La Seconde guerre mondiale (Claude Quétel)

 



Sorti en 2015, « La Seconde guerre mondiale » est un énorme pavé de plus de 550 pages de l’historien Claude Quétel qui propose une relecture éclairée du plus grand conflit de l'histoire de l’Humanité.

Quétel choisit pourtant une lecture plutôt classique, linéaire et chronologique des évènements avec pour commencer les vingt ans succédant à la fin de l’armistice de la Première guerre mondiale, le sentiment d’injustice et d’humiliation terribles de l’Allemagne, le rôle fantoche de la Société Des Nations sorte de brouillon de l’ONU et l’extrême frilosité des politiciens français face à la remilitarisation du camp adverse.

Alors qu’en France, les mouvements pacifiques portés par Aristide Briand contribuent à se voiler la face concernant les véritables objectifs de l’Allemagne, Adolf Hitler politicien autodidacte assoiffé de revanche sociale, rate un putsch en 1924 et rédige en prison « Mein Kampf » manifeste politique confus basé sur la haine viscérale des Juifs responsables selon lui de tous les maux du Monde et l'existence d'une race allemande ayrienne supérieure car pure appelée à régner sur l'Europe.

En secret et face à une communauté internationale passive, l’Allemagne reconstitue son industrie d'armement et surtout son armée en misant sur une arme révolutionnaire à l’époque : le blindé dont le général Heinz Guderian devient le meilleur spécialiste.

Chef du parti Nazi, Hitler prend le pouvoir en 1934 en s’appuyant sur une milice privée les SA qu’il double par les SS, réputés plus fanatiques et fidèle à sa personne.

Hitler liquide ses rivaux SA comme Ernst Röhm et devient le Reichfurher, accélérant la militarisation de son pays en prévision de la revanche de 1914-1918.

Alternant coups de force militaires et discours apaisants vis-à-vis des officiels français, Hitler se montre habile, testant les réaction du camp adverses lorsqu’il rogne sur les accords du traité de Versailles.

En 1936, Hitler trouve un allié en la personne de Benito Mussolini, dictateur fasciste au profil similaire qui a pris le pouvoir en 1922 et possède les même rêves de grandeur pour l’Italie.

Lorsqu’il s’assure de la neutralité de la Russie en signant un pacte de non agression en 1939, Hitler se sent pousser des ailes et envahit la Pologne sans préavis qui malgré une résistance héroïque succombe rapidement.

Il apparait clairement que après le traumatisme de 1914-1918, la France ne s’est pas préparée a un affrontement de cet ampleur : son armée n’a pas évolué, restant figée dans une doctrine de guerre de position alors que les Allemands misent sur une guerre de mouvement dans laquelle l’aviation et les blindés se montrent décisifs.

Ni Daladier ni Reynaud, ni aucun des généraux de l’époque comme Gamelin ne font preuve de la lucidité et au courage nécessaires pour faire face à la situation et Hitler passe donc à la phase suivante en 1940, l’attaque de la France en roulant littéralement sur le Benelux.

Malgré leur courage, les troupes françaises mal organisées et mal équipées sont balayées.

Lorsque Reynaud fait appel à Pétain, le héros de 1914-1918, celui-ci pousse la France a signer un armistice plutôt que de continuer la Résistance, afin d’officiellement de la préserver de nouvelles souffrances.

Le lieutenant-colonel De Gaulle, qui avait pourtant alerté ses supérieurs sur le danger représenté par l’Allemagne, quitte la France pour prendre la tête d’un mouvement de Résistance tandis que Pétain devient l’instrument d’Hitler en lui cédant notamment les forces navales stationnées en Afrique du nord.

Seul Winston Churchill qui lui aussi avait vu juste dans la menace représentée par Hitler résiste seul en profitant du caractère insulaire de la Grande-Bretagne.

Churchill galvanise la résistance anglaise avec ses fameux discours et les pilotes de la Royal Air Force mettent à mal ceux de la Luftwaffe, ce qui provoque la colère d’Hitler véritablement obsédé par a conquête de l’Angleterre pour assoir sa domination totale sur l’Europe.

Le duel se poursuit également en mer avec les sous marins U-boot allemands qui tentent de couler les navires marchands anglais afin d’asphyxier l’adversaire.

Mais Churchill reçoit une aide massive en armement des États-Unis, qui ont finalement compris l’enjeu de cette bataille et permettent à l’Angleterre de tenir la dragée haute au conquérant allemand.

La Royal Navy remet la Marine italienne à sa place en Méditerranée et l’intervention aéroportée manquée de la Wehrmacht en Crète douche sérieusement les velléités de conquêtes insulaires d’Hitler.

Vexé, Mussolini se rabat sur une expansion en Afrique en annexant la Libye et la Somalie, mais doit appeler au secours son allié Allemand pour mettre au pas la Grèce, qu’il avait gravement sous-estimé.

Hitler charge un homme de confiance, le général Edwin Rommel de commander l’armée allemande en Afrique.

Maitre tacticien, Rommel tiendra longtemps en échec les forces anglaises avec ses chars et ses manœuvres audacieuses dans le désert.

Mais en 1940, Hitler prend une décision qui sera fatale pour ses plans de conquête : faire volte face et attaquer son allié russe.

Sous-estimant l’Armée rouge qui a essuyé une humiliante défaite face à la modeste Finlande, Hitler attaque en escomptant sur une débandade russe et une victoire rapide à l’été.

Mais comme pour Napoléon, la Russie va s’avérer être un piège mortel pour la Wehrmacht dont les blindées s’enlisent à la saison du dégel.
Staline qui délocalisé ses usines de production en Sibérie, puise sur le vivier colossal de sa population et présente des divisions dotés de matériels (avions, chars) certes plus rustiques mais particulièrement efficaces dans les rudes conditions climatiques de son pays.

En Allemagne, la situation se tend dans la cour d’Hitler qui ne supporte pas les contradictions de généraux et tend à les remplacer par des hommes soumis à ses ordres et fanatisés par le nazisme comme Bormann, Goring, Donitz, Heydrich, Himmler ou Gobbels.

L’idée de la « solution finale » consistant à l’éradication définitive de la race juive est mise en pratique avec une recherche sans précédent du meurtre de masse en utilisant des chambres à gaz crées par Heydrich et déployées dans les camps de concentration de Pologne ou furent décimés la plupart des Juifs d’Europe.

Dans l’une des heures les plus noires de l’histoire de l’humanité, certains gouvernements de pays annexés collaborent avec les Nazis comme Laval et Pétain en France avec la mise en place de rafles.

La Résistance se met aussi en place dans pratiquement chacun des pays annexés avec des moyens souvent bien limités et des représailles sanglantes des Allemands à chaque attentat commis.

L’autre point de basculement du conflit est l’attaque en 1941 de la flotte américaine à Pearl Harbour par le Japon, dont les visées expansionnistes et fascistes en Asie rejoignent celle de l’Allemagne et de l’Italie en Europe.

Très dominateur en Asie ou il a conquis depuis 1937 rapidement une partie de la Chine, la Malaisie, la Birmanie la Thaïlande, les Philippines et Java,  le Japon finit par forcer les États-Unis à entrer en guerre dans une des plus gigantesques batailles navales qui aient existé.

Négligeant l’importance stratégique du renseignement et des Porte-avions, les Japonais ont pourtant le dessous face à la puissance naval américaine, qui anéantit sa Marine à la bataille de Midway en 1942.

Dès lors le Japon impérialiste va se lancer dans une guerre défensive exacerbée par l’honneur et le sens du sacrifice, le conduisant à l'action d’avions kamikazes qui passè l’effet psychologique fut  traitée par les Américains par une intensification de la DCA des croiseurs.

En rappelant les forces en présence, Quétel démontre l’écrasante supériorité numérique et surtout industrielle des Etats-Unis comparés au Japon et à l’Allemagne, et démontre l’insanité à long terme des plans de conquête de ces deux nations, d’autant plus que Hitler a commis l’erreur de s’attaquer à l’Ours russe.

La Seconde guerre mondiale est aussi synonyme d’une effarante course à l’armement notamment dans le domaine aéronautique avec de part et d’autres des avions à réaction toujours plus rapides, maniables et armés.

Il en va de même dans les domaine naval ou les Porte-avions alliés prennent le dessus sur les sous-marins allemands, faisant des puissants croiseurs et destroyers des armes dépassées, ou dans le domaine terrestre ou la compétition entre chars et canons fait rage.

Quétel résume la défaite de l’Allemagne et du Japon à un essoufflement pur et simple des ressources démographiques et industrielles des deux pays incapables de s’aligner sur la productivité exceptionnelle de l’industrie d’armement des Etats-Unis.

Hitler aura beau jusqu’au bout rêver de la mise au point d’armes secrètes comme les V1/V2 premiers missiles balistiques, ceux-ci ne suffiront pas à eux seuls à empêcher le renversement inexorable de la guerre après la défaite de Stalingrad en 1942.

Malgré son génie, Rommel lui-même doit aussi battre en retraire en Afrique, lui-aussi surclassé par la qualité des troupes anglo-américaines commandées par l’anglais Montgomery.

Hitler le rappelle pour organiser la défense de la cote Normande alors qu’il craint un débarquement massif des Alliés.

Les Alliés débarquent pourtant une d’abord en Méditerranée reprenant la Sicile, la Corse et la Sardaigne avant de remonter en Italie dont les armées se défendent âprement en profitant des reliefs montagneux des Abruzzes et du soutien des troupes allemandes envoyées par Hitler pour aider son allié Mussolini.

En 1944, dans un déchainement insensé de violence, le débarquement principal à l’Ouest n’a pas lieu dans le Pas de Calais comme l’escomptait Hitler mais à bien en Basse Normandie.

Malgré leurs qualités de combattants et les terribles pertes qu’ils infligent à leurs adversaires dans le bocage normand, les Allemands reculent face à la puissance adverse, leurs précieux chars étant décimés par l’écrasante domination aérienne des Alliés.

A Berlin, Hitler fulmine, limogeant coup sur coup les généraux qu’il accuse d’incompétence ou de défaitisme, lançant d’invraisemblables contre-attaques et refusant que ses armées reculent face à un ennemi pourtant supérieur.

De Gaulle revient alors sur le devant de la scène et parvient à exiger la libération de Paris, objectif jugé non stratégique par le commandement américain d’Eisenhower et Patton.

Les Alliés poussent ensuite leur avance à l’Est de la France, libérant les régions et peuples les unes après les autres, De Gaulle devant également insister pour que les grandes villes d’Alsace soient symboliquement dégagées du joug allemand.

Dès lors, Hitler se sait pris en tenaille, les grandes villes allemandes étant elles aussi victimes d’horribles bombardement, notamment de l’aviation anglaise, qui entend faire également payer cher aux populations civiles leurs propres bombardement durant le Blitz.

Les martyrs des villes comme Cologne ou Dresde sont entrés dans l’histoire…mais les Russes ne sont pas en reste, commentant de véritables atrocités (massacres, viols, pillages) sur les villes allemandes conquises.

Dans cette course contre la montre à laquelle se livrent Américains et Russes, ces derniers sont les premiers à arriver à Berlin.

Affaibli par le stress et la maladie, Hitler réfugié dans son bunker continue de lancer des ordres invraisemblables exigeant la destruction de l’Allemagne plutôt que sa conquête et demandant à son peuple de mourir pour et avec lui.

Ayant vu le corps de Mussolini exhibé par une foule en colère en Italie, Hitler se suicide en 1945, entrainant avec lui sa compagne Eva Braun qu’il épouse avant sa mort et la fanatique famille Goebbels.

Chez les Nazis c’est la débandade pure et simple, certains officiers étant tués en essayant de fuir, d’autres étant arrêtés et jugés dans le célèbre procès de Nuremberg ou ils tenteront sans succès de minimiser leurs responsabilités en se disant qu’il n’avait fait qu’obéir en tant que militaires aux ordres.

Dans le Pacifique, la pénible reconquête des iles occupées par les Japonais après la bataille de Midway fait prendre conscience à l’état major américain de Nimitz et Mc Arthur, que le jusqu’au-boutisme nippon va couter plus d’un million d’hommes pour parvenir jusqu’à Tokyo.

La décision est alors prise d’utiliser l’arme atomique en 1945 à deux reprises, Hiroshima et Nagasaki afin de contraindre à la rédition un pays en le menaçant, première mondiale d’annihilation pure et simple.

L’ouvrage se clôt alors sur l’horrible bilan comptable du conflit en tablant sur 50 à 60 millions de morts, contenu des incertitudes sur les victimes civiles notamment chinoises.

La Russie paye le plus lourd tribut avec plus de 26 millions de morts, l’Allemagne venant en seconde (6 millions) et le Japon en trois (2,6 millions).

Dans le même ordre de grandeur du demi-million, les pertes de la France, de l’Angleterre et de l’Italie ne traduisent par la combativité beaucoup plus importante de ces deux dernières.

En proportion de sa modeste population, la Pologne est le pays le plus saigné en raison de l’acharnement d’Hitler pour exterminer les Juifs.

Enfin une fois l’exercice certes imparfait des procès des anciens dignitaires Nazis et Japonais effectué, la fin du conflit aboutit à la création de l’ONU, dont l’efficacité réelle doit être regardé avec scepticisme et à la bipolarisation du monde entre USA et URSS, l’Europe occidentale recevant un coup s’avérant fatal pour le déclin de son influence dans le monde.

En conclusion, même si on croit tout connaitre ou presque de la Seconde guerre mondiale, l’ouvrage de Claude Quétel a réussi le tour de force de me passionner par son approche certes exhaustive avec force de statistiques à l’appui, mais en battant en brèche certaines idées toute faites s’apparentant certes à des détails de l’Histoire, mais révélant toutefois un point de vue intéressant.

Ainsi on apprend que l’armée allemande était loin d’être invincible lorsqu’elle déclencha la guerre, mais qu’elle a bénéficié de la passivité et de la mauvaise organisation de ses adversaires, du reste bluffés par la roublardise d’Hitler.

Le mythe de l’invincibilité allemande sera ébréché lorsqu’elle butera sur l’héroïque résistance anglaise porté par un Churchill devenu légendaire puis tombera face aux deux poids lourds mondiaux, les États-Unis et l’URSS, formidables réservoirs humains, naturels et industriels.

Aveuglé par son idéologie raciste, le Japon commettra la même erreur et en subira les conséquences.

Hyper centralisée autour de son führer paranoïaque et imprévisible, l’armée allemande ne sera pas aussi organisée qu’on le pense et commettra sans doute plusieurs erreurs stratégiques lourdes en se privant de ses meilleurs généraux mis sur la touche par Hitler lorsqu’ils osaient le contredire.

Mais la Seconde guerre mondiale est surtout pour moi le récit de l’horreur absolue, d’une somme incommensurable de souffrance, de morts et de combats acharnés passés sous silence comme la résistance valeureuse des Grecs, des Hongrois ou des Polonais face à plus fort qu’eux.

Il est donc logique que cette course à la démesure ait conduit à émergence du moyen d’annihilation suprême : la bombe atomique.

Alors qu’une guerre est en cours contre le terrorisme islamique, largement moins menaçant que l’Allemagne nazi ou le Japon impérial, la Seconde guerre mondiale demeure une référence passionnante pour qui veut comprendre la dangerosité d’une idéologie totalitaire couplée avec d’importants moyens techniques nés d’une organisation démente mais rationalisée à l’extrême.

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