De l’âme (Aristote)

 



Retour bénéfique vers la philosophie avec « De l’âme »  d’Aristote.

Ce court ouvrage d’une petite centaine de pages ne « paye pas de mine »  quand on s’est précédemment ingurgité l’Ethique à Nicomaque ou le Politique mais ne vous y fiez pas il est très riche et plutôt difficile d’accès.

Le titre résume en effet mieux que personne de manière synthétique son objet : l’âme.

En effet Aristote se lance comme but de décrire la nature de l’âme, sa substance ainsi que ses propriétés.

La principal particularité de l’approche d’Aristote est de tisser un lien étroit entre le corps et l’âme.

Pour Aristote et contrairement à Platon, à une âme donnée correspond un corps donné et l’un ne peut aller sans l’autre.

La première partie est très classiquement consacrée à définir le sujet de l’étude et à passer en revue les théories de ces prédécesseurs notamment Démocrite et  Platon  qui sont les plus abondamment cités.

Ainsi les théories numériques de Thalès, harmoniques ou atomistes de Démocrite ou élémentaires de Empédocle quand à la nature de l’âme… sont méthodiquement démontées.

Pourtant je trouve l’idée de comparer l’âme à un feu très séduisante d’un point de vue poétique !  Johnny Hallyday grand penseur de notre siècle ne dit il pas « allumer le feu ? »  pour signifier une communion d’ âme avec ses fans imbibés d’alcool ?

Mais c’est sans nul doute  parce qu’après avoir lu attentivement le traité dont je vous parle il s’est déclaré vivement opposé aux  théories aristotéliciennes.

Dans le livre deux, Aristote arrive  rapidement à une définition générale.

L’âme est vue comme « l’entéléchie première d’un corps naturel organisé. »

La notion d’entéléchie est difficile à cerner et m’a posée des difficultés.

Pour Aristote l’entéléchie est la force permettant de passer d’un acte en puissance à la réalisation de cet acte.

L’âme se définit donc dans nos actions.

En effet l’âme est le principe (la cause) des facultés définissant les êtres vivants c’est à dire nutritives, sensitives, motrices et pensantes.

Puis l’ouvrage bascule presque totalement  dans la biologie.

Les sens sont ainsi passés en revue avec une hiérarchie mettant le toucher et le goût au sommet de la pyramide car considérés comme les indispensables à la survie.

Aristote dit que l’âme des plantes leur permet d’assurer des facultés nutritives et sensitives, celle des animaux des facultés motrices et pensantes (en plus de celles des plantes ) même si contrairement à l’homme ces derniers n’ont pas d’intellect (intelligence).

Pour Aristote les animaux sont même capables d’imagination (c’est à dire de représentations mentales ) mais sont gouvernés dans leurs actes par leurs désirs.

L’homme possédant l’intellect est capable de raison et donc de ne pas suivre ses désirs (impulsions, instincts ) dans ses actes ce que ne peuvent pas faire les animaux.

La notion d’intellect est très complexe et longuement détaillée.

Apparaît un passage mystérieux et peu explicite ou Aristote parle d’un intellect « immortel » non corruptible sans doute nous survivant après la mort (il rejoint pour moi Platon sur ce point même si il ne s’aventure pas à parler de réincarnation comme son ancien maître ) et d’un autre corruptible (c’est à dire périssable ) nous permettant simplement de penser.

Grâce à l’intellect l’homme est également capable de penser de manière abstraite et théorique des objets non directement en relation avec ce que perçoivent ses sens.

Cependant pour Aristote même dans ce cas, les sens et l’imagination sont des instruments nécessaires à l’exercice de cette forme intelligence.

Donc finalement l’étroitesse de la relation âme-corps est démontrée.

Livre difficile traitant d’une notion abstraite, intangible difficilement appréhendable, menant assez vite à la notion de religion et du divin, « De l’âme » est un ouvrage sans doute plus ardu que l’Ethique ou le Politique, à relire et à méditer longuement pour commencer à comprendre la pensée profonde de l’auteur.

J’avoue sans honte que certains passages m’ont semblé peu clairs et mériteraient une relecture approfondie.

Mais au final une question me tarabuste : comment en effet démontrer l’existence d’une véritable âme ?

J’ai l’impression que Descartes (que je n’ai pas lu) et l’Eglise catholique ont nié la notion d’âme aux animaux et aux plantes, l’accordant simplement à l’homme.

Mais finalement ne parlaient ils pas tout simplement d’intelligence ?

Aristote lui semble plus large dans sa vision de l’âme.

L’ouvrage m’a peut être paradoxalement plus impressionné par la finesse de ses analyses biologiques du monde végétal et animal avec la conclusion que je tire à savoir que les êtres  reçoivent de la Nature le niveau de complexité de leur âme nécessaire à assurer les actes permettant leur survie.

Ainsi  on peut dire que Chuck Norris a juste reçu le niveau de complexité d’âme qui lui était nécessaire pour se nourrir et frapper très fort tout ce qui se présentait à lui.

     

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