Marlon Brando (Patricia Bosworth)


 Considéré avec raison comme le meilleur acteur de tous les temps à égalité avec le redoutable Clovis Cornillac, Marlon Brando m’a depuis toujours fasciné, aussi est-ce avec délectation que j’ai lu sa biographie écrite au début des années 2000 par Patricia Bosworth « Marlon Brando ».

De manière très classique mais sérieuse, la biographie relate par ordre chronologique la vie de l’acteur en insistant fortement sur la composante familiale principal levier déclencheur des velléités artistiques de ce jeune homme né en 1924 au Nebraska.

Car le jeune Marlon est issu d’une famille plutôt particulière avec un père d’origine alsacienne (Marlon Brando Sr) représentant de commerce, autoritaire, buveur, coureur de jupon, en proie à des accès de brutalité inouïs qui terrorisent sa famille et surtout sa mère Dorothy dite Dodie.

Marlon entretient une relation quasi fusionnelle avec sa mère, femme indépendante, actrice talentueuse mais qui frustrée par la vie que lui impose son mari se réfugie dans une terrible dépendance à l’alcool.

Le couple Brando se dispute souvent en des bagarres d’ivrognes, se sépare un court moment avant de se ressouder.

Mais l’éducation très libérale de Dodie donne à Marlon le gout des milieux artistique.

Elève médiocre, paresseux, incapable de se concentrer sur la durée et de se plier longtemps à l’autorité, Brando a une personnalité hors du commun et de véritables dons pour la comédie qui se révèlent précocement par l’intermédiaire d’un professeur de théâtre à l’école des cadets militaires de Shattuck.

Réformé, Brando tente sa chance à New York et prend des cours de théâtre auprès de l’école réputée de Stella Adler.

Outre le théâtre classique, il s’initie à l’escrime et à la danse.

Malgré son indiscipline, il devient vite en raison de ses dons le favori de la directrice, qui entretiendra une liaison ambigüe avec son élève.

Repéré par les metteur en scène Elia Kazan, Brando triomphe au théâtre dans la pièce « Un tramway nommé désir » de Tennessee Williams.

L’incroyable présence de l’acteur dans un rôle pourtant contre nature ou il doit jouer un prolétaire macho dans une ambiance moite et scandaleuse, attire de façon magnétique les spectateurs.

Parallèlement à cela, Brando mène une vie de bohème à New York, fréquentant des intellectuels, des paumés et ayant de multiples maitresses qui du reste acceptent de partager le bellâtre surdoué.

Devant l’incroyable succès de cette pièce, une adaptation cinématographique est réalisée par le talentueux Elia Kazan qui sera le mentor et le père de substitution du Brando des jeunes années.

Grandement aidé par la performance inoubliable de Vivian Leigh, l’adaptation de Kazan réussit à surpasser la pièce de Williams.

De plus le réalisateur pousse son élève à pratiquer boxe et musculation pour augmenter sa virilité.

Teint en brun, moulé dans des jeans et tee shirts très serrés, le corps d’athlète de Brando dégage une force brutale contrastant avec la douceur de son visage d’ange mélancolique.

Il vampirise l’attention et devient une star doublée d’un sex symbol.

Les autres grands moments de la carrière de la star sont abordées, avec la consécration, l’oscar pour « Sur les quais » toujours avec Elia Kazan puis le rôle de motard qui fit de lui le voyou le plus sexy du monde et l’idole des jeunes avec « L’équipée sauvage » de Laslo Benedek.

Parallèlement à cela outre ses problèmes familiaux, Brando père une vie complètement dissolu et sème les enfants auprès de ses multiples femmes et maitresses.

Il épouse une américano-indienne Anna Kashfi puis l‘actrice Movita Castadena rencontrée sur un tournage au Mexique, et ces mariages seront de véritable naufrage comme Brando est trop instable pour être un bon père.

On peut néanmoins considérer que Tarita Teriipaia rencontrée en Polynésie française lors du tournage du calamiteux remake « Les révoltés du Bounty » est la femme la plus marquante de sa vie puisqu’elle lui donnera deux enfants et le poussera à acheter une ile à Bora Bora pour s’y retirer dans une quête de solitude absolue.

Dans les années 60, Brando fonde sa propre maison de production qui mal administrée par son père fera faillite, puis il se brouille avec Kazan qui a soumis à la pression du Mac Barthisme a du dénoncer des sympathisants communistes.

Brando se politise, prend la défense des minorités afro-américaines et indiennes.

Après l’assassinat de Martin Luther King il soutient même les Black Panthers avant de se retirer, refroidi par leur radicalité.

Acteur réputé ingérable et sur le déclin, Brando revient en grâce en 1972 par son incroyable prestation du « Parrain » de Francis Ford Coppola.

Il refuse pourtant de venir chercher son oscar et en état de grâce tourne avec Bertolucci le sulfureux « Dernier tango à Paris ».

Le dernier grand rôle de Brando sera lui aussi donné par Coppola en 1978 dans son fameux délire mystique d’ « Apocalypse now ».

Ensuite, l’acteur rongé par ses déboires familiaux, se laisse aller, prend du poids et se reclus dans la solitude de sa maison à Beverly Hills.

Le suicide de sa splendide fille Cheyenne après que son demi frère Christian ait assassiné son petit ami, accentuera cette longue phase dépressive.

En conclusion, « Marlon Brando » est un très bon livre, sérieux et bien documenté, idéal pour saisir les grandes lignes de la vie privée et professionnelle de l’acteur.

Véritable écorché vif, Brando apparait comme s’étant construit par opposition avec son père, envers qui il voulait sans cesse prouver quelque chose.

Ce rapport d’amour et de haine entre deux personnalités très forte, hantera Brando même après la mort de son père.

Puis il y a sa mère, symbole d’une féminité idéalisée, mais aussi d’une grande indépendance d’esprit qu’il cultivera toute son existence.

Surdoué, béni des dieux en raison de son apparence physique qui lui faisait séduire quiconque (hommes comme femmes ?) , Brando était en réalité un être sensible, dépressif et hanté par un mal être profond qu’il inculqua sans doute malgré lui à sa progéniture.

On appréciera les anecdotes savoureuses, les dons de mimétismes de l’homme, ses excès, son gout (que je trouve divin !) pour les femmes exotiques, ses engagements quelques fois hasardeux mais surtout ce coté indomptable qui le caractérisa.

Un seul regret, le livre de Bosworth s’arrête quelques années trop tot et ne traite pas des dernières années de Brando, obèse, solitaire et rongé par la mort de sa fille Cheyenne.

Je trouve en effet fascinant que l’homme le plus sexy de tous les temps ait fini aussi misérablement et surtout en enlaidissant son physique parfait.

Les dernières révélations sur sa bisexualité n’apparaissent pas non plus.

Mais « Marlon Brando » réussit à atteindre son objectif et donne envie de se replonger dans la copieuse filmographie de la star, ce qui est pour moi l’essentiel.


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