C'est à Alger (Fellag)

 



Après son premier roman en 2001, Fellag sort en 2002 « C’est à Alger » construit toujours sur le même modèle de courte nouvelles.
Ici il est question de la terrible guerre civile qui ensanglanta l’Algérie durant les années 90, mais ce drame contemporain préfigurant déjà la montée de l’islamisme radical est ici traité comme un arrière plan menaçant.
Dans la première nouvelle écrite en 1975« La théorie des dominos », Mourad un simple citoyen algérois est enlevé brutalement un beau jour et soumis à d’intenses séances de tortures psychologiques et physiques avant de comprendre que ces bourreaux ne lui reproche que d’avoir ri en public à une plaisanterie sur le régime.
Dans la seconde, écrite en 1992, on bascule dans l’onirisme le plus total avec Farid un jeune artiste approché par Momo un djinn perse pour devenir à son tour immortel et assurer la survie de l’espèce humaine, salement malmenée en ces jours de massacres aveugles.
Classiquement, dans « La balle », deux copains d’enfance Kamel et Nordine se retrouvent face à face dans une bataille rangée entre terroristes islamiques et soldats.
Leur histoire commune, fortement similaire, est évoquée au moment ou la balle sort du canon de l’arme du soldat avant de tuer son ami.
Mais l’issue est pour les deux, la même : la mort.
Ecrit en 1997, « Allo ! » est une vibrante lettre d’amour d’une jeune algérienne diplômée en droit à son amant, accompagnée de réflexions et critiques sur la condition de la femme, déplorable en Algérie.
Dans l’ultime nouvelle, plus récente, on suit le parcours parallèle d’Hocine émigré algérien en galère dans le froid et la dureté New-Yorkais et de son passé, douloureux à Alger avec la peur permanente de faire partie de la prochaine fournée d’amis intellectuels (ou non) assassinés.
Malheureusement pour lui Hocine est pris par la police après que les tours du World Trade Center se soient effondrées…
En conclusion, j’ai sans doute bien fait de persévérer après le désastreux « Rue des petites daurades » car « C’est à Alger » fait preuve d’une belle profondeur et d’une maturité bien supérieure.
Fellag aborde ainsi tous les aspects de la guerre : la peur de se faire enlever, torturer et assassiner par les deux camps sans motif apparent, la pression sur la population interdite de libre-pensée..
Les cibles ? Comme souvent les intellectuels, les artistes…et les femmes cible particulières des islamistes.
Pour lutter, Fellag n’emploie pas ici l’humour mais fait appel à des descriptions acérées, des structures abouties et joue sur l’émotion viscérale des protagonistes…
Le résultat, aussi impressionnant que glaçant, s’apparente à un cauchemar éveillé que bien peu d’hommes seraient amènes de supporter sans perdre la raison.

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