absolue évoquant les plus mauvaises couvertures de Megadeth, « Dehumanizer » propose un concept a priori alléchant et visionnaire pour l’époque, l’extinction de l’homme dominé par une nouvelle religion technologique, celles des ordinateurs.

Rentrant de plein pied dans le concept,  « Computer god » lent, sans ame et pataud ne parvient qu’à décoller brièvement que sur son court break mélodique et sur une accélération finale trop tardive.

On passe vite à autre chose avec « After all (the dead) », tout aussi lent et peu fluide.

Les éléments pesants et menaçants sont bel et bien présents mais pas le feeling magique pour les agencer ensemble.

Après ses deux échecs flagrants, le groupe tente une brève révolte avec « Tv crimes » , heavy metal rapide et enlevé, avant de nouveau s’enliser sur « Letters from earth » terriblement lourdingue puis sur « Masters of sanity » sur lequel le chant lyrique de Dio ne parvient pas à masquer le manque d’inspiration de la musique.

Les riffs plus accrocheurs de « Time machine » ne suffisent pas à produire rien d’autre qu’un titre de heavy metal bien moyen.

Difficile également d’adhérer au poussif « Sins of the father » qui manque cruellement de vivacité.

Dio joue enfin sur le formidable coté émotionnel de sa voix sur la ballade « Too late »  et même Iommi semble par instant retrouver par instant la finesse de son toucher.

Mais l’accalmie est de courte durée, car si « I » possède quelques qualités, il ne parvient pas à faire oublier ses très longues cinq minutes tour comme le final « Buried alive » fossoyeur des derniers espoirs de l’auditeur.

En conclusion, « Dehumanizer » est pour moi, malgré le retour de Dio, un album raté.

Désirant se doter d’un son plus moderne et massif en rapport avec les canons de l’époque, Black Sabbath épaissit sa musique pour en faire un sous produit heavy metal trop carré et manquant cruellement d’âme.

Tous les titres dépassent les quatre minutes et trop linéaires, produisent une monumentale impression d’ennui.

Comme contaminé par ces mauvaises vibrations, même Dio chanteur que j’admire pourtant beaucoup assure le minimum syndical au micro et ne met pas assez en valeur le potentiel mélodique de sa voix.

Manquant de variété, de vitesse et tout simplement d’inspiration, « Dehumanizer » ressemble à une énorme coquille vide ou l’âme du grand Sabbath se serait définitivement envolée.

Déshumanisé dites-vous ?

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