L'attrapeur d'ombres (Patrick Bard)


 

 

« L’attrapeur d’ombres » est un roman d’un journaliste et photographe répondant au nom de  Patrick Bard.

L’histoire est celle d’un polar sous fond de guerre en Yougoslavie dans les années 90.

Sébastien Meyer, photographe français est un jour victime d’un tir de sniper alors qu’il fait un  reportage sur la guerre dans les rues de Sarajevo.

Il frôle la mort et revient à Paris privé de son œil droit.

Il lui est alors impossible de retravailler et il sombre dans la déchéance aussi bien physique que sociale et économique.

Le conflit se règle au milieu des années 90 par les bombardements de l’OTAN mais Sébastien n’a plus qu’une seule obsession, retourner en Yougoslavie pour comprendre ce qui lui est arrivé et aussi tuer l’homme qui l’a éborgné.

Pendant 400 pages, l’auteur construit un récit solide foisonnant de nombreux personnages d’importance variable avant que tous ces fragments de vie épars convergent pour offrir les clés de l’intrigue.

Mais « L’attrapeur d’ombres » ne traite pas que de la guerre en Yougoslavie, il se veut plus global et aborde bon nombres des aspects les moins reluisants de l’âme humaine.

Ainsi le destin des femmes africaines victimes de la guerre dans leur pays et enrôlées de force dans des filières de prostitutions jusqu’en Europe est un des thèmes centraux du roman notamment par le personnage d’Amélie, jeune centrafricaine martyre ballottée par un destin difficile.

L’Afrique donc tout comme la Yougoslavie ou finalement n’importe quel pays ravagé par la guerre, se retrouvent la cible de mafia composées d’ex mercenaires reconvertis en trafiquants d’armes ou de chair humaine.

A coté de cela, l’auteur nous dépeint quelques Occidentaux, européens ou américains riches et oisifs, cherchant à assouvir leur pulsions voyeuristes en participants à des « tours operators » les emmenant voir la mort en direct.

Quand aux ONG, elles ne sont pas vraiment épargnées non plus, souvent présentées comme composées d’idéalistes irresponsables et dangereux.

Dans ce monde empreint de noirceur et de pessimisme, seul le héros Sébastien semble faire preuve d’intégrité et de révolte, photographiant frénétiquement les victimes de guerre pour témoigner de la barbarie du monde.

On trouvera cette vision du monde quelques peu manichéenne et simpliste.

Mon sentiment par rapport à ce livre n’est pas fameux, on devine que l’auteur lui même photographe et reporter a mis beaucoup de lui même dans le personnage principal mais sans réellement se remettre en question.

Qu’est ce qui en effet pousse ces reporters à se jeter sur tous les grands conflits de ce monde, à quelques fois outrepasser toutes les consignes de sécurité pour décrocher le « scoop » , eux même ne sont ils pas accro à une forme drogue d’adrénaline pure  et quelques fois eux aussi voyeuristes  sans aucune morale ?

Je pense en cela à l’affaire du photographes de Paris Match faisant complaisamment poser les Talibans avec les effets personnels des soldats français tués.

Sur le thème du fond encore, le livre présente une vision abominable du monde entre pays sous développés ravagés par la guerre et pays développés récupérant dans leurs couches les plus basses les débris de ces drames.

La description détaillée du conflit yougoslave est en effet à désespérer du genre humain, notamment avec ce personnage de Goran Milkovic, sniper serbe tirant dans les rotules des enfants pour faire accourir les adultes afin d’éliminer plus de monde.

Alors oui ces choses la existent, mais l’être humain est aussi capable de belles choses et ces visions monolithiques d’enfer terrestre permanent sont lourdes à supporter pendant 400 pages.

Au niveau du style et des détails, le récit ne brille pas non plus par sa légèreté.

Certains personnages sont découpés à la hache, comme le body builder californien accro aux snuff movies et Kamel, le « rebeu de service » et son langage de cité absolument pas crédibles pour un sous.

Les seuls points qui m’ont intéressés dans ce livre sont la découverte des séquelles psychologiques des rescapés du conflit yougoslave et la consternation devant la passivité des forces de l’ONU lors du massacre de Srebrenica.
Au final un roman policier extrêmement glauque et lourd qu'on oubliera je pense aussi vite qu'un article de Paris-Match sur Yves Rénier.

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