Métaphysique (Aristote)

 



Les circonstances de la vie m’ont données envie de « changer de braquet » et de m’attaque à des ouvrages réputés difficiles mais qu’il me paraît indispensable d’avoir lu au moins une fois dans sa vie.

Finies donc les inhibitions, tel un prédateur mis peu à peu en confiance par ses prises successives je m’attaque à des proies de plus en plus grosses.

La «  Métaphysique » d’Aristote en fait assurément partie.

Si j’avais souffert sur la « Physique », cela a été encore pire sur la « Métaphysique » !

Déjà cet ouvrage est très volumineux, il contient 14 livres qui ne sont pas absolument tous certifiés avoir été écrit par Aristote lui même.

Il en résulte qu’il n’y a pas de plan général, pas toujours de liant entre les parties et qu’il est donc difficile de se repérer aisément dans le cheminement de la pensée du « Maître de ceux qui savent ».

A ces difficultés pratiques s’ajoutent des difficultés par rapport au sujet abordé, sans doute le plus fondamental qui soit.

Aussi ne vais je pas faire une analyse linéaire livre après livre, ceci serait aussi fastidieux qu’ inutile mais simplement livrer ce que j’ai retenu d'une première lecture.

L’objet de la « Métaphysique » est la recherche d’une science traitant de la recherche des principes, des causes ordonnant le monde mais également de l’étude des êtres « en tant qu’ils sont  êtres » c’est à dire par leur matière, forme, actes, entéléchie ou puissance.

Cette science qu’Aristote ne nommera jamais est donc un prolongement de la « Physique » qui étudie les substances en mouvement (au sens large du terme) .

Au cours de ses réflexions, Aristote reprend beaucoup les théories de ses prédécesseurs, bien entendu les Pré-Socratiques (Héraclite, Démocrite, Empédocle …) mais les deux principales écoles auxquelles il s’attaque sont celle de la théorie des nombres des Pythagoriciens et surtout celle des Idées de son ancien maître Platon.

Aussi me suis je aperçu que de ne pas bien posséder les rouages de ces deux dernières écoles était un handicap important dans la compréhension de la « Métaphysique » tant Aristote s’y réfère souvent.

Une partie importante du live tourne autour de la détermination de la science qui doit traiter des thèmes précédemment évoqués.

Aristote parvient à la conclusion que c’est à la philosophie de traiter ces questions car la philosophie est la science la plus élevée des sciences théoriques, compte tenu du fait qu’elle recherche les causes et principe premiers des choses en vue du bien de l’être.

La philosophie est donc la science se rapprochant le plus du divin.

Le livre cinq définit un grand nombre de concepts comme l’être, la substance, l’identité, la puissance, la qualité, la quantité ou le genre.

Aristote semble ainsi fourbir ses armes pour ses démonstrations futures.

Les questions centrales autour de l’être en substance prise sous le rapport de matière ou de forme,  de la puissance ou  de l’acte antérieur à celle ci m’ont le plus intéressées.

De manière très synthétique, on peut dire qu’Aristote décrie la théorie des Idées de Platon qui place les idées comme substances éternelles, universelles et  reflets du monde sensible.

La théorie d’Aristote est que tous les principes convergent vers un seul principe premier, éternel, séparé du monde des sensibles, immobile mais imprimant au monde un mouvement perpétuel.

Aristote identifie clairement ce principe au Dieu même si il ne croit pas à l’anthropomorphisme des fables mythologiques.

Finalement, la Métaphysique recherchant les principes premiers et l’étude de l’être en tant qu’individu, touche à la théologie.

A la lecture de cette conclusion on comprend pourquoi l’influence d’Aristote sera gigantesque sur les trois religions monothéistes.

En effet, la « Métaphysique » offre un terrain idéal pour le développement d’une justification philosophique à l’existence d’un dieu unique.

C’est donc au Moyen Age, qu’une nouvelle science, la Scolastique, tentera la réunification des thèses aristotéliciennes avec la religion.

Je savais que l’église chrétienne avait été influencée par Aristote par l’intermédiaire des travaux de Thomas d’Aquin mais j’ignorais que le Judaïsme  par les travaux de Maimonide ou l’Islam par ceux d’Averroès, avaient également subi cette influence.

Il est à noter cependant que contrairement à ceux de Maimonide, les travaux d’Averroès furent massivement rejetés par les autorités religieuses musulmanes.

Pour ces raisons on peut considérer la « Métaphysique » d’Aristote comme l’un des livres les plus importants ou influents de l’Histoire de l’homme.

Après avoir bien étudié ce philosophe, je dois admettre être toujours impressionné par l’étendue et la portée de ces travaux visant à atteindre une sorte de savoir total multi disciplinaire.

Certes, le style d’Aristote est souvent austère, professoral, difficile, peu littéraire (surtout comparé à  celui de Platon) mais je suis impressionné par sa rigueur scientifique et son coté « savant ».

J’aime cette approche de la vie intellectuelle, spéculative et méditative à qui il attribue la part de divinité de l’homme.

Les écrits d’Aristote ne traitent pas majoritairement de morale ou d’une philosophie pratique de l’existence, (même si l’ « Ethique à Nicomaque » s’en rapproche le plus), ils traitent de concepts plus absolus à mon sens.

Toutefois beaucoup de ses arguments reposent sur l’étude des astres qu’il imagine éternels.

Il ne pouvait savoir que l’astrophysique démontrerait plus tard que les astres comme les galaxies naissent et meurent et que à part peut être l’univers dans sa globalité plus rien n’est considéré comme éternel de nos jours.

Aussi me demande je parfois (un peu vainement ) ce qu’aurait écrit un tel esprit visionnaire si il avait été doté d’outils technologiques aussi affûtés que les nôtres.

Nul doute que son prodigieux sens de l’observation, son esprit curieux et son intelligence aiguë auraient amené l’Humanité encore plus en avant sur les chemins escarpés de la connaissance.

Je pense donc relire un jours plus tard la « Métaphysique » mais doté moi même d’outils intellectuels plus performants pour me hisser davantage au niveau du Maitre.

Malgré tout le voyage n’ a pas été sans bienfaits.

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