Confess (Rob Halford)
Fan de Judas priest depuis plus de vingt-ans, je savais que tôt ou tard je lirai la biographie de Rob Halford sobrement intitulée « Confess ».
Dans cet ouvrage sorti en 2021, Rob Halford âgé de 70 ans à présent se raconte comme jamais, en commençant par son enfance à Walsall, banlieue ouvrière de Birmingham. Fils d'un père ingénieur, Rob grandit au milieu des fonderies des Midlands et demeure marqué à jamais par leur vacarme assourdissant ainsi que par les puissantes effluves toxiques qu'elles dégageaient.
A la maison dans une atmosphère post Seconde guerre mondiale, on vit plutot correctement, mais les disputes éclatent souvent entre les parents et certains soirs les coups pleuvent sur madame Halford.
Bon élève, Rob décèle très tôt un talent quasi inné pour le chant lors d'un exercice de chorale mais se sent également différent des autres enfants car rapidement plus attiré par ceux de son sexe.
Tenté d'abord par le monde du théâtre, Rob bifurque ensuite vers la musique. Comme beaucoup de jeunes anglais, les Beatles le fascine. Adorant prendre la lumière, il joue dans deux groupes amateurs locaux Lord Lucifer puis Hiroshima tout en travaillant à mi-temps dans une magasin de vêtements qu'il finit par racheter.
Lassé des formations sans avenir, Rob saisit l'opportunité de rejoindre un jeune groupe local, Judas priest, par l'intermédiaire de sa sœur Sue qui sort avec le bassiste Ian Hill.
Le feeling passe bien avec les autres membres, Kenneth Downing le guitariste et John Hinch le premier éphémère batteur et le groupe commence à tourner localement. La présence d'Halford, puis d'un second guitariste Glen Tipton et quelques compositions originales leur permettent de se faire suivre par un Dave Corke un manager roublard qui leur décroche un contrat chez Gull records.
Avec le recul, le premier album « Rocka rolla » est une déception : la production n'est pas à la hauteur des espérances du groupe et l'artwork est jugé ridicule. Sans promotion, l'album est un échec.
Mais Judas priest s'accroche. Rob lâche son job de vendeur, emménage dans une sorte de « coloc » avec deux amis gays comme lui et se donne à fond dans la nouvelle voie qu'il s'est choisie.
Disque après disque, Judas qui a trouvé en la personne de Dave Holland le batteur qu'il attendait, s'affirme et gagne du terrain, jouant en Angleterre puis en Europe.
Les premières tournées dans un vieux van hors d'age sont épiques et Rob n'est pas avare en anecdotes quitte à ne pas se mettre forcément en valeur.
Très tôt comme beaucoup de jeunes anglais de son milieu, Rob confesse un penchant plus qu'affirmé pour l'alcool et termine souvent les soirées, comme les autres membres du groupe, ivre mort.
Avec « Killing machine » et ses hits « Take on the world » « Evening star », le groupe accède aux télévisions anglaises et accroit encore son audience pour pouvoir tourner à l'international, ce qui donnera naissance au mythique « Unleashed in the east » faussement enregistré « live » au Japon mais en fait en studio en raison de l'épuisement d'Halford à cette époque.
Mais l'explosion a lieu avec « British steel » plus compact, dur et efficace que les disques précédents.
Outre la qualité sans faille des titres, le look de motard cuirs SM inspiré du milieu gay produit forte impression sur scène et donne naissance à l'imagerie si forte de Judas priest.
Avec le contrat avec la major CBS depuis leur troisième album, l'argent finit par affluer et la tournée américaine qui suit confirme la montée en puissance du groupe.
En parallèle Halford souffre le martyr dans sa vie privée, cachant son homosexualité pour ne pas compromettre la carrière de Judas. Rob raconte alors ses virées glauques dans les toilettes publiques des relais routiers aux États-Unis et sa peur d’être vu dans les boites gays.
Malgré le faux pas de « Point entry » le Priest est irrésistible au début des années 80 et remplit des salles de 25 000 personnes aux États-Unis, participant même à de gigantesques festivals tels le « Live aid » contre la famine en Ethiopie.
Les anecdotes d'enregistrements débridées à Ibiza ou au Bahamas avec leur producteur fétiche Tom Allom ne manquent pas, Rob souffrant le martyr en raison d'une relation amoureuse toxique avec Brad, un ex militaire américain vivant à ses crochets et l'entrainant vers une consommation de cocaïne non contrôlée.
Le fond est touchée avec le très controversé « Turbo » avec un Rob obligé d'entrer en cure de désintoxication après avoir fait une tentative de suicide.
Revenu des bas-fonds, Rob remet de l'ordre dans sa vie et se promet de ne plus boire ni se droguer.
Il tient sa ligne de conduite et constate avec bonheur qu'il est encore plus performant « à jeun ».
Le suicide de Brad est un coup terrible mais Rob renoue après avoir fréquenté un Marines, se remet avec un fan rencontré lors d'un concert du Priest.
Traversant la tempête judiciaire d'accusation d'incitation au suicide après que deux adolescents américains se soient donné la mort en écoutant leur musique, Judas Priest produit son album le plus extrême « Painkiller » qui deviendra en quelque sorte LA référence de leur répertoire.
Mais les tensions internes entre KK et Glenn ainsi qu'une mauvaise interprétation du désir d'Halford de monter un projet solo aboutiront à son éviction brutale du Priest.
Installé à Phoenix, Rob montera Fight avec des musiciens de la scène locale et obtiendra un bon succès sur le premier album avant de décliner ensuite, puis de se planter commercialement avec son projet de metal industriel Two, pourtant patronné par le pape du genre, Trent Reznor.
C'est alors que sous son propre nom il sortira un, puis deux albums de heavy metal faisant un appel du pied à Judas Priest qui sombrait hélas de son coté dans la seconde division du métal avec son remplaçant Tim Owens.
La réconciliation se fera par
l'intermédiaire de Ian Hill qui faisait toujours partie de la
famille, puis des nouveaux albums verront le jour, chacun produit
avec fierté par Halford, notamment le (pour moi) surestimé
« Firepower », avec Faulkner à la place de Downing,
parti furieux.
Pour finir, Rob s'épanchera sur la perte de son père, puis de sa mère et enfin la maladie de Parkinson dont est atteint Glenn Tipton, ce qui le rend progressivement inapte à jouer de la guitare.
Bien que basé surtout aux États-Unis (Phoenix, Los Angeles) ou il vit en couple avec Thomas, Halford reste très attaché à ses racines « prolo » anglaises.
En conclusion, « Confess » est un livre à cœur ouvert sur l'une des personnalités les plus influentes, charismatiques et attachantes du heavy metal.
Le destin de Rob Halford, petit gars d'un banlieue ouvrière minable de Birmingham, paraît en effet incroyable mais la gloire, les millions de disques vendus et autant de personnes venant assister à ses concerts ne parviennent pas à masquer une certaine fragilité.
La question de l'homosexualité est en effet centrale dans cette confession et met en avant les parties les plus glauques de la vie d'Halford avec des pratiques sexuelles « à risques », l'alcoolisme et la drogue.
Pourtant, malgré des relations masculines douloureuses et des amours déçus, Halford parviendra finalement à trouver un équilibre avec la bonne personne.
Mal à l'aise face au mal-être ténu semblant l'entourer, j'ai été en revanche impressionné par l'ascension inéluctable de Judas priest dans les années 70 puis 80 avec une conquête du marché américain sur lequel il est (au moins) aussi populaire qu'en Europe.
Une autobiographie « thrash » donc mais aux forts relents de sincérité !
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