Khalil (Yasmina Khadra)

En 2018, Yasmina Khadra s’attaque de nouveau à un sujet sensible avec « Khalil ».
Ici l’histoire se déroule en 2015 et montre Khalil, un jeune Belge d’origine marocaine se destinant à mourir en kamikaze dans des attentats terroristes au Stade de France.
Driss son ami d’enfance issu du même quartier de Molenbeek l’accompagne dans ce dernier voyage et après un ultime adieu les deux copains se séparent avec chacun sa cible, le stade lui-même pour Driss, le RER pour Khalil.
Mais le plan ne fonctionne pas comme prévu, Driss ne parvient pas à entrer dans le Stade et se fait exploser dans l’enceinte extérieure, ce qui ne fait qu’une seule victime.
Stressé, Khalil constate également que sa ceinture d’explosifs ne fonctionne pas non plus et sort paniqué du RER.
Perdu dans un Paris en proie au chaos, Khalil finit par appeler au secours Ryan son ami d’enfance, extérieur au réseau qui l’a envoyé à la mort.
Ryan va le récupérer et le dépose chez sa sœur à Mons, Yezza, une vieille fille célibataire en proie à la dépression.
La cohabitation avec Yezza est houleuse et après avoir survécu pendant quelques jours, Khalil doit partir en laissant chez elle sa ceinture d’explosifs.
Revenu à Molenbeek, il exige des explications de l’artificier qui a préparé sa ceinture mais celui-ci réagit violemment et le repousse vers son émir, ami et mentor, Lyès.
Khalil est une nouvelle fois dépanné par Ryan qui l’héberge, le nourri et lui donne un peu d’argent.
Mais un fossé s’est créé avec son ami qui a réussi socialement et s’apprête à se marier avec une femme non musulmane.
Durant ces jours de cavale, Khalil revoit son passé défiler, l’échec scolaire, sa vie minable, les problèmes familiaux avec son père et il en ressort un immense sentiment d’échec ravivé par le fait de ne pas se sentir intégré en Belgique.
Finalement son réseau le récupère et Lyès se fait le porte-voix du cheikh chef du réseau pour lui expliquer qu’une erreur de manipulation est survenue sur sa ceinture.
Khalil reçoit du bout des lèvres ces excuses et accepte un boulot de livreur-gardien auprès d’un Turc vendeur de meubles.
Ceci lui permet d’avoir une couverture le temps que les opérations de la police se calment.
L’attente est pénible, car outre la cohabitation délicate avec Hédi un Tunisien donneur de leçon, Khalil doit faire face aux relations explosives avec Yezza et Rayan qui ont compris qu’il appartenait à un réseau terroriste.
Inéluctablement, il se détache d’eux, notamment de Zahra sa sœur jumelle qui lui présente une jeune femme pour l’inciter au mariage.
Lorsqu’il apprend qu’elle est morte dans les attentats de Bruxelles, Khalil perd pied et doit s’employer pour conserver la confiance de Lyès, qui doute à présent de lui.
Il accepte donc une nouvelle mission-suicide au Maroc, mais Ryan découvre peu après que celle-ci a capoté en raison d’une dénonciation anonyme.
Ryan comprend que son ami a voulu dans un dernier sursaut en finir mais saboter une idéologie qui n’avait rien fait d’autre qu’apporter le malheur autour de lui.
En conclusion, avec « Khalil » Khadra navigue en terrain connu et tente de rentrer dans l’esprit d’un terroriste européen d’origine maghrébine.
Cette plongée dans l’esprit tordu d’un homme aux valeurs inversées est dérangeante et malsaine.
On y trouve la justification aveugle de commettre n’importe quel acte barbare pour atteindre un prétendu état supérieur, un paradis ou Allah récompenserait les terroristes morts en martyrs pour sa cause.
Les discours habiles et vénéneux d’émirs dévoyés, trouvent un fort écho sur des paumés comme Khalil, des jeunes en situation de détresse, mal à l’aise dans leur vie et cherchant à retrouver un sentiment de dignité et de grandeur.
On comprend que le terrorisme se nourrit de la détestation de soi, de pensées paranoïaques et victimaires pour fournir une voie nihiliste parsemée de haine et de violence.
Malgré ce choix courageux collant à l’actualité, « Khalil » n’est pas pour moi le meilleur roman de Khadra, qui malgré la beauté de sa plume, ne se réinvente pas sur ce sujet qu’il a déjà bien mieux traité.

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