Piranhas (Roberto Saviano)

 



Sorti en 2018, « Piranhas » est le premier roman de Roberto Saviano que j’ai lu.

« Piranhas » utilise le cadre contemporain et familier de l’auteur, la ville de Naples et le quartier de Forcella pour décrire la montée en puissance d’une paranza, un gang de baby mafiosi âgés d’une quinzaine d’années brisant toutes les règles des familles traditionnelles tenant les différents quartiers de la ville.

A leur tête, Nicolas Fiorillo dit Maharaja, est un garçon blond, intelligent et doté d’une ambition aussi malsaine que dévorante, alimentée par les réseaux sociaux et une vision biaisée de Machiavel qui lui fait penser que le monde est divisé en deux classes celle des forts, les « baiseurs » qui règnent par la  violence et les faibles, les « baisés » qui suivent le système comme des esclaves dociles.

Rapidement Nicolas a choisi de faire partie des baiseurs et fédère autour de lui d’autres gamins de Naples affublés de surnoms : Briato, Tucano, Dentino, Drago, Lollolop, Oiseau mou, Jveuxdire, Drone et le plus jeune d’entre eux Biscottino.

Fascinés par la réussite rapide et l’argent facile, la paranza qui s’est initialement rangée sous l’autorité d’un parrain appelé Copacabana, profite du cambriolage du restaurant m’as-tu vu de la ville le Novo Maharaja, pour identifier les coupables et leur faire restituer la marchandise.

Cette opération à hauts risques, qui manque de les faire tuer par des Gitans accusés à tort, leur permet de négocier un carré VIP au restaurant pour se faire connaitre auprès d’une jet set locale mêlant personnalités du show-business et mafieux établis.

Mais le grand rêve de Nicolas est d’être indépendant et de régner, non de prêter allégeance à un parrain et attendre patiemment de gravir les échelons.

Profitant d’une guerre des clans qui laisse l’Archange, Don Vittorio Grimaldi, l’un des vieux parrains reclus dans un minuscule quartier de la ville, Nicolas parvient à l’approcher en faisant pression sur Aucelluzzo, l’un de ses audacieux coursiers virtuose du scooter osant encore s’aventurer hors de la zone pour dealer et obtient qu’il lui fournisse un lot important d’armes pour semer le trouble face à ses adversaires.

Les gamins payent donc des feux d’artifices pour s’entrainer à tirer avec cet arsenal sur les toits de la ville maniant les Uzi, AK-47 et 357 magnum à coups de tutos sur Youtube.

Puis après avoir essayé de tuer sans succès des travailleurs immigrés africains, ils se lancent dans des raids à scooters dans lesquels ils arrosent au hasard les passants et les commerçants, afin de commencer à se faire craindre et donc respecter dans ce milieu.

Mais cela ne suffit pas, même tuer Melon un des dealers du clan adverse ne tourne pas à leur avantage.

Lorsque Crescenzio Ferrara dit Rohypnol, le bras droit d’un plus grands caïds de la ville revient sous haute escorte reprendre possession des places de deal, Nicolas et sa bande y voient une opportunité à saisir, la plupart des autres grands parrains étant affaiblis car sous les verrous.

Ils détournent alors une cargaison d’essence lui appartenant mais Briato et Oiseau mou en payent le prix fort, finissant les jambes brisés.

Nicolas décide donc de faire abattre Rohypnol et utilise alors le petit Biscottino pour approcher son garde du corps et pénétrer chez le parrain et le tuer avec sa femme appelée Gros-cul.

Ensemble, la paranza flambe dans une boutique de soins esthétiques  et sur un yacht, Nicolas faisant l’amour à sa petite amie Letizia alors que ses amis tirent en l’air et dans la mer sous les regards médusés des serveurs.

Mais lorsque Nicolas livre Dumbo à la colère de Scignacane, qui voulait le tuer pour se vanter d’être l’amant de sa mère, le serment de fidélité de la paranza lié par le sang éclate et Dentino furieux du meurtre de son meilleur ami, se venge en assassinant à son tour Christian le jeune frère de Nicolas qui meurt dans la station de métro de Toledo.

Son enterrement est douloureux mais la paranza se tient prête à inonder les rues d’une nouvelle onde de violence pour assoir sa réputation gagnée par le sang et les armes…

En conclusion, « Piranhas » est un roman dur, intense traduisant une certaine réalité des années presque 2020, avec de nouvelles générations nourries très tôt aux jeux vidéo, aux réseaux sociaux, à Youtube, aux films de super héros et qui ne respectent plus aucun code ni hiérarchie traditionnelles.

Pressés de « réussir » selon les critères actuels d’argent et de pouvoir, ces gamins féroces éliminent impitoyablement leurs ainés dépassés et plongent la ville de Naples dans une spirale de violence et de chaos…

Outre son sujet brulant et son style précis, « Piranhas » se montre du reste plutôt ambigu et pourrait laisser à penser à une certaine fascination de Saviano pour son sujet, les « baby mafieux » dont il vante les exploits.

Du reste, le personnage principal du roman, se montre un personnage froid et calculateur idolâtrant Machiavel et non un gamin irresponsable abreuvé de jeux vidéo…ce qui ne cadre pas tout à fait me semble-t-il avec le fond du sujet : la violence incontrôlable de ces enfants mafieux.

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