Le goût du large (Nicolas Delasalle)

Mélange entre roman d’aventures et de méditation, « Le goût du large » de Nicolas Delesalle sort en 2016.
L’auteur décide d’embarquer sur un cargo le MSC Cordoba pour un voyage de neuf jours qui l’emmènera de Anvers jusqu’à Istanbul.
Cette expérience solitaire est pour lui l’occasion de couper avec l’agitation frénétique du monde moderne, de goûter à la contemplation de la nature au travers de l’océan et aussi d’écrire sur ses expériences passées de grand reporter.
Tout au long du roman, Delesalle alterne entre courts entretiens avec l’équipage majoritairement philippin et faisant ce travail pour l’argent et récits de ses reportages dans les régions les plus « chaudes » du globe.
Entre parties d’échecs, séances de musculation et longue contemplation de la mer qui défile à l’infini devant lui, surgissent les souvenirs : à Jérusalem premier contact avec des corps démembrés par les attentats, tensions avec des femmes soldats israéliennes le tout entremêlé d’expérience de surfeur amateur, bref passage sur les victimes indonésiennes du tsunami asiatique de 2004, tendresse pour la folie douce des Russes qu’ils soient joueurs d’échecs, taximen ou politiciens et peur au ventre dans l’enfer sécuritaire de l’Afghanistan avec un hommage vibrant à la minorité ethnique Hazara persécuté par l’ethnie dominante Pachtoune.
Impossible également de ne pas parler de l’Afrique entre angoisse de se perdre dans le désert du Niger, souffrance pathétique des enfants sous alimentés, violence de la révolution égyptienne de 2011, exploitation du peuple Pygmée par les Bantous, soirée escort dans un night club d’Abidjan et tentative d’extirper de la rue un petit Sénégalais de Dakar.
Un souvenir tout de même concerne la France, une nuit passé dans une grotte au fond d’un gouffre de Millau, avec un récit au final assez minable et décevant centré sur des sensations purement psycho-physiques.
Le récit se termine sur les évènements les plus contemporains notamment la guerre en Syrie contre l’Etat Islamique, avec le parcours d’un combattant kurde du YPG et d’un déserteur de l’armée syrienne.
En conclusion, si sur la forme « Le goût du large » se lit plutôt de manière agréable avec une forte propension à la contemplation détachée, sur la forme ce roman se borne à une juxtaposition de souvenirs de baroudeur sans réelle trame narrative.
Au final, « Le goût du large » ressemble donc à un gros cargo vide à l’intérieur et n’apporte pas grand-chose au lecteur qui suit le zapping égocentrique de l’auteur satisfaisant son goût pour les sensations fortes dans une quête sans cohérence globale.
Pour la beauté du geste diront sans doute les défenseurs du roman, mais ceci demeure pour ma part insuffisant.

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