Soul on fire (Jeff Wagner)

 



Bien que non fan à la base de Type O Negative, la mort de Peter Steel fut un grand choc que je découvris plusieurs années seulement après la date de 2010.

Aussi la biographie « Soul on fire » publiée en 2014 par le journaliste spécialisé Jeff Wagner constitue un travail intéressant pour qui veut se plonger dans la vie d'une des personnalités les plus marquantes du « metal gothique ».

Né en 1962 à New-York, Peter Ratajczyk est le dernier et seul garçon d'une famille jusqu'alors composée de 5 sœurs.

La famille emménage très tôt dans le quartier juif de Brooklyn et Peter gardera un attachement viscéral à la maison des Ratajczyk.

Peter grandit dans une ambiance de tolérance, de grande ouverture musicale. Son père, un colosse travaillant dans les chantiers navals lui inculque des valeurs de droiture et de travail.

Mais rapidement il se distingue par un physique hors norme. Sa taille (qui culminera à plus de 2m) le complexe d'autant plus que son caractère est plutot doux et introverti.

Mal à l'aise avec les autres enfants qui voient en lui un souffre-douleur, Peter se replie sur lui-meme et trouve dans la musique une passion dévorante. Il apprend la basse au prix d'un travail solitaire obsessionnel.

Prenant comme héros les Beatles et Black sabbath, il monte avec des voisins un premier groupe Fallout qui connait un succès d'estime local.

Sur les cendres de Fallout naitront Carnivore un groupe à l'imagerie « Mad Max » très agressive qui obtient un contrat avec Roadrunner.

Inspiré par le « Thrash metal » et des paroles apocalyptiques, Carnivore sort un premier album puis bifurque vers la mouvance « Hardcore » qui grandissait à Brooklyn durant la même époque.

Les groupes se fréquentent et Peter sympathise avec Agnostic Front, Biohazard ou Life of agony.

Mais Peter qui a pris Steel comme nom de scène, est en réalité un timide maladif qui adore composer dans son antre de Brooklyn mais se montre très angoissé à l'idée de monter sur une scène.

N'envisageant pas une seule seconde de devenir une rock star internationale, Peter obtient un diplôme en histoire et sciences et se trouve un travail comme employé des espaces verts de Brooklyn, qui lui permet d'assouvir sa passion pour la nature.

Dans la musique, Peter se montre difficile. Perfectionniste, psychorigide, il impose ses idées à ses collègues et s'oppose fréquemment à sa maison de disques lorsqu'il estime que ses intérêts ne sont pas bien représentés.

Après deux disques, Carnivore s'éteint en 1987. Peter recontacte le guitariste Kenny Hickey, le claviériste Josh Silver,le seul amène de faire contre-poids à sa présence écrasante et les deux compères montent Type O Negative.

Leur premier album « Slow, deep, hard » sorti en 1991 contient de fortes réminiscences « thrash/hardcore ». Les paroles provocatrices de écrites par Steel attirent des ennuis au groupe lorsqu'il se produit en tournée en Europe. Accusé de racisme, fascisme et misogynie, Type O Negative doit annuler plusieurs dates sous la pression de menaces de groupuscules d’extrême gauche.

Mais la controverse a un effet positif sur les ventes de l'album.

Adepte de musculation, Steel se forge un physique impressionnant qui contraste avec sa timidité et un mal-être profond. Obligé de boire du vin avant et pendant ses prestations, il connait également des déceptions amoureuses qui le font cruellement souffrir.

C'est en 1993 que tout bascule. Changeant complètement d'orientation, Type O ralentit sa musique et s'oriente vers un « goth metal » lourd et sensuel, servi par l'incroyable voix de basse du chanteur.

Mélange de metal et de pop, l'album « Bloody kisses » devient un succès mondial servi notamment par « Christian woman » et « Black n°1 ».

Steel qui s'est fait posé des crocs de vampire en implants devient un sex-symbol et se plait à poser en érection dans « Playgirl » un magazine pour fille, lu majoritairement par des gays.

Le succès arrivant, il doit délaisser l'emploi qu'il adorait et devenir pro. La notoriété et les tournées incessantes épuisent cet introverti.

La suite est classique, Steel tombe dans la cocaïne, dépense sans compter, nourrissant les parasites autour de lui, notamment des petites amies intéressées qui lui font beaucoup de mal.

Lorsqu'il perd son père, ancrage de sa vie, le géant vacille et sombre dans la dépression.

Ce mal le ronge et la drogue accentue sa paranoïa. Malgré d'autres albums marquants qui installent Type O comme un des groupes majeurs des années 90 (« October rust », « World coming down »), Peter se néglige et glisse sur une pente néfaste.

Passant d’hôpitaux en hôpitaux, il ne parvient ni à se défaire de ses addictions, ni à sortir de la dépression.

Lorsque sa mère adorée décède en 2005, il s'isole avec ses chats et sa drogue...et fait même un séjour en prison après l'agression du mari d'une ex petite amie et un scandale en pleine rue.

Lors des dernières années de sa vie, Peter cherche une rédemption par la religion. Il quitte Brooklyn et redevient catholique. « Dead again » le dernier album du groupe est le fruit de ce nouveau mysticisme.

Alors qu'il devait revenir à New-York en 2010, Peter se plaint de violentes douleurs au ventre et décède une nuit, l'intestin perforé.

La mort du « géant vert » est une perte pour l'ensemble du monde du métal et beaucoup de ses proches se trouvent encore aujourd'hui par sa disparition.

En conclusion, j'ai dévoré « Soul on fire » tant la vie de Peter Steel contient pour moi toutes les composantes d'un personnage de roman.

Géant torturé, introverti mal à l'aise dans un physique qui ne lui convenait pas, Peter Steel était un artiste visionnaire, excentrique et hyper sensible dont l'humour provocateur masquait souvent la fragilité.

Son aspiration à une vie paisible dans la maison familiale de Brooklyn et à un travail stable aux espaces verts, contrastent avec la folie des vies de rock stars, qui ne lui convenaient pas et qui ont sans doute accéléré sa chute.

« Soul on fire » est également un ouvrage fascinant sur la maladie, la dépression et l'impossibilité de s'en sortir avec des traitements médicamenteux habituellement prescrits.

Malgré ses excès et un comportement souvent difficile, Peter Steel était un être attachant, généreux et attentif à son prochain auquel le livre de Jeff Wagner écrit avec rigueur et passion, rend justice et complète l’œuvre musicale, qui elle perdurera.

Commentaires

  1. Pour les fans, en suivant ce lien, vous aurez accès au site de la famille de Peter : http://fortheloveofpetesteele.blogspot.com/

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