Contes fantastiques (Guy de Maupassant)

 



Découverte d’une autre facette du talent de Guy de Maupassant avec l’intégrale de ses « Contes fantastiques » regroupant 34 courtes nouvelles traitant d’un domaine ou on ne s'attendait pas à trouver forcément l’un des plus écrivains français.

Ecrites entre 1880 et 1890, ces œuvres marquées par le sceau de l’étrange voient Maupassant marcher sur les traces d’Edgar Poe et de Charles Baudelaire pour dévoiler une face plus sombre et mystérieuse de sa personnalité complexe.

Bien entendu, compte tenu du nombre important de textes proposés ici, on ne peut pas dire que tout soit au même niveau d’aboutissement.

Maupassant aborde donc le thème de l’horreur pure avec des histoires de mains de défunts cherchant à venger leur maître (« La main d’écorché », « La main » ) , d’esprits voleurs de meubles dans « Qui sait ? » ou possédant des gens dans « Le conte de Noël ».

Il le fait bien mais sans égaler ses illustres maîtres.

Les thèmes pseudo scientifiques sont également traités que ce soit avec « Magnétisme » , « Un fou »  ou « L’homme de Mars » plutôt décevants car superficiels.

Pas grand chose à dire non plus sur la traditionnelle fascination des écrivains pour les drogues dans « Rêves » ou pour les félins dans « Sur les chats » .

Un court hommage est rendu aux théories philosophiques de Pythagore dans « Heraclius Gloss » et à Arthur Schopenhauer dans « Auprès d’un mort ».

Maupassant est en revanche plus convainquant lorsqu’il nous entraîne dans des atmosphères naturellement angoissantes comme les solitudes enneigées de « L’auberge », les crises de paniques nocturnes de « La nuit » ou brumeuses de « Sur l’eau ».

L’auteur prend une toute autre dimension lorsqu’il flirte avec des thèmes plus profonds comme les fantasmes nostalgiques autour de portraits d’être absents « Le portrait », « A vendre », d’une chevelure , « La chevelure », l’impossibilité d’aimer toutes les femmes qu’il compare à des fleurs dans « Un cas de divorce » ou qu’il traque en vain dans « Une inconnue », le suicide avec « l’endormeuse » ou de la mort « La morte » déchirant d’émotion.

Le summum artistique est pour moi atteint avec les nouvelles traitant de la folie, comme « Madame Hermet » abasourdissant de puissance psychologique avec l’effondrement mental d’une mère ayant lâchement abandonné son fils atteint de petite vérole, ou les deux versions du  « Horla », véritables bijoux de schizophrénie ou l’auteur imagine la présence d’un être invisible, maléfique, prédateur surnaturel de l’homme buvant son âme la nuit à la manière des vampires du Brésil.

En conclusion, ces « Contes fantastiques » m’ont agréablement surpris et ont révélé pour moi la part intime de souffrance de Maupassant retranscrite  ici sous la forme de métaphores fantastiques.

La quête perpétuellement inassouvie des femmes,  la hantise du souvenir, de la maladie menant à la folie, à la déchéance puis à la mort sont pour moi les thèmes dominant des ces œuvres.

Maupassant n’est pas meilleur que Poe ou Baudelaire pour nous effrayer dans le registre de l’horreur pure mais demeure redoutable pour nous troubler et nous émouvoir par l’absolue légèreté et subtilité de son style.

Ses contes d’un homme malade et torturé sublimant sa douleur par l’écriture ne sauraient donc laisser quiconque insensible.

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