Fléaux et Société, de la grande peste au choléra, XIVe-XIXe siècle (Françoise Hildesheimer)

Sorti en 1993, cet ouvrage retrace
l'évolution des principales pandémies sur une période se
situant entre le Haut Moyen-Age et l'époque contemporaine.
Honneur à la plus terrible d'entre
elles, la Peste noire, connue depuis l'Antiquité qui ravagea
l'Europe durant des centaines d'années jusqu'à disparaître
progressivement.
La peste noire fut importée du
Moyen-Orient en Europe par l'essor de la navigation.
Les Croisés en furent victimes et
ramenèrent dans leurs navires la maladie, mais ce sont surtout les
navires de commerce accostant à Marseille ou à Toulon qui en furent
les principaux vecteurs historiques.
Mal connue, redoutable et impossible à
traiter, la peste se répand dans le Sud de la France et remonte
ensuite vers le Nord du pays par voies terrestres.
Les pouvoirs publics réagissent de
manière empirique et décrètent des mises en quarantaines des
populations touchées, accompagnée de mesures sociales.
Ces mesures strictes appliquées par
l'armée et punissant de mort les contrevenants s'accompagnent d'une
prise de conscience que les terribles conditions d'hygiène de
l'ensemble de la population favorisent la propagation de la maladie.
Des mesures de déblayage des ordures,
d'enfouissement loin des villes accompagnent donc les restrictions de
déplacement.
Fléau terrible provoquant une mort
foudroyante, la Peste terrifie les populations mais touche surtout
les couches les plus défavorisées de la population, vivant dans la
saleté et la promiscuité.
Si les traitements d'une médecine
balbutiante semblent plus de mal que de bien, les mesures sanitaires
ont un effet et permettent de contenir la propagation du mal.
Avec l'expérience, les ports du Sud de
la France et certains du Nord-Ouest construisent des lazarets
permettant d'isoler les navires suspects avant leur entrées sur le
territoire national.
La Peste décime la population, de 30%
à 50% en cinq ans en Europe en 1347 soit 25 millions de morts et met
l'économie à genoux, brisant le commerce, mais les statistiques
montrent qu'en quelques années seulement la démographie et l’activité économiques compensent ces pertes.
Face à l'impuissance de la Science, le
seul refuge est la religion. Mais dans une société par essence
religieuse ou l'on était habitué à mourir jeune accepte avec un
certain fatalisme cette volonté de châtiment divin.
L'art médiéval est le reflet par
l'intermédiaire des danses macabres de cette terreur et il faudra
attendre la fin du XIXieme siècle pour voir disparaître les vagues
de mort.
En comparaison, tout aussi ancienne, la
lèpre fait presque figure de maladie « douce ». Les
malades sont certes exclus de la société mais vivent plus longtemps
et vivent en communauté jouissant de certains avantages avant de
voir leur corps tomber en lambeaux.
La variole a un impact destructeur et
est la cause d'un véritable génocide en Amérique du Sud, les
populations indiennes étant décimées par ce mal importé d'Europe
plus surement que par les armes des colons.
Alors que le choléra reste à un stade endémique dans certaines régions du globe, les maladies vénériennes comme la syphilis sont accompagnées d'un sentiment de honte, la mort ou la
mutilation faisant figures de châtiment pour une vie de débauche.
Peu à peu, les progrès de la Science
avec les travaux Pasteur, Yersin et Koch sur la microbiologie
parviennent à comprendre les mécanismes de propagation des
infections et le développement de traitements accompagnés
d'améliorations des conditions d'hygiène et de santé, font reculer ces fléaux.
En conclusion, Fléaux et
Société, de la grande peste au choléra, XIVe-XIXe siècle »
est un ouvrage, dense, riche, d'une grande rigueur combinant analyse
de l'auteure et citations des multiples sources historiques pour
mieux comprendre l'impact sociétale des grandes pandémies
mondiales.
On y découvre que même les société moyenâgeuses étaient capables de prendre des mesures strictes de
confinement et d'interdiction des rassemblements publics accompagnés
d'aides « sociales » aux populations les plus démunies.
La lutte empirique contre des maladies
beaucoup plus mortelles que le Covid a montré quelques réussites même si le bilan humain des pestes est resté abominablement lourd.
Après la religion comme seul réconfort
est venu l'appui de la Science et de la Médecine pour faire reculer
les épidémies avec toute une politique de santé publique pour
faire de la prévention.
Mais déjà les commerçants pestaient
contre les effets négatifs du confinement sur l'économie !
Bien sur, les grands absents de cette
études sont la grippe espagnole et le VIH, mais cet ouvrage édifiant
permet de remettre dans son contexte la récente épidémie du
Covid-19 qui ébranle le Monde.
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