Un été dans la Sierra (John Muir)

 


Changement radical de climat avec « Un été dans la Sierra » de John Muir.


Ecrivain écossais du XIX ième siècle, Muir a consacré l’essentiel de son existence à des études naturalistes pour satisfaire sa passion pour les montagnes américaines.

Ecrit en 1849, « Un été dans la Sierra » est un carnet de bord jour après jour du voyage de l’écrivain embauché comme gardien de moutons dans la Yosemite valley (Californie), devenu aujourd’hui un des plus grands et beaux parcs naturels des Etats-Unis.

Le périple commence au mois de juin, Mr Delaney le propriétaire d’un troupeau de mouton d’un millier de bêtes, accepte que Muir participe à la transhumance avec certaines largesses d’emploi du temps, permettant à l’écrivain d’assouvir sa soif de découvertes naturelles, la surveillance étroite du troupeau étant dévolue à un véritable berger, Billy.

Aidés par un Indien et un Chinois, les deux hommes commencent leur ascension.

Muir exerce très vite sons sens aigu de l’observation, s’échappant pour de longues expéditions à la recherche de la flore et de la faune qui l’environne.

Il note et recense toutes les espèces d’arbres qu’il rencontre, s’émerveillant devant la hauteur, la beauté et la majesté tranquille des noisetiers, pins, chênes et sapins de la vallée.

On comprend en réalité que Muir a eu à Yosémite une sorte de révélation mystique devant la splendeur du cadre et son émerveillement ne cesse de croitre face aux innombrables forets, montagnes (Hoffman, Cathedral peak), lacs (Tenaya, Mono) et rivières (Tuolumne, Merced) qu’il croise sur son chemin.

Muir ne se lasse pas d’observer les variations infinies des nuages au dessus des montagnes et sous l’effet de violentes pulsions prend parfois des risques en escaladant des roches escarpées pour suivre le cours de rivières tumultueuses finissant en spectaculaires cascades tombant à pic comme à Yosemite et Tamarack creek.

La faune n’est pas non plus oubliée notamment les petits animaux terrestres comme ls fourmis, les lézards, les marmottes et les écureuils qui semblent avoir sa préférence en raison de leur intelligence et de leur vivacité.

Mais le sujet animal numéro un à Yosémite reste l’ours, qui en raison de sa taille et sa qualité de carnivore, représente une véritable menace pour les troupeaux de moutons qu’il décime mais aussi pour l’homme qu’il peut attaquer si il se sent menacé.

Bien aidé par Carlo, le Saint Bernard prêté par Delauney, Muir apprend à ne pas se faire surprendre et se place même en situation de potentiel chasseur avec convenons le peu d’empressement, tant l’empathie qu’il éprouve pour ce « cousin de l’homme » est forte.

Les Indiens qu’il croise en chemin sont aussi source d’intérêt mais si Muir admire leurs capacités à se contenter de survivre avec ce que leur offre la nature : pommes de pins, baies, insectes et lapins, il demeure gêné par leur incroyable saleté et leur gout de l’alcool et du tabac.

Au fil de son ascension, le manque de confort et de nourriture se fait inévitablement sentir et son estomac se révolte face au manque de pain et légumes.

Mais Muir assure que le froid et les privations sont largement compensées par le sentiment de plénitude qui l’étreint face aux merveilles des créations divines qui l’entourent.

Cette extase est loin d’être partagée par son collègue berger, homme trop frustre pour prendre le temps de s’émerveiller et Muir méprise même les touristes bruyants qui selon lui ne prenne pas le temps de lever les yeux pour s’imprégner de la magie des lieux.

Outre cette extase ininterrompue, Muir se préoccupe toute de même de sa tache professionnelle et note la stupidité des moutons, leur instinct grégaire, leur peur panique des traversées de cours d’eau pourtant inévitable, leur manque de stratégie face aux prédateurs, la seule occupation digne d’intérêt pour eux étant de brouter l’herbe des prairies vers lesquels les hommes les conduisent.

Aidés par leurs chiens, Muir et Billy passent beaucoup de temps à courir après les moutons qui s’éparpillent au moindre danger et à veiller auprès d’un feu de camps pour prévenir les attaques nocturnes de prédateurs, loups et ours.

Ces derniers exercent une telle pression par leurs raids qu’ils les contraignent à changer de camps pour arrêter de subir de lourdes pertes provoquées par le piétinement des bêtes paniquées dès qu’un ourse pénètre dans leur enclos.

Il faut souligner également que même armé d’un fusil, l’homme peut s’avérer incapable de faire face à un ours particulièrement agressif et finir par prendre leurs jambes à son cou !

A la fin du mois de septembre, Delauney qui incarne le coté rationnel du récit, finit par demander à son équipe de redescendre dans la vallée afin de ne pas risquer de subir les terribles orages de la fin de l’été.

C’est donc sans trop de pertes par accidents (chute, noyade) ou prédateur, que revient le troupeau dans son ranch d’attache à Tuolumne.

Du coté de Muir, un seul regret, ne pas pouvoir rester plus de trois mois en pleine nature à Yosémite, et la révélation d’un attachement profond, viscéral, mystique à la beauté du parc qu’il défendra bec et ongle toute sa vie afin d’en préserver le beauté et la pureté !

En conclusion, « Un été dans la Sierra » est un ouvrage à recommander à tous les amoureux de la nature et en particulier de la montagne.

On oublie en effet que la Californie ne se réduit pas à San Francisco, Los Angeles et ses plages, mais recèle un trésor naturel, Yosémite park et ses montagnes à plus de 4000 mètres d’altitudes similaires à notre emblème national du Mont blanc.

L’aspect romanesque est ici inexistant, Muir se bornant à tenir un carnet de bord ou il note ses observations minutieuses, ses réflexions intimes et surtout ses formidables élans évoquant la passion que lui inspire la vie en plein air dans les montagnes.

On pourra parfois trouver l’exercice ennuyeux, notamment par son aspect quasi scientifique et trouver fastidieuses les descriptions des innombrables espèces d’arbres du parc auxquelles manque tout de même la plus connue de tous : le séquoia, titan réputé immortel.

Les plus cyniques ricaneront sans doute devant cet énergumène prêt à sacrifier la précieuse civilisation pour trouver la plénitudes intérieure en écumant les bois et sentier en haillons, mort de faim et de froid…

Original, Muir devait sans doute l’être, mais on ne peut que s’incliner devant sa passion communicative et ses qualités de plume…

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