Les tribulations d’un chinois en Chine (Jules Verne)

Si je connaissais les ouvres les plus connus de Jules Verne, je n’avais en revanche jamais lu « Les tribulations d’un chinois en Chine » tout juste avais je en mémoire un vieux film français avec Jean Paul Belmondo adapté de cette œuvre.
La lecture de ces tribulations s’est avérée en définitif absolument délicieuse.
Kin-Fo est un jeune Chinois de Shanghai, qui a hérité d’une fortune considérable de la part de son père Tchoung-Héou homme d’affaire ayant fait fortune dans le commerce de rapatriement de cercueils des travailleurs chinois immigrés aux Etats Unis.
Il vit avec un ami et conseiller Wang, ancien membre des Tai-Ping, bande de rebelles sanguinaires, s’étant converti à la philosophie de Confucius et son valet Soun, personnage stupide, maladroit et comique du récit.
Jeune, beau, intelligent, riche, allant se marier une jeune veuve la belle Lé-ou, Kin-Fo a tout pour être heureux mais s’ennuie à en mourir car sa vie n’a aucune saveur à ses yeux.
Apprenant par une lettre provenant de sa banque américaine qu’il a été ruiné, Kin-Fo décide donc le plus simplement du monde de mettre fin à ses jours.
Son but est tout d’abord de se suicider et d’éprouver enfin quelques émotions au moment de mourir.
Il se rend tout d’abord dans une compagnie d’assurance américaine et place en deux fois une somme importante en assurance vie, laquelle à sa mort sera partagée entre Lé-ou et Wang.
La compagnie d’assurance dépêche deux de ses agents Craig et Fry, véritable duo comique façon Dupont et Dupond de chez Hergé, pour suivre Kin-Fo et s’assurer de sa sécurité jusqu’à ce que la somme totale soit versée à l’assurance, soit environ deux mois après la signature du contrat.
Puis s’apercevant qu’il ne peut se suicider, par un jeu pervers il écrit une lettre à  Wang pour lui demander de le tuer sous un délais de deux mois.
Par ce procédé il pense ainsi dédouaner son ami d’une accusation de meurtre.
Mais Wang a du mal à accomplir sa tache, il tergiverse et disparaît.
Entre temps, Kin-Fo apprend que la banque a commis une erreur et que sa fortune est intacte.
Il revient donc sur sa décision de mourir et se lance à la poursuite de Wang à travers tout la Chine en allant de Shanghai à Pékin en passant par Nan-king.
Entre temps, Wang, que l’on croit mort noyé,  s’est finalement désisté et a chargé une ancienne connaissance à lui, Lao-Shen cruel chef de bande Tai-Ping d’éliminer Kin-Fo.
Kin-Fo va donc parcourir toute la Chine avec Soun, Craig-Fry, en tentant à la fois paradoxalement de retrouver Wang, Lao-Shen tout en échappant à leurs tueurs !
Le point culminant du récit est pour moi l’incroyable évasion de Kin-Fo et de ses amis d’une jonque chinoise, en se jetant à la mer pour échapper à des tueurs cachés dans des cercueils.
Détail technologique intéressant, la survie de Kin-Fo et de ses amis est assurée par des combinaisons de survie en caoutchouc assez avant gardistes pour l’époque.
Après avoir bravé la mort en mer et une fois le délais de l’assurance passé,  Kin Fo est lâchement livré par Craig-Fry à la bande des Tai-Ping qui vit sous la Grande Muraille.
Lao Shen, inflexible aux supplication de Kin-Fo parait déterminé à remplir son contrat.
Au moment de l’exécution, la surprise intervient et Kin Fo s’aperçoit que Wang a voulu lui donner une leçon en lui apprenant le caractère précieux de l’existence.
Ainsi ayant connu la peur, l’espoir, la souffrance, Kin-Fo découvre la valeur de sa propre vie et épouse la belle et sympathique Lé-ou.
En conclusion « Les tribulations d’un chinois en Chine » est une merveille dépassant allégrement le cadre du roman d’aventure pour aborder brillamment le thème du conte philosophique.
Le détachement, le dégoût de Kin-Fo pour la vie provient du fait qu’il a toujours tout obtenu trop facilement et que sa perception de l’effort, du mérite a été atténuée par ces conditions initiales exceptionnelles.
Confronté au cours de son périple à de grands dangers ou à des situations qui lui échappent, Kin-Fo découvre en lui ses émotions profondes, vient puiser dans sa volonté, dans ses ressources, développe son instinct de survie et apprend lui aussi à goûter au plaisir simple d’être en vie.
« Les tribulations d’un chinois en Chine » est donc le parcours initiatique d’un jeune homme aisé de la bourgeoisie qu’éduque son maître à travers le voyage.
Il est à noter le style remarquable, extrêmement documenté sur les provinces chinoises et leur gouvernance complexe au XIXieme siècle, ainsi que l’humour (souvent noir !) souvent présent dans ce livre, aussi bien dans les dialogues entre les représentants de la compagnie d’assurance et Kin-Fo, que avec les pitreries de Soun.
Ainsi, profond d’un point de vue philosophique (un homme cherche la mort pour trouver le sens de la vie) , riche en aventure et très plaisant à sa lecture, « Les tribulations d’un chinois en Chine » demeure un fantastique roman.

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