Une proie certaine (John Sandford)

 


       Hommage à John Sandford avec « Une proie certaine ».

Enfant j’étais un grand lecteur, curieux et avide de tout puis avec les études j’ai commis l’erreur d’arrêter de lire pour le plaisir, me contenant des manuels de cours et autres lectures obligées.

Lorsque j’ai fait mon service militaire il y a une dizaine d’années, je m’apprêtais à partir loin de chez moi pour m’ennuyer ferme et ceci m’a donc décidé à recommencer à lire pour tuer le temps.

La veille de mon départ je suis allé au rayon policier de la Fnac puis ai pris un livre au hasard, c’était un John Sandford et ça s’appelait « Froid dans le dos ».

Le livre m’a plu et a enclenché un mécanisme interne qui fait que je suis la aujourd’hui à écrire dans ces colonnes.

Merci donc Monsieur Sandford d’avoir eu le talent nécessaire pour raviver en moi une flamme trop longtemps éteinte.

« Une proie certaine » est dans la plus pure lignée des romans policiers américains.

Sandford met en scène son héros récurrent, Lucas Davenport, détective à Minneapolis, qui enquête sur le meurtre d’une riche femme nommée Barbara Allen, tuée par balles sur le parking d’un centre commercial.

Lors de cet assassinant, un policier présent sur place a été lui aussi grièvement blessé ce qui confère à cette affaire une tonalité toute particulière pour Davenport.

Sandford révèle tout de suite l’identité de la commanditaire, Carmel Loan, une richissime et redoutable avocate de Minneapolis, véritable mante religieuse, qui a fait assassiner Barbara pour pouvoir épouser son mari , Hale bel avocat coureur de jupon sur lequel elle a jeté son dévolu.

Pour réaliser ses sombres dessins, Carmel a fait appel à son contact dans la Mafia, un dealer nommé Rolo, pour trouver une tueuse professionnelle de Saint Louis nommée Clara Rinker.

Rinker est une ancienne strip teaseuse devenue tueuse à gage par intérêt économique après avoir subi un viol.

Intelligente et prudente, elle n’est joignable que par intermédiaire laissant des messages sur une boite vocale, opère avec un silencieux et sous divers déguisements.

Malgré leurs différences de milieu social, les deux femmes vont rapidement sympathiser pour devenir alliées puis amies.

Mais un accroc se déclare dans le plan en apparence parfait de Carmel quand Rolo décide de la faire chanter financièrement en lui montrant une cassette vidéo la compromettant dans le meurtre de Barbara.

Carmel réagit brutalement, refait appel à Clara et les deux femmes exécutent Rolo non sans l’avoir atrocement torturé à la perceuse.

Mais malin Rolo avait placé un double de la cassette chez sa sœur Martha.

Il a également la force avant de mourir de se graver à même la peau les initiales de Carmel Loan.

Les meurtres continuent donc, laissant des traces sanglantes de plus en plus visibles pour un policer aguerri comme Davenport.

On assiste donc à un jeu d’échecs à distance entre une redoutable femme avocate, tenant tête au policier sur le terrain légal en défendant Hale Allen logiquement soupçonné du meurtre de sa femme compte tenu de ses nombreuses maîtresses, et un détective malin, opiniâtre recevant l’appui du FBI en raison des liens de Rinker avec la Mafia.

Mais emporté par sa jalousie et son impulsivité, Carmel finit par déraper et a assassiner Hale ainsi que sa dernière maîtresse, sa secrétaire Louise.

L’étau se resserre sur elle d’autant plus que malgré les menaces, une petite fille témoin occulaire a fourni à Davenport des informations précieuses.

Carmel finit par craquer sous la pression et à se tuer en voiture plutôt que d’être arrêtée.

La dernière partie du livre consiste en la cavale de Clara Rinker qui échappe à deux tueurs de la Mafia venus se débarrasser d’elle, et tente d’assassiner Davenport en représailles à la mort de son amie.

Elle finit par s’évanouir dans la nature …

En conclusion, « Une proie certaine » ravira tous les fans de polar américain et de John Sandford.

L’histoire n’est certes pas innovante, mais demeure riche et brillamment construite.

L’intérêt principal de ce roman est pour moi cette troublante relation entre deux femmes puissantes qui telles des « Thelma et Louise » ou le duo mortel de « Bound » prennent le dessus par la force sur des pantins masculins gouvernés essentiellement par leurs bas instincts.

Si le personnage de Carmel est véritablement effrayant, celui de Clara semble bénéficier de plus d’indulgence et de respect pour l’auteur puisque il lui confère certaines limites comme l’absence de torture ou le refus de tuer un enfant.

Véritable projection des fantasmes de l’auteur, Davenport en flic beau, intelligent, viril, macho et amusant me paraît beaucoup en revanche trop caricatural pour être réellement intéressant.

En tout état de cause « Une proie certaine » montre avec brio la valeur certaine de Sandford dans l’art difficile du roman policier.

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