L’inutile beauté (Guy de Maupassant)

Crochet bienvenu chez Guy de Maupassant avec « L’inutile beauté », recueil de onze contes paru en 1890, soit quelques années avant sa mort.

Le premier d’entre eux, « L’inutile beauté » commence par une histoire de couple déchirante, chez les Mascaret, dont la femme Gabrielle, encore superbe à trente ans malgré ses six enfants accouchés en onze ans de vie commune, se rebelle contre la vie que son mari lui a imposé.

Gabrielle lui fait brutalement savoir tout son ressentiment d’avoir été acheté contre son gré et d’avoir été cantonné à un rôle de reproductrice qui ne lui seyait pas.

En guise de représailles, la cruelle lui annonce qu’un de ses six enfants n’est pas de lui.

Miné de l’intérieur par cette terrible révélation, le comte de Mascaret prend la décision de quitter sa femme et va alors mener une vie de célibataire accumulant sorties et conquêtes nocturnes.

Les deux époux s’éloignent pendant six ans avant que le mari demande finalement à sa femme lequel de ses enfants n’est pas de lui.

Sa femme se rétracte alors et lui avoue qu’elle a inventé ce mensonge pour pouvoir briser ce cycle destructeur pour elle d’enfantements successifs et vivre en femme libre.

Vient ensuite « Le château des oliviers » avec la vie de l’abbé Villbois, entré en religion près de Toulon à la suite d’une violente dispute avec une femme de Paris, qu’il a aimé passionnément et quitté lorsqu’elle lui a annoncé sa grossesse.

Convaincu que l’enfant n’était pas de lui, l’abbé s’est exilé dans l’arrière pays varois ou il mène une vie d’ascète épris d’exercices physiques mais a le profond déplaisir de voir un jour revenir son fils appelé Philippe-Auguste.

Mué en vagabond, le jeune homme parvient à émouvoir et à convaincre son père de l’accueillir mais lorsqu’il lui révèle qu’il haïssait sa mère jusqu’à sa mort et a tué son beau père, l’abbé se rétracte et lui demande de partir.

S’ensuit une violente lutte qui coute la vie à l’abbé.

Mais Maupassant laisse à entendre que l’abbé aurait profité de la confusion pour se donner de la mort.

L’ambiance se fait sans doute encore plus sombre avec « Mouche », ou l’histoire d’une jeune femme accompagnant un groupe d’amis sportifs pratiquants d’aviron sur la Seine.

Le groupe vit en clan au sein duquel Mouche s’épanouit dans une sorte de liberté sexuelle.

Cette joyeuse insouciance est brisée par l’annonce de la grossesse de Mouche et sa conclusion tragique par la perte de l’enfant après un accident de navigation.

Puis « Le noyé » raconte une histoire de femme de marin se vengeant des violences subies en tuant un perroquet ayant eu le malheur de parler comme son mari disparu en mer.

« L’épreuve » renoue avec les disputes conjugales et les tourments d’un homme marié convaincu que sa femme le trompe puis « Le masque » raconte la quête pathétique d’un vieillard séducteur refusant de voir la vérité en face et courant les bals parisiens ou affublé d’un masque il tente vainement d’égaler les danseurs plus jeunes.

Les courtes nouvelles se succèdent, « Un portrait » assez étrange établissant le lien entre le pouvoir de séduction d’un homme et la disparition prématurée tragique de sa mère.

Plus touchante « L’infirme » dépeint la vie d’un ancien officier amputé des deux pieds à la guerre et ayant par grandeur d’âme accepté de laisser sa fiancée épouser son ami plutôt que de lui imposer une vie au chevet d’un handicapé obèse.

On sourit avec « Les vingt cinq francs de la supérieure » ou le destin d’un paysan appelé Pavilly disposant d’un tempérament fantasque provoquant partout il passe le rire.

Pour terminer, « Un cas de divorce » reprend les obsessions d’un homme délaissant sa femme pour son amour immodéré des fleurs et « Qui sait ? » une histoire fantastiques de meubles se déplaçant tous seuls.

En conclusion, « L’inutile beauté » est évidemment un recueil de nouvel plaisant mais assez hétérogène.

Tout le talent de Maupassant s’exprime dans ces nouvelles puissantes, émouvantes qui prennent le lecteur aux tripes.

On pourra néanmoins rester sur sa faim avec le format très court adopté et trouver que les quelques œuvres fantastiques  présentes ici sont décalées par rapport au reste des nouvelles de l’écrivain.

Mineur sans doute, mais néanmoins intéressant comme tout production de Maupassant.

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