L’exil et le royaume (Albert Camus)

« L’exil et le royaume » d’Albert Camus est un recueil de six nouvelles sur le thème de l’exil.
Comme souvent dans un recueil, on peut trouver cela quelque peu hétérogène et ne pas apprécier la totalité des nouvelles abordées.
Pourtant outre ses inévitables constations, force est de constater que la quasi totalité du recueil m’a captivé.
J’ai retrouvé un peu l’ambiance de « l’Etranger » avec ces histoires se déroulant souvent en Algérie ou des Français se retrouvent isolés, déroutés, perdus dans un monde et une culture dont ils n’ont pas les clés.
Pour moi le chef d’œuvre du livre est « Le renégat » cette nouvelle effrayante et d’une violence inouïe racontant le calvaire d’un prêtre missionnaire torturé par les « sauvages » qu’il était venu convertir seul, aveuglé par son orgueil démesuré.
Il s’agit donc d’une bombe à fragmentation contre le colonialisme européen et plus généralement contre la religion chrétienne car non l’homme n’est pas bon et le Mal règne souvent en maître absolu sur cette terre.
L’effet est terrible et les dernières pages vous marquent au fer rouge.
« L’hôte » œuvre également dans une veine de terreur, avec cet instituteur français isolé sur une montagne en Algérie qui se voit confié un prisonnier arabe a conduire à la ville la plus proche.
Bien que pétri de nobles sentiments et de bonnes intentions, l’homme voit brutalement tout se retourner contre lui dans une ironie cruelle.
Derrière la puissance terrifiante de ces deux nouvelles, on retrouve le thème de l’attraction  presque métaphysique que peut éprouver un homme pour des forces de la nature lui rappelant sa faiblesse et sa mortalité comme Janine pour le désert dans « La femme adultère » ou l’ingénieur d’Arrast dans « La pierre qui pousse » pour la jungle amazonienne et l’intense culture primitive des populations brésiliennes de la ville d’Iguape.
J’ai moins aimé « Jonas » avec cette parabole sur les affres de la création artistique ou « Les muets » nouvelle à laquelle j’ai été moins réceptif.
En résumé, j’ai été encore une fois séduit et impressionné par le talent d’Albert Camus, la beauté et la force de sa langue, ainsi que par la puissance et la profondeur des thèmes abordés.

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