Contes et légendes du Jura (Gérard Chappez)

A l'honneur le patrimoine français et tout particulièrement de la région dont est originaire ma famille avec « Contes et légendes du Jura » de Gérard Chappez.
Sorti en 2008, ce court ouvrage recense les principales histoires imaginaires autour de cette région boisée et montagneuse finalement assez peu connue du grand public.
Difficile de ne pas parler du Jura et de la légende de la Vouivre, cette créature prenant les traits d’une jolie jeune femme pour se baigner nue dans les étangs, quitte à attiser la convoitise sexuelle mais aussi financière en raison du gros rubis réputé magique qu’elle portait à son front.
Malheureusement la belle se trouve protégée par une garde rapprochée de serpents qui massacrent invariablement tous les intrépides se risquant à l’approcher pour la voler.
Moins connue est relatée une rencontre improbable entre la Vouivre en version monstre ailé et fourchu et le géant Gargantua qui assoiffé avait asséché un de ses cours d’eau, le Drouvenant.
La ou plutôt les vouivres des étangs et lacs sont très présentes dans l’imaginaire jurassien avec le dépôt durant l’hiver 1853 d’un enfant difforme réputée fils de vouivre par deux gentilshommes dans un village reculé de Perseux avec une volonté de s’en débarrasser discrètement contre rétribution auprès d’une paysanne.
La religion chrétienne a également donné naissance à bon nombre de légendes, avec des interventions de diables à qui l’on attribuent entre autres la création du sapin, bien qu’une autre version plus positive existe en rapport à la fête de la Noël.
La région du Val d’amour regorge aussi d’histoires, tel Philippe ce ménestrel épris d’une fille de noble Alicette Rainfroi se noyant dans le lac de Chamblay au cours d’une expédition nocturne ou l’indomptable cheval fantastique de Chauvin qui noyait ses cavaliers.
Plus étrange est l’improbable histoire de Jeanne Lanternier, la fille modeste pignard parti faire fortune en Algérie en 1830, revenue mariée à un sultan marocain après de rocambolesques aventures dignes des mille et une nuits.
Sans surprise, un loup affamé est la cible de fable du Val d’amour et subit bien des persécutions avant de se voir refuser la porte du paradis.
La naissance des lacs du Jura donnent lieu à des histoires de châtiments de nobles opprimant leur peuple (lac du Chalain), de populations hostiles aux mendiants (lac de Narlay) ou de simples catastrophes annoncées (lac du Vernois).
Le lac de Bonlieu est quand à lui associé à la romantique Blandine fille du comte de Chalain à l’aventurier du XVII ième siècle Jean de Watteville ainsi qu’au cheval fantastique Pégase de Foncine.
Outre les vouivres, le bestiaire jurassien évoque les dames blanches des rivières montagneuses, les dames vertes des étangs et prairies ou les petites créatures des bois : fouletots, djinns et follets réputées jouer des tours aux humains.
Impossible de ne pas parler de Cadet Roussel, cet huissier orgeletain à la vie tumultueuse qui au XVIII ième siècle fit l’objet de railleries mises en chanson par ses adversaires pour se moquer de son zèle révolutionnaire, qu’il paya par quelques années de prison et une renommée posthume dont il se serait sans doute bien passée.
Autre personnage historique, Claude Prost dit Lacuson fait l’objet d’un véritable culte dans le Jura pour son courage, son adresse et sa résistance acharnée à l’envahisseur « français » durant la guerre de Dix ans au XVII ième siècle.
La bêtise est châtiée avec l’histoire ridicule de deux amis ivrognes Honoré et Felix refusés du Paradis pour leurs mensonge puis de manière plus cynique par l’arrestation pour meurtre de trois paysans lourdauds s’étant aventurés sans parler un mot de français à une foire de Saint Claude.
L’horreur frappe avec la cruauté du sort réservée aux demoiselles d’Oliferne, jetées u XIV ième siècle dans des tonneaux garnis d’épines pour punir la résistance de leur père à un tyran local Thiébaud de Chaffour qui ne l’emporta pas du reste au paradis.
On termine plus positivement par une histoire d’amour heureuse au Val de Bienne entre un jeune chevalier Edmond de Jeurre et Huguette fille du Comte de Condes, même si dans ce domaine rien n’égale le romantisme absolu de l’histoire de la fée du Val de Sorne, Pétronille amoureuse d’Aymon, un chevalier mort en Croisades sans avoir pu la rejoindre et dont le souvenir la hantera à jamais.
En conclusion, ouvrage sans prétention écrit par un couple de passionnés de leur région, « Contes et légendes du Jura » atteint son but et narre de belles histoires ou se mélangent légendes chrétiennes, récits campagnards et personnages historiques sublimés par les rumeurs populaires.
Avec ses forets profondes, ses multiples lacs et ses montagnes, le Jura se prête il est vrai à merveille à ce types de récits mystérieux et se montre un parfait terrain pour les faire croitre…
Je ne peux que recommander pour les petits et les plus grands ce bel ouvrage parlant d’animaux magiques, fées, chevaliers, princesses et aventuriers de tout poil peuplant le folklore de nos belles campagne ! Car lorsque le rêve ne sera plus…

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