Attila (Eric Deschodt)

 


 


Histoire toujours avec un ouvrage sur l’un des personnages les plus énigmatiques et sulfureux de l’histoire, « Attila » d’Eric Deschodt.

L’ouvrage, de taille modeste, ne se veut sans doute pas une biographie exhaustive de la vie du célèbre conquérant mais constitue une agréable et intéressante première approche recensant les grandes étapes de la conquête hunnique qui mit à mal l’empire romain au V ieme siècle après Jésus Christ.

Les origines des Huns sont nimbées de mystères, si on les situe dans les steppes d’Asie centrale, à l’emplacement de l’actuelle Mongolie, on sait aussi qu’ils s’étendirent jusqu’en l’Europe de l’Est jusqu’à Budapest, à partir du IV ieme siècle après Jésus Christ.

Essentiellement nomades, redoutables cavaliers et archers, ils menèrent de terribles invasions menaçant depuis le III ieme siècle avant Jésus Christ les royaumes de Chine.

En 400 ap JC, les Huns stationnant en Hongrie, constituent une force inquiétante pour un Empire romain déclinant, scindé entre l’Empire d’Orient à Constantinople et l’Empire d’Occident de Rome.

Les Romains jouent sur les alliances avec les peuples Barbares notamment les Wisigoths qui ont un statut de fédération de l’Empire, pour sauver les apparences et préserver un semblant de prestige mais en réalité certains peuples comme les Vandales, les Ostrogoths ou des tribus Gauloises révoltées échappent à présent complètement à leur influence.

Honorius empereur d’occident joue également à ce jeu d’alliance pour tenir en respect les Huns, pratiquant le versement de tributs et l’envoi d’otages de marque pour s’assurer de l’appui occasionnel de leur formidable force militaire pour dompter les autres peuples barbares.

C’est dans ce cadre que le romain Aetius est envoyé chez Roas, le roi des Huns et se lie d’amitié avec son jeune neveu Attila.

A son contact Attila apprend à compter, lire et écrire le latin et le grec, chose rarissime pour un hun habitué à vivre à la dure.

En un juste retour des choses, Attila est accueilli à la cours de Rome ou il joue un rôle d’ambassadeur.

Il apprend à connaître parfaitement le monde romain de l’intérieur, y développe un art consommé de la diplomatie et de la politique.

A la mort de son frère Bleda, il devient le roi des Huns et entreprend de fédérer les tribus hunniques, de développer un pouvoir centralisé, à améliorer les axes de communication et surtout à nouer des alliances pacifiques avec les peuples de l’Est notamment ses ennemis héréditaires les Chinois.

Ayant stabilisé l’empire hun de l’Est, Attila se tourne vers l’Ouest et ses richesses qui le fascinent.

C’est l’empire romain d’Orient qui sera sa première cible, avec Théodose II, empereur faible, incapable et lâche qui sera prêt à toutes les humiliations pour ne pas avoir à livrer bataille.

Alliant habilement menace et diplomatie, Attila obtient de nombreux avantages (territoires, versement de tributs) en échange de ses bonnes grâces.

Entouré d’excellents lieutenants fidèles et incorruptibles comme le hun Esla, le grec Onégèse, le romains Oreste, ou le germain Edécon, Attila défait facilement les mercenaires Goths payés par Théodose II, et renonce mystérieusement à  la prise de Constantinople, défendues par d’épaisse murailles en échange d’une forte augmentation du tribut versé par la ville.

Théodose accepte mais son  premier ministre l’énuque  Chrysaphius manque une tentative d’assassinat contre Attila.

Après avoir une nouvelle fois fait pression sur Constantinople pour exiger un tribut plus élevé, Attila renonce à la mort de Théodose et de Chrysaphius à sa vengeance et se tourne ensuite vers l’empire d’Occident, gouverné par Valentinien III ou siége en tant que conseiller et général son ami Aetius.

Les relations entre Attila et Aetius anciens amis et à présent rivaux seront toujours complexes et ambiguës.

Finalement après avoir fait monter la pression de manière graduelle en réclamant que Valentinien lui fasse épouser sa sœur Honoria connue pour ses troubles mentaux et qui l’avait elle même demandé en mariage quinze ans auparavant, Attila déclenche une gigantesque offensive de 400 000 hommes.

Commence alors le terrible jeu des alliances avec les peuples Barbares, certains comme les Ostrogoths, Gépides ou Akatzires préférant le suivre alors que les Wisigoths, les Francs, les Burgondes et les versatiles Alains craignant les féroces Huns plus que les Romains préfèrent se joindre rester fidèle à l’Empire.

Retranché dans une Rome fortifiée, Valentinien envoie Aetius stopper son ancien ami.

Attila et ses Huns ravagent l’Est puis le Nord de la France, pillant et massacrant tout ce qu’ils trouvent et alimentant pour l’éternité la légendes des Huns, barbares impitoyables, buveurs, tueurs et rançonneurs de l’Occident.

Deschodt laisse entendre qu’Attila n’aurait pas approuvé tous ses massacres, cherchant quelques fois à retenir (en pure perte) ses troupes enragées.

Assez étrangement il épargne Paris, ville alors d’importance moyenne, laissant prendre la légende de Sainte Geneviève priant pour que le conquérant épargne sa ville.

Le choc avec Aetius se produit vers Chalons, lors de la célèbre bataille des champs Catalauniques qui fut la plus grande boucherie de l’histoire de l’Occident  (160 000 morts !) jusqu’à la première guerre mondiale et l’apparition des mitrailleuses faucheuses d’hommes.

Après ces combats d’une violence inouïe, Attila négocie avec Aetius et préfère rebrousser chemin alors que son adversaire a cinq fois moins d’hommes que lui.

Le dernier volet sera l’attaque de l’Italie, qui après la prise de la place forte d’Aquilée, failli bien entre complète, Attila s’arrêtant alors mystérieusement aux portes de Rome après que le pape Léon Ier est négocié lui même le départ du conquérant.

Outre la légende, on notera que la santé d’Attila s’était considérablement altérée et que malade il est préféré rebrousser chemin pour se soigner et préparer sa succession.

De retour dans son royaume de l’Est de l’Europe, Attila mourra mystérieusement après avoir épousé une jeune princesse barbare âgée de 16 ans.

Sa mort, à 58 ans aboutira à l’effondrement brutal de l’empire des huns.

En conclusion, cet « Attila » écrit dans une langue simple, vivante et animée séduit.

L’essentiel est la avec des tentatives d’analyses sur les mystérieux volte faces d’un prince nomade partiellement occidentalisé, qui alors qu’il aurait pu mettre à lui seul un terme à l’empire romain finissant rebroussa pour des raisons obscures à chaque fois chemin.

Le livre nous emmène de l’extrême Orient à l’Europe, dans une épopée sanglante et haute en couleur avec un véritable choc des cultures entre les sauvages huns et les romains certes toujours cruels mais plus raffinés.

La raison principale avancée par Deschodt pour expliquer les motivations d’Attila demeure le tropisme qu’exerçait pour lui l’Occident, sa culture et ses richesses.

Il en ressort l’image d’un homme bien plus intelligent, complexe, subtil que l’image de brute sanguinaire que ses ennemis chrétiens prêtèrent à ce Fléau de Dieu.

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