Rock (Philippe Manœuvre )
On ne présente plus Philippe Manœuvre dit « Philman » critique pointu du rock ‘n roll ayant traversé les époques et connu du grand public depuis ses apparitions dans « La nouvelle star » et « Les grosses têtes ».
Connaissant « Philman » depuis « Rock&folk » et « Oui FM », j’ai lu avec un intérêt non dissimulé sa biographie intitulée tout simplement « Rock ».
« Rock » est plutôt une longue série d’anecdotes de ce passionné de musique plutôt qu’une réelle biographie intimiste.
On commence à fond les manettes par l’histoire d’Iggy Pop et de ses Stooges, punk-shock rockers ultimes à la carrière météorique à la fin des années 60 avant de renaitre de leurs cendres au début des années 2000 pour s’éteindre à tout jamais, Iggy faisant figure de survivant avec une vie et une carrière dignes elles aussi d’un roman.
Après une introduction aussi étincelante, revenir aux racines familiales des Manœuvre s’avère nettement moins captivant : milieu modeste mais cultivé de fils d’instituteur de l’est de la France, puis éveil à la musique dans les années 60 avec l’arrivée du rock en France, symbole d’émancipation et de liberté pour une certaine jeunesse de l’époque.
Monté à Paris, Manœuvre gravitera autour de sa passion la musique rock.
Fan inconditionnel des Rolling stones qu’il préfère nettement aux Beatles, Manœuvre consacre un long chapitre à sa relation tumultueuse avec Mick Jagger et ses caprices de diva.
Il est également beaucoup question de drogues notamment avec Keith Richards, camé notoire plusieurs fois inquiété pour des affaires de stups.
Difficile de parler de l’histoire du rock sans évoquer celle du punk, mouvement ramassé sur une très courte période mais à l’influence majeure à la fin des années 70 avec cette envie d’autodestruction et de révolte sociale.
Manœuvre parle beaucoup des Sex pistols, un peu des Clash et de la scène française, assez peu des Ramones et considère les Stooges comme un groupe à part auquel il a déjà consacré un chapitre.
De manière assez décousue, on découvre ses débuts de journaliste avec le mensuel dédié à la Science-fiction « Metal hurlant » qui rassemble le gratin des auteurs de l’époque : Druillet, Moebius, Dionnet, Bilal, Tardi…
Sans limite, « Metal hurlant » aborde tous les genres et publie des histoires de loubards ou du porno SM…mais si il rate l’adaptation de Bukowski réussit celles de Shelby Jr, Hunter Thomson.
Impossible pour le journaliste de ne pas parler des personnalités françaises qu’il a fréquentées : Serge Gainsbourg dont il a partagé l’intimité, les fêtes chez Castel et l’alcoolisme, Johnny Halliday qu’il aime comme le « premier » qui ait osé le rock en France et pardonne les errances musicales, l’entourage agressif qui l’exploite comme la poule aux œufs d’or qu’il est devenu au motif de son incroyable présence scénique.
Mais Manœuvre c’est aussi un personnage de télévision : soutenu par les puissants de Canal + que sont De Greef et Lescure, il fait « Les enfants du rock » qui connait un beau succès puis navigue d’émissions en émissions comme la douteuse « Sex machine » dédié au funk…et au cul, un long passage sur Canal Jimmy avec l’amusant « Rock press club », le nostalgique « Top bab » avant de se tourner fugacement vers des médias plus populaires comme M6 et RTL.
Personnage à facettes multiples, Manœuvre ne passe pas à côté des trois phénomènes pop des années 80 : Michael Jackson, bombe musicale et médiatique devenu rapidement inaccessible en raison de son statut de super star coupée du monde, Madonna sans doute moins géniale musicalement mais charismatique, déterminée et bête de scène, et enfin Prince, génie ombrageux surproductif.
De manière plus surprenante on retrouve dans un même chapitre Joey Starr et Michel Polnareff, le premier aidé dans l’écriture d’une biographie au gout de psychothérapie sur fond de délire au crack et aux champignons, le second nettement plus sympathique, vivant en original dans un désert californien de Palm springs.
Manœuvre évoque sa rencontre avec « Nounours » ex lieutenant de Mesrine, un dingue de rock ayant mal tourné, ses expériences « mystiques » en Egypte et au Mexique (qu’il place en Amérique du Sud !) et relate chacun de ses appartements parisiens, lieux de nombreuses fêtes et relations intimes comme avec l’écrivain destroy Virginie Despentes ou des mannequins américains.
Sa vie privée, parfois difficile est sommairement évoquée au travers de sa fille Manon, incarcérée aux États-Unis pour son statut d’ado drogué et violent, puis sa relation avec Candice, 24 ans plus jeune que lui.
Devenu sobre à 64 ans, Manœuvre a quitté Paris pour la Picardie et mène dit-il une vie plus saine aux cotés de sa famille.
Une note conclusive au gout amère : la perte d'influence du rock au profit du hip-hop et de la pop et l'attentat terrible du Bataclan, viennent nous rappeler à la dure réalité des années 2010.
En conclusion, « Rock » est une mine d’anecdotes désordonnées montrant le panel large des gouts et des fréquentations de Philippe Manœuvre allant des punk aux stars internationales de la pop, en passant par quelques icones françaises avec quelques incongruités comme le rappeur multifacette Joey Starr.
Cette biographie parle donc beaucoup de drogues, d’alcool, de disparitions précoces et même un peu d’occultisme…
Comme pour un livre américain, le sexe est assez peu abordé et le heavy metal complétement snobé avec à peine une courte anecdote mexicaine sur un Ac/Dc en pente déclinante.
Un bouquin fourre-tout donc surtout passionnant dans ces quelques pages consacrés à « Metal hurlant » véritable Ovni journalistique…
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