Tieta d'Agreste (Jorge Amado)

Ecrit en 1977 puis adapté à la télévision brésilienne en 1996, « Tieta d’Agreste » est l’un des romans les plus célèbres de Jorge Amado.
L’histoire se déroule dans les années 70 et Antonieta Esteves Cantarelli dite Tieta, une enfant d’Agreste petit village de l’état de Sergipe, partie très tôt changer de vie à São Paulo, revient au village avec la réputation d’une femme ayant réussi.
Autour de Tieta qui envoyait régulièrement des lettres et de l’argent à sa famille s’est bâtie une véritable légende qui se confirme lorsqu’une femme de 40 ans, encore très séduisante, revient veuve d’un riche industriel Paulista, Cantarelli avec une jeune femme Leonora, qu’elle présente comme sa belle-fille.
Bienfaitrice charismatique au grand cœur, Tieta est accueillie en héroïne dans son village.
Le maire, Ascanio Trinidade, une homme jeune obsédé par faire entrer sa ville dans une ère de progrès, la contacte pour lui faire part de son désir de faire installer l’électricité à Agreste, région pour l’instant négligée par les pouvoirs publics.
A la surprise générale, Tieta parvient à faire infléchir les plans de l’état et à inscrire Agreste sur la liste de villes devant être reliées au réseau électrique.
Ce fait d’arme réhausse encore le prestige de Tieta, qui entreprend d’acheter des terrains sur la plage de Mangue Seco, un lieu magnifique ou alors gardienne de chèvre elle avait été défloré par un vieux colporteur.
Mais la Mangue Seco est aussi un lieu ou s’exercent des trafics des pécheurs locaux.
La beauté de Tieta frappe son neveu Ricardo Batista, qui malgré ses vœux de devenir prêtre, succombe au charme sensuel de sa tante.
Ascanio pourtant voit plus loin et se laisse approcher par un industriel, désireux d’implanter une usine de production de bauxite de titane dans la région.
Alors que Ascanio voit le développement économique et un prestige accru, les habitants voient une industrie polluante déjà responsable de désastres écologiques en Italie.
Mais Ascanio soutenu par le Docteur Mirko Stefano, représentant de la Brastanio, fait venir des ingénieurs qui font des mesures et promettent de goudronner les routes.
Un âpre combat se dessine alors entre Ascanio et les défenseurs de la vieille Manga Seco : Carmosina qui travaille aux postes, Dario un ex officier de Marine, le poète Barbozinha appuyé par le vieux colonel Arthur de Figueirdo.
Sur le terrain juridique, les héritiers des terres convoités par la Titane, hésitent à vendre sous la pression des habitants et constituent un rempart que Ascanio revenu gonflé à bloc d’un voyage à Salvador de Bahia tous frais payés par la Brastanio, veut obtenir par l’expropriation pour des raisons de santé publique.
Aucun accord n’est obtenu, pire le personnel de la Brastanio venu faire des repérages à Mangue Seco est capturé, emmené sur une barque et menacé d’être jeté à la mer aux requins.
Lors des élections, le commandant Dario soutenu par les habitants, dont Tieta qui a finalement pris le parti de défendre sa terre natale, l’emporte sur Ascanio, trop sur de son succès.
La Brastanio choisit une autre ville pour implanter son usine polluante, Ricardo quitte la région, le cœur lourd pour rejoindre les rangs de l’église après avoir trompé Tieta avec une jeune femme de son âge, Maria Imaculada.
Pire, Ascanio qui souhaitait épouser Leonora tombe de haut en découvrant que cette fille est une petite prostituée recueillie par Tieta alors qu’elle était devenue la gérante d’un bordel de luxe à Sao Paulo.
La vérité sur l’origine de la fortune de Tieta finit donc par se savoir, son passé de prostituée et de maquerelle, ce qui au final n’enlève rien à ses mérites en faveur d’Agreste, qui reste un petit paradis naturel sauvage du Nordeste.
En conclusion, « Tieta d’Agreste » est une grande fresque romanesque du Nordeste, dont Jorge Amado a le secret avec foisonnement de personnages, femmes sensuelles, magouille politico-industrielles et sexualité sur fond de tropiques.
Difficile de critiquer un roman d’une telle ampleur et aussi brillamment écrit mais on ne pourra s’empêcher de trouver quelques longueurs dans l’intrigue et un petit gout de déjà vu, comme si l’auteur évoluait dans un terrain déjà largement balisé par lui.
Ceci n’enlève sans doute pas grand-chose au statut d’œuvre phare de la littérature brésilienne à Tieta.

Commentaires