En arrière (Marcel Aymé)

« En arrière » toujours de Marcel Aymé est une recueil de nouvelles parues plus tardivement en 1950.

La première d’entre elles « Oscar et Erick » prenant la forme d’un conte nordique ou un scandinave devenu marin finit au retour d’un voyage lointain par faire passer son frère du statut de peintre maudit et paria du village à grand visionnaire, est franchement anecdotique.

Puis vient « Fiançailles » marqué par le sceau de l’humour avec un jeune centaure fils de baron, qui parvenant à séduire Ernestine la filleule d’un évêque, l’emporte sur son dos avant de la laisser choir pour une jument.

Plus élaborée, « Rechute » raconte à la suite d’une nouvelle loi faisant passer les années à 24 mois, la régression infantile de toute la population française et le désespoir de Josette âgée de seize ans qui allait connaitre enfin l’amour charnel avec son soupirant un jeune avocat du nom de Bertrand d’Alleaume.

Assez astucieusement voir diaboliquement, Aymé raconte comment tous les vieillards et les mourants profitent que leur âge soit divisé par deux pour oublier les affres de la vieillesse et profiter d’une seconde jeunesse mais comment tous les jeunes gens rétrogradés brutalement au stade de l’enfance se trouvent acculés à des situations inextricables et se révoltent brutalement contre le pouvoir en place.

Après une émeute d’enfants particulièrement violente qui se termine en bataille rangée sur les ponts de Paris, le gouvernement fait marche arrière et la société reprend ses marques.

Déçue d’avoir été délaissée par son soupirant qui n’était plus attiré par ses formes infantiles, Josette l’humilie avec son frère puis finit par le pardonner.

L’émerveillement est de mise avec « Avenue Junot » sympathique conte 100% titi parisien ou Adelaïde une femme obsédée par les hommes à barbe comprend qu’elle a commis une erreur en s’amourachant d’un médiocre poète et finit par tomber amoureuse d’un véritable poète glabre qui la charme par la pureté de ses sentiments et la beauté des vers qu’il a composés pour elle.

Si « Les chiens de notre vie » dédié à la prétendue complexité de la psychologie canine, m’ont laissé plus froid, « Le conte du milieu » ou un proxénète se trouve capturé par un ogre capable de rapetisser les gens à l’aide d’une bague magique, m’a en revanche davantage séduit par l’imagination si élaborée de son auteur.

Mais la nouvelle la plus réussie du recueil demeure pour moi « Josse » véritable merveille ou un ancien militaire fraichement retraité finit par trouver une voie de sortie contre le désœuvrement et l’hostilité de sa sœur une vieille fille aigrie et vicieuse dans la contemplation du jeune fils des voisins.

Bien que réputé dur et peu sentimental, le militaire finit par s’ouvrir à la vie avec l’enfant qu’il observe et photographie en cachette, avant que sa sœur fermement décidée à salir son bonheur ne vienne gâcher ce fragile moment de quiétude.

La fin tragique que d’aucun diront réaliste de l’histoire, n’atténue en rien le génie de cette histoire fantastique située dans un environnement clos ou la tension psychologique entre le frère et la sœur croit de jour en jour.

Plus classique est l’histoire contée dans « La vamp et le normalien » de la rédemption par amour d’une jolie fille de Montmartre pour un ex normalien devenu garçon boucher.

Après « Le mendiant » conte désarçonnant ou un américain de Détroit réduit à la mendicité devient l’apôtre d’une nouvel religion liée à un Moteur magique, vient « En arrière » récit très cynique ou de jeunes fils de milliardaires désirant fondés une revue littéraire allant à l’encontre de toute hypocrisie envers les pauvres, sont finalement ramenés à la raison par les réalités pratiques et surtout par un grand manque de courage.

En conclusion, « En arrière » ne constitue pas pour moi le recueil des meilleures nouvelles de Marcel Aymé.

Bien que plaisantes, la plupart sont en effet de simples amusements assez anecdotiques à l’exception de l’incroyable drame psychologique « Josse » ou de « Rechute » écrite dans le plus pur esprit fantastique de Marcel Aymé avec des changements temporels affectant toute une population.

Bien entendu le savoir faire de l’écrivain est toujours présent, avec son sens de l’absurde, du merveilleux, son humour mordant et sa description du Paris pittoresque de Montmartre et de l’argot de ses habitants composés d’artistes, de prostituées et de voyous, Paris aujourd’hui disparu ne revivant que par la magie de ces quelques nouvelles.

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