In utero (Nirvana)

 



Nirvana fut indéniablement pour beaucoup de gens le groupe de rock culte des années 90.

Pour ma part bien que non fan de ce groupe, j ai toujours intéressé par la portée sociologique de son œuvre et trouve intéressant d’analyser prêt de 20 ans après son éclosion, ce qu’il reste de l’héritage musical des chefs de file du  mouvement « Grunge ».

 « In utero » sortit en 1993 est le troisième et dernier vrai album studio du groupe composé du trio magique avec Kurt Cobain au chant/guitare, Dave Grohl à la batterie et de l’immense (par la taille ! ) Krist Novoselic à la basse.

Complètement dépassé par le succès colossal de « Nevermind » , n’assumant pas son brusque succès, le trio de Seattle sort avec ce disque un album se voulant moins commercial.

Malgré cela « In utero » débute par un « Serve the servants » qui sous de faux air de distorsion recèle un refrain mélodique à la limite de la pop.

La tentative de sabordage apparaît plus présente « Scentless apprentice » beaucoup plus lancinant, pénible et déstructuré.

Malgré cela, ce morceau possède un aspect rêche, sauvage et brut de décoffrage non dénué d’intérêt.

« Heart shapped box » est un authentique tube, typique du meilleur de Nirvana avec cette alternance de belles ritournelles mélodiques (ici les couplets) et de passages plus brutaux (ici les refrains ) ou Kurt Cobain distille tout son mal être.

Ici tout paraît cependant fort bien maîtrisé dans une ambiance glauque et poisseuse  à souhait et la qualité de ce titre me fait penser que « Heart shapped box » aurait tout à fait pu figurer sur « Nevermind ».

Le riff introductif de « Rape me » rappelle celui de « Smells like teen spirit » , le morceau prodigieusement simple et efficace, est peut être encore supérieur à « Heart shapped box » car contenant une intensité et une dose de violence désespérée en plus.

« Rape me » fut d’ailleurs censuré aux Etats Unis en raison de ses paroles provocatrices.

Après ces deux hits anthologiques on redescend vers des choses plus accessibles, « Frances Farmer will have their revenge on Seattle »  malgré la puissance de son riff, paraît douloureux, porté par la voix rauque d’un Kurt Cobain en lutte contre lui même.

Plus douce, « Dumb » révèle par sa magnifique mélodie à fleur de peau le coté touchant dans la personnalité du chanteur.

« Very ape » est un court titre aussi musclé qu’efficace.

Moins structuré et plus défoulatoire, « Milk it » part plus en vrille, avec son alternance de murmures et de hurlements déchirants mais ce chaos ne demeure qu’apparent tant les riffs et la rythmique sont toujours bien en place.

Très rugueux et abrasif, « Pennyroyal tea » parait aussi pénible qu’un accouchement aux forceps.

Plus fluide, « Radio friendly unit shifter » est l’une des plus belles réussites de l’album avec sa bonne dynamique, son refrain puissant et ses guitares aussi lourdes que distordues.

« Tourette’s » a tout du court titre défoulatoire pour expulser toute sa rage et sa souffrance.

« All » qui conclut l’album est le troisième indiscutable tube de ce disque,  superbe mélodie à faire pleurer les filles , voix cassée de rocker-adolescent écorché vif, puis montée contrôlée dans la puissance électrique jusqu’au refrain asséné comme une récompense.

Pas besoin de plus d’explications, toute la raison du succès de Nirvana s’explique avec un titre comme « All ».

En conclusion, « In utero » ne peut être considéré comme un album du déclin ou d’un prétendu suicide commercial.

Son aspect parfois faussement chaotique ne saurait faire oublier la  terrible puissance rythmique du duo infernal Grohl-Novoselic et les riffs bien trempés de Cobain qui assurent à l’ensemble une cohérence d’acier.

Eléments importants à cette thèse, les trois ou quatre indiscutables hits du disque qui sans avoir l’impact d’un « Smells like teen spirit » suffiront à assurer des excellentes ventes à « In utero ».

Alors oui Cobain était sans doute bien fatigué, au bord du précipice puisqu’il se suicidera l’année d’après mais a vrai dire peu de choses le laissent supposer à l’écoute de ce disque.

Aujourd’hui Dave Grohl obtient un succès honorable avec son groupe de rock Foo Fighters montrant qu’il excelle non seulement à la batterie mais aussi à la guitare et au chant.

Pourtant le plus ahurissant à mes yeux est que les parties guitare/voix furent entièrement laissées à Cobain dans Nirvana ce qui en dit long sur le génie du blondinet dépressif.

Cobain possédait assurément une forme de génie dans le songwritting et dans la mélodie, ensuite les émotions passant dans sa voix d’être humain fracassé par le poids de la vie faisaient le reste.

Le succès phénoménal de ce groupe fut donc en un sens logique et « In utero » est non seulement un très bon album de Nirvana mais dans l’absolu un très bon album de rock.

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