Le temps du twist (Joël Houssin)

On ne le sait pas forcément encore assez mais  Joël Houssin est un grand écrivain.
Paru en 1990 soit un an après le déjà remarquable « Argentine », « Le temps du twist » est un authentique roman de Science-Fiction se démarquant franchement des autres œuvres de l’écrivain.
L’histoire se situe au XXII ieme siècle après Jésus Christ dans un futur comme souvent sombre ou les hommes sont devenus alcooliques pour se protéger des effets d’un rétrovirus qui les transforme en zombies amateurs de viande.
Désespéré par ce monde sans avenir, le jeune Antonin Hofa n’a qu’une idée en tête, perdre son pucelage et se suicider le jour de ses seize ans.
Aiguillonné par son désespoir, Antonin fréquente un club de jeunes rebelles dirigé par 42-Crew, génial pirate informatique qui leur permet de franchir tous les systèmes de sécurité pour réaliser d’audacieuses virées nocturnes notamment au Temps du Twist, luna park virtuel crée par l’imagination débridée du jeune hacker.
L’un des actes les plus réussi de 42-Crew est d’avoir détourné OFF un robot androïde adepte d'une nouvelle religion chargé de les infiltrer, pour en avoir fait un rebelle déjanté.
Alors que Antonin a rendrez vous pour perdre son pucelage avec une jeune fille du club, un nouvel arrivant fait son interruption, un richissime jeune homme nommé Orlando.
Orlando séduit rapidement les membres du groupe par son coté rebelle, son érudition en matière de rock et tout particulièrement autour du groupe Led Zeppelin auquel il voue un véritable culte.
Mais malgré sa fortune considérable, Orlando est victime d’une terrible malédiction.
Fils d’un zombie et d’une humaine, il se transforme les nuits de pleine lunes en loup garou aux pulsions incontrôlables.
Orlando invite le club dans sa luxueuse villa truffée de gadgets électroniques et offre à Antonin une de ses voitures de collection, une Buick Electra 225 à l’électronique trafiquée.
Les deux jeunes sympathisent malgré le fort magnétisme sexuel du loup garou qui complexe fortement le timide Antonin.
Mais alors que les adolescents embarquent pour une virée en automobile, la Buick les téléporte dans le passé à l’époque des concerts de Led Zeppelin enregistrés dans la radio.
Commence alors un retour dans le passé fascinant à l’époque des balbutiements du hard rock britannique vers la fin des années 60 et le début des années 70.
Orlando rêve de rencontrer son idole Jimmy Page le guitariste du groupe mais il s’aperçoit que la réalité n’est pas tout à fait conforme à l’histoire réelle et que dans ce monde Led Zeppelin n’existe pas.
En cause, le robot OFF dont le programme religieux fanatique a repris le dessus et qui a provoqué des distorsions temporelles modifiant le passé pour asseoir son pouvoir dans le futur.
La suite du roman est une lutte dans le temps entre le club des adolescents et OFF qui a pris le contrôle de la Buick, transformant les concerts de Led Zeppelin en grande messes religieuses fanatiques.
Les dons en informatique de 42-Crew lui permettent de trouver un moyen de voyager dans le temps par l’intermédiaire d’un dispositif appelé Jokari.
42 se téléporte dans le corps de personnes du passé ou du futur et prend le contrôle de leurs systèmes mentaux pour ainsi se déplacer dans le temps.
L’inconvénient majeur est qu’il doit ensuite tuer les êtres qu’il occupe.
Contre toute attente, tandis qu’Orlando poursuit Led Zeppelin de toute son obsession, Antonin découvre l’amour avec Christina une jeune anglaise possédée par 42.
La fin du roman est constituée de la lutte haletante d’Orlando métamorphosé en loup garou attaquant par voie informatique le système de contrôle de OFF.
Dans ce duel à coup de virus, sondes, leurres, programmes et bits de données codées en langage machine, Houssin fait preuve d’une grande maestria.
En conclusion, « Le temps du twist » réussit le tour de force de réunir les passionnés de culture geek (science fiction, informatique) et de rock dans un plaisant maelström d’imagination débridée.
Bien entendu le thème du voyage dans le temps a déjà été abordé dans le ce type de littérature mais le charme du roman réside pour moi dans l’introduction de la passion délicieusement nostalgique du fan de hard rock des années 70 pour le groupe le plus emblématique de l’époque.
Mais outre Led Zep, d’autres clins d’œils au Doors, au MC5, à T-Rex, aux Beatles, aux Who et aux Rolling Stones sont également présents.
Enfin, « Le temps du twist » se démarque du style habituel de Houssin, moins violent et plus apaisé que dans ses précédent romans « coups de poings ».
Citation forte pour finir : « Orlando avait un discours très véhément sur la cocaïne. Elle était la drogue phare des années 80-90, l’énergie vicieuse du show « Business and Money ». Elle avait transformé une dizaine de générations en piles électriques à cravates, la grande armée du Prêt-à-Consommer, les aficionados de la culture jetable, les réformistes de la survie dorée, les marchands de sommeil et de savonnettes... L’environnement médiatique et la coke avaient concentré la formidable intelligence de ces générations nées dans les années 70 pour des objectifs méprisables et éphémères. (…) Rien n’était alors plus à la mode que le cynisme et la confusion des genres ou toutes les valeurs additionnées équivalaient à zéro. Dans un système ou les créateurs se carbonisaient les neurones pour vendre une lessive, Orlando se demandait pourquoi la cocaïne n’avait pas été rendu obligatoire ».

Commentaires