Rocka rolla (Judas Priest)

 



Datant de 1974, «  Rocka Rolla » est le premier album de Judas Priest.

Ce qu’a produit le groupe dans les années 70 est généralement snobé par la presse ou les fans, le son et le style de musique pratiqués étant en effet assez éloignés de ceux qui feront sa renommée mondiale prêt d’une décennie plus tard.

Pour ma part, je suis un fan absolu du rock et du hard rock des années 70 et les disques produits par Judas Priest à cette époque sont mes préférés.

Ils contiennent en effet ce surplus de créativité, d’inspiration et de charme suranné qui me font complètement craquer.

« Rocka Rolla » est un album peu coté, sans doute à cause du fait qu’il soit au sein du répertoire du groupe le plus éloigné du style heavy metal.

Sa pochette, assez ridicule, dont le groupe a beaucoup ri a posteriori constitue également un handicap pour une première approche.

Les racines de l’album sont à chercher dans le blues et le rock progressif, choix somme toute logiques tant à l’époque le hard rock en était à ses premiers balbutiements.

L’album débute par une entrée en matière plutôt timide avec « One for the Road » morceau rock assez calme au rythme boitillant, saccadé et répétitif.

La voix d’Halford est surtout agréable sur les couplets ou elle paraît aérienne et ample.

« Rocka Rolla » est le « hit » de l’album, avec un son plus assuré, un refrain irrésistible d’une efficacité redoutable et la présence d’un harmonica en soutien.

Déjà la groupe montre un intéressant début de savoir faire dans la manière de trousser de purs hymnes hard rock.

Après ces débuts encourageant, Judas Priest prend l’auditeur à contre pied et le format classic rock des deux premiers titres fait place à deux ou trois interludes quasi expérimentaux plutôt déroutants 

Ces morceaux bien que non dépourvus d’intérêt ont néanmoins pour effet d’enrayer la belle dynamique des premiers titres et de perdre complètement l’auditeur dans des délires de musique atmosphérique.

Il faut attendre « Cheater » pour voir le groupe renouer avec une structure plus classique et compacte.

Ce titre intense est très influencé par le blues, avec un harmonica venant hanter une histoire de mari trompé et de meurtre sous-jacent, thème tout à fait adéquat au cadre dramatique du blues.

Et oui aussi incroyable que cela puisse paraître aujourd’hui, Judas Priest en 1974 a composé du blues …

« Never Satisfied » est sans doute le deuxième hit de l’album.

Ce morceau est une lente ascension progressive permanente... la superbe voix aérienne d’Halford y contraste avec des refrains plus puissants.

Ensuite alors qu’on croit le groupe remit sur les rails d’un classic rock formaté et efficace, l’atmosphère bascule à nouveau.

« Run of the Mill » est un long et superbe morceau mélancolique, une pièce maîtresse de plus de 8 minutes, avec un riff glaçant à la Black Sabbath tombant subitement comme un couperet et de longs passages façonnés au burin du rock progressif.

Le groupe révèle une autre facette de son talent et sa capacité à écrire une musique plus complexe et ambitieuse.

La voix d’Halford atteint à la perfection sur cette ballade majestueuse, montant très haut dans les aigus au cours d’un final haletant d’intensité et d émotion.

Ce morceau est pour moi le chef d’œuvre intemporel de l’album.

« Dying to Meet you » œuvre dans la même veine.

Il s’agit également d’un morceau triste, superbe, long et mélodieux ou Rob chante de manière grave et profonde pratiquement comme un crooner avant la aussi un final plus dynamique et enlevé.

En comparaison la conclusion « Caviar and Meths » paraît un tantinet quelconque malgré de belles qualités mélodiques.

Apparemment le producteur de l’époque aurait amputé ce titre jugé initialement trop long ( plus de 10 minutes ), dommage.

En conclusion, « Rocka Rolla » est un album très ancré dans une époque que personnellement j’apprécie toujours de redécouvrir avec plaisir.

On peut lui reprocher un manque d’impact, une cohésion quelque peu bancale, un coté un peu déroutant de part sa multitude d’influences non encore totalement digérées, preuve que le groupe à l’époque se cherchait encore musicalement à l’ombre des autres grands pionniers anglais.

Néanmoins cet album recèle déjà quelques titres somptueux éparpillés comme des perles précieuses dans le limon d’une terre fertile.

« Rocka Rolla » vaut donc le détour surtout pour le fan qui sera intéressé par les prémisses archéologiques de sa découverte.

Les autres passeront sans doute allégrement leur chemin en se dirigeant directement vers les classiques comme j’ai moi même procédé il y a quelques années avant de finalement remonter avec beaucoup de plaisir le cours de l’Histoire.

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